29 décembre 1850 — Les Livres d’enfants. Gribouille, par George Sand, Les Fées de la mer, par Alphonse Karr, Le Royaume des roses, par Arsène Houssaye, dans Le National, rubrique Variétés.

Nerval profite de son article critique sur les livres d’enfants publiés par ses amis George Sand, Alphonse Karr et Arsène Houssaye, pour glisser un conte de son Valois, dont le récit sera repris sous le titre : La Reine des poissons dans La Bohême galante, 12e livraison, du 15 décembre 1852, et simultanément en volume dans Contes et Facéties, et enfin en 1854 dans Les Filles du feu, sous le titre : Chansons du Valois à la suite de Sylvie.

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VARIÉTÉS

Les livres d’enfans n’ont pas encore pris en France tout le développement qu’il faudrait espérer. Le vieux proverbe : « Il n’y a plus d’enfans » est vrai chez nous dans le sens qu’on peut mieux dire qu’il n’y en a pas. La précocité des intelligences est telle que l’enfant comprend tout, et méprise profondément les livres qui lui donnent cette qualification humiliante d’enfant. Il faudrait cependant trouver un terme qui conciliât la susceptibilité naturelle aux jeunes Français, avec les distinctions évidentes que la taille et l’acte de naissance établissent forcément.

Il est difficile, dans le passé, de trouver des traces d’ouvrages faits particulièrement en vue non pas seulement de l’éducation, mais de lectures profitables aux jeunes gens, quelques livres d’histoire et d’histoire naturelle, quelques traités d’éducation, bien ennuyeux, écrits pour la plupart dans le but d’instruire les princes. Des contes de ma mère l’Oye, des fables destinées presque toujours aux hommes plutôt qu’à la jeunesse, voilà tout ce que nous trouvons avant Perrault et Fénelon, qui se sont occupés plus spécialement de ce qui convenait à l’enfance. Toutefois le Télémaque n’est pas, à proprement parler, un livre d’enfans, non plus que le Séthos de l’abbé Terrasson. Cela se rapporte au second âge, et c’est encore bien fort.

En Angleterre et en Allemagne, au contraire, les livres d’enfans abondent. Là, les familles sont plus étroitement groupées ; le climat en est une cause ; l’intelligence est plus lente à se développer, et, de plus, un nombre infini de traditions légendaires fournissent aux auteurs des sujets inépuisables. La teinte rêveuse des imaginations se prête aussi à la compréhension de ce genre de littérature. Chez nous, l’enfant lui-même craint de passer pour crédule, et se raille de bonne heure du fantastique des récits anciens ; on n’arrête son attention qu’à force de grâce et d’esprit.

Est-ce à dire que nous manquions de légendes nationales ou fabuleuses ? Nous possédons à peu près toutes celles dont se vantent les peuples du nord ; seulement, il faut les aller recueillir dans les récits de la campagne, aux veillées, ou dans ces vieilles chansons de grands-mères qui se perdent de plus en plus.

Nous venons de visiter un pays de légendes situé à quelques lieues seulement au-dessus de Paris, mais appartenant aux contrées traversées par l’ancien courant des invasions germaniques qui y a laissé quelque chose des traditions primitives qu’apportaient ces races chez les Gallo-Romains.

Voici un de ces récits qui nous a frappé vivement par sa couleur allemande et que nous ne citons que parce qu’il a quelque affinité avec la légende de Gribouille, admirablement rendue par George Sand.

C’était un pâtre qui racontait cela aux assistans assis autour d’un feu de bruyère, tandis qu’on travaillait autour de lui à des filets et à des paniers d’osier.

Il parlait d’un petit garçon et d’une petite fille qui se rencontraient parfois sur les bords des petites rivières du pays, l’un obligé par un bûcheron nommé Tord-Chêne, qui était son oncle, à aller ramasser du bois mort, l’autre envoyée par ses parens pour saisir de petites anguilles que la baisse des eaux permet d’entrevoir dans la vase en certaines saisons. Mais la pauvre petite fille, toujours courbée et les pieds dans l’eau, était si compatissante pour les souffrances des animaux que, le plus souvent, voyant les contorsions des poissons qu’elle tirait de la rivière, elle les y remettait et ne rapportait guère que les écrevisses qui souvent lui pinçaient les doigts jusqu’au sang, et pour lesquelles elle devenait alors moins indulgente.

Le petit garçon, de son côté, faisant des fagots de bois mort et des bottes de bruyère, se voyait exposé souvent aux reproches de Tord-Chêne, soit parce qu’il n’en avait pas assez rapporté, soit parce qu’il s’était trop occupé à causer avec la petite pêcheuse.

