16 mars 1845 – Pensée Antique, dans L’Artiste, 4e série, t. III, p.171.

Nerval se prépare à publier dans La Phalange un long article sur le culte d’Isis et les religions à mystères d’Éleusis, qui le mettent tout naturellement sur le chemin du mysticisme pythagoricien. Le sonnet, du reste, sera repris dans Petits Châteaux de Bohême, sous le titre générique de Mysticisme et en 1854 dans Les Chimères sous le titre de Vers dorés.

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PENSÉE ANTIQUE.

 

Eh quoi ! tout est sensible !

Pythagore.

 

Homme ! libre penseur ! te crois-tu seul pensant
Dans ce monde où la vie éclate en toute chose ?
Des forces que tu tiens ta royauté dispose,
Mais de tous tes conseils l’univers est absent.
 
Respecte dans la bête un esprit agissant ;
Chaque plante est une âme à la nature éclose ;
Un mystère d’amour dans le métal repose,
Tout est sensible !... Et tout sur ton être est puissant.
 
Crains, dans le mur aveugle, un regard qui t’épie !
A la matière même un verbe est attaché…
Ne la fais pas servir à quelque usage impie !
 
Souvent dans l’être obscur habite un Dieu caché ;
Et, comme un œil naissant couvert par ses paupières,
Un pur esprit s’accroît sous l’écorce des pierres.

 

GÉRARD DE NERVAL

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