Il y avait un certain jour dans la semaine où ces deux enfans ne se rencontraient jamais... Quel était ce jour ? Le même sans doute où la fée Mélusine se changeait en poisson, et où les princesses de l’Edda se transformaient en cygnes.

Le lendemain d’un de ces jours-là, le petit bûcheron dit à la pêcheuse : — Te souviens-tu qu’hier je t’ai vue passer là-bas dans les eaux de Challepont avec tous les poissons qui faisaient cortège... jusqu’aux carpes et aux brochets ; et tu étais toi-même un beau poisson rouge avec les côtés tout reluisans d’écailles en or.

Je m’en souviens bien, dit la petite fille, puisque je t’ai vu, toi, qui étais sur le bord de l’eau, et que tu ressemblais à un beau chêne-vert, dont les branches d’en haut étaient d’or..., et que tous les arbres du bois se courbaient jusqu’à terre en te saluant.

— C’est vrai, dit le petit garçon, j’ai rêvé cela.

— Et moi aussi j’ai rêvé ce que tu m’as dit : mais comment nous sommes-nous supposés deux dans le rêve ?...

En ce moment, l’entretien fut interrompu par l’apparition de Tord-Chêne, qui frappa le petit avec un gros gourdin, en lui reprochant de n’avoir pas seulement lié encore un fagot.

— Et puis, ajouta-t-il, est-ce que je ne t’ai pas recommandé de tordre les branches qui cèdent facilement, et de les ajouter à tes fagots ?

— C’est que, dit le petit, le garde me mettrait en prison s’il trouvait dans mes fagots du bois vivant... Et puis, quand j’ai voulu le faire comme vous me l’aviez dit, j’entendais l’arbre qui se plaignait !

— C’est comme moi, dit la petite fille, quand j’emporte des poissons dans mon panier, je les entends qui chantent si tristement, que je les rejette à l’eau... Alors, on me bat chez nous !

— Tais-toi, petite masque, dit Tord-Chêne, qui paraissait animé par la boisson, tu déranges mon neveu de son travail. Je te connais bien avec tes dents pointues couleur de perle... Tu es la reine des poissons... Mais je saurai bien te prendre à un certain jour de la semaine, et tu périras dans l’osier !

A ce moment du conte, les vanniers écoutaient avec une grande attention, car, comme on sait, leur industrie se rapporte à la pêche par de grandes nasses d’osier que l’on place dans les rivières, où le poisson s’engage imprudemment en faisant plier des branches qui se redressent ensuite et l’empêchent de sortir.

Les menaces que Tord-Chêne avaient faites dans son ivresse ne tardèrent pas à s’accomplir. La petite fille se trouva prise un jour sous la forme de poisson rouge, que le destin l’obligeait à prendre à de certains jours. Heureusement, lorsque Tord-Chêne voulut, en se faisant aider de son neveu, tirer de l’eau la nasse d’osier, ce dernier reconnut le beau poisson rouge à écailles d’or, qu’il avait vu en rêve, comme étant la transformation accidentelle de la petite pêcheuse.

Il osa la défendre contre Tord-Chêne et le frappa même de sa galoche. Ce dernier, furieux, le prit par les cheveux, cherchant à le renverser ; mais il s’étonna de trouver une grande résistance : c’est que l’enfant tenait des pieds à la terre avec tant de force que son oncle ne pouvait venir à bout de le renverser ou de l’emporter, et le faisait en vain virer dans tous les sens.

Ici la scène de la légende prend d’étranges proportions. Au moment où la résistance de l’enfant va se trouver vaincue, les arbres de la forêt frémissent d’un bruit sourd, les branches agitées laissent siffler les vents, et la tempête fait reculer Tord-Chêne, qui se retire dans sa cabane de bûcheron.

Il en sort bientôt, menaçant, terrible et transfiguré comme un fils d’Odin ; dans sa main brille cette hache scandinave qui menace les arbres, pareille au marteau de Thor brisant les rochers.

Là, le fantastique légendaire s’est pleinement dévoilé : — le jeune roi des forêts, victime de Tord-Chêne, — son oncle, usurpateur, — sait déjà quel est son rang, qu’on voulait lui cacher. Les arbres le protègent ; mais seulement par leur masse et leur résistance passive... En vain les broussailles et les bourgeons s’entrelacent de tous côtés pour arrêter les pas de Tord-Chêne, celui-ci a appelé ses bûcherons et se trace un chemin à travers ces obstacles. Déjà plusieurs arbres, autrefois sacrés du temps des vieux druides, sont tombés sous les haches et les cognées.

Heureusement, la reine des poissons n’avait pas perdu de temps. Elle était allée se jeter aux pieds de la Marne, de la Meuse et de la Moselle, les trois grandes rivières voisines, leur représentant que si l’on n’arrêtait pas les projets de Tord-Chêne et de ses compagnons, les forêts trop éclaircies n’arrêteraient plus les vapeurs qui produisent les pluies et qui fournissent l’eau aux ruisseaux, aux rivières et aux étangs ; que les sources elles-mêmes seraient taries et ne feraient plus jaillir l’eau nécessaire à alimenter les rivières, sans compter que tous les poissons se verraient détruits en peu de temps, ainsi que les bêtes sauvages et les oiseaux.

Les trois grandes rivières prirent là-dessus de tels arrangemens que le sol où Tord-Chêne, avec ses terribles bûcherons, travaillaient à la destruction des arbres, — sans, toutefois, avoir pu atteindre encore le jeune prince des forêts, — fut entièrement noyé par une immense inondation, qui ne se retira qu’après la destruction entière des agresseurs.

Ce fut alors que le roi des forêts et la reine des poissons purent de nouveau reprendre leurs innocens entretiens.

Ce n’étaient plus un petit bûcheron et une petite pêcheuse, — mais un Sylphe et une Ondine, lesquels, plus tard, furent unis légitimement.

 

Nous ne pensons pas qu’il faille voir dans cette légende un allusion à quelqu’une de ces usurpations si fréquentes au moyen-âge, où un oncle dépouille un neveu de sa couronne et s’appuie sur les forces matérielles pour opprimer le pays. Le sens se rapporte plutôt à cette antique résistance issue des souvenirs du paganisme contre la destruction des arbres et des animaux. Là, comme dans les légendes des bords du Rhin, l’arbre est habité par un esprit, l’animal garde une âme prisonnière. Les bois sacrés de la Gaule font les derniers efforts contre cette destruction qui tarit les forces vives et fécondes de la terre, et qui, comme au Midi, crée des déserts de sable où existaient les ressources de l’avenir.

Le type de toutes ces légendes, soit en Allemagne, soit en France, ne varie que par les détails, incroyablement fantasques. la poésie, le style et la description y ajoutent des grâces charmantes. La poésie de la forme a peut-être manqué à Perrault, le maître du genre en France ; mais la naïveté et la bonhomie font le grand mérite de ses récits.

Chez George Sand, tout est réuni. Son Histoire de Gribouille est un de ces chefs-d’œuvre qu’elle sait créer dans tous les genres, et selon la compréhension du public auquel elle s’adresse.

Ici la légende est plus gauloise. Elle repose également sur un ancien conte populaire formulé plus tard par un proverbe.

On y retrouve également, toutefois, cette double existence idéale et réelle qui est le caractère de tous ces récits, et qu’Hoffmann a su rendre admirablement dans la plupart de ses récits. Toujours le héros vous apparaît sous une forme vulgaire, courbé sous la loi du travail, — comme Apollon ou comme Hercule, — mais couvant en lui un génie protégé par les esprits du ciel et arrivant après mille traverses au bonheur et à l’immortalité. Cette pensée qui encourage l’enfant à s’élever par l’imagination, par la sympathie et par le courage est essentiellement utile à présenter aux jeunes imaginations. Par un hasard singulier, nous la retrouvons sous différents aspects, dans les trois petits livres dont nous allons parler.

L’œil est d’abord séduit quand on ouvre ce livre par l’aspect de charmantes vignettes de M. Maurice Sand. Jamais petit livre n’a été mieux servi par le fait de cette unité difficile à atteindre de texte et de l’illustration.

Voici d’abord une jolie cabane de paysans, puis un enfant qui nage dans une rivière précédé et guidé par une libellule au corsage d’or, aux quatre ailes lamellées et transparentes. Il vient de pleuvoir sans doute, mais dès que Gribouille n’a pas craint de se jeter à l’eau, l’orage s’est immédiatement apaisé. George Sand a voulu venger Gribouille du vieux préjugé qui s’attache à toute résolution hardie.

Et en effet, pourquoi ne pas se jeter à l’eau de peur de se mouiller, pourquoi ne pas changer la sensation désagréable de la pluie contre la réalité bienfaisante d’un bain. On a déjà tant de peine à débarbouiller les enfans qu’il est malheureux qu’un proverbe populaire crée dans leurs esprits une sorte de répulsion contre le bain.

Gribouille est un petit garçon plein d’imagination et de cœur, dont les parens sont pauvres et le font rudement travailler ; il ne s’en console qu’en allant parfois rêver dans les bois, et en s’instruisant dans la contemplation de la nature. Un gros bourdon le pique, il le saisit par les ailes et lui dit : — Pourquoi m’as-tu fait du mal, à moi qui ne t’en fais pas. Puis il lui rend la liberté.

Le bourdon n’est pas plus un véritable insecte que Gribouille n’est un enfant ordinaire. Il lui apparaît bientôt sous la forme d’un seigneur richement vêtu à la mode de Henri IV, avec un justaucorps et des braies de velours striés d’or et de violet, un petit manteau flottant comme des ailes, l’œil rond, très barbu, et parlant d’une grosse voix ronflante. Il est le seigneur d’un château voisin et invite Gribouille à venir l’y trouver. Il se chargera de son instruction.

Les parens de Gribouille, éblouis de son récit, le forcent d’accepter, comptant sur la fortune du seigneur Bourdon. Mais l’enfant ne tarde pas à se déplaire dans ce château plein de bruit et de mauvaise compagnie, où l’on ne fait rien que manger le bien d’autrui. Il retourne pensif dans le bois, et là fait connaissance avec la reine des abeilles, qui lui semble beaucoup plus honnête que M. Bourdon.

Alors commence une lutte entre ces deux influences, dont l’une, on le comprend, représente l’oisiveté, l’autre le travail. Il s’élève une guerre entre les deux sortes d’insectes. Les fourmis prennent le parti des abeilles, les mouches et les frelons deviennent naturellement les alliés des bourdons. Rien n’est charmant comme les gravures de M. Maurice Sand où il transfigure à la manière allemande ces combattans ailés qui, au fond, sont les génies du bien et du mal, et qui finissent par lutter dans l’air avec des cuirasses et des épées comme les anges armés de Milton. Des scènes charmantes de naïveté et de grâce tempèrent çà et là le côté fantastique de la légende. Il serait trop long de raconter la scène charmante où Gribouille se jette dans l’eau pour échapper à la pluie, qui met en déroute, du reste, le roi des Bourdons, devenu son ennemi. Sa rencontre avec la reine des prairies, le tableau de la cour de cette reine, la protection dont elle le couvre, forment une suite de tableaux variés et charmans, dont les illustrations sont des plus pittoresques et des plus riantes. Enfin, Gribouille finit, à force de vertus, de bon cœur et d’intelligence, par devenir un charmant sylphe des prés ! C’est une pièce complète qui se termine par la vue du temple traditionnel où tourne l’éternel soleil d’or et de cristal qui fait la joie de la jeunesse. On peut voir tout cela sans quitter le coin du feu.

L’antique galanterie française ainsi que l’admiration due à un grand talent nous ont conduit à laisser ici peu de place pour Alphonse Karr et Arsène Houssaye ; on ne traite ainsi que ses intimes amis. Le petit livre d’Alphonse Karr, Les Fées de la mer, tranche pourtant d’une manière très heureuse avec celui de George Sand. Après la douce et rêveuse poésie des campagne du milieu de la France, nous aspirons avec un charme différent l’âpre senteur des bruyères et des ajoncs ; la vague bat à nos pieds, et, selon l’expression de Goethe, un nouveau jour luit sur de nouveaux rivages. Une de ces scènes de naufrage à la fois touchantes et terribles qu’il est toujours à portée de peindre, une famille de pêcheurs avec leurs mœurs naïves et leurs croyances. Puis une petite fille enlevée par un flot de la mer, et son frère de lait qui pleure au bord du rivage, voilà l’exposition. Puis arrivent toutes les splendeurs de la féerie maritime. L’enfant sauve une mouette qu’on va tuer ; la mouette est une fée des eaux qui le transporte dans son palais de cristal et de coraux. la petite fille a été changée en poisson rouge. Le talisman doit servir à la faire reconnaître. L’enfant cherche par toute la terre le sultan Schahabaham, connu pour posséder les plus beaux poissons rouges du monde... Il se laisse abuser par un comédien, qui n’est que le titulaire du rôle, et après mille traverses il finit par sauver sa compagne, qu’un musicien affamé vient de pêcher dans un bocal placé au-dessous de sa fenêtre... sur celle de son propriétaire. On voit que c’est surtout une odyssée comique, où l’on retrouve toute la fantaisie éclatante de l’auteur, avec ces traits de sentiment qu’il sait si bien rendre çà et là dans ses écrits.

Le Royaume des Roses appartient à un autre genre descriptif et pittoresque ; il est particulièrement du goût oriental. C’est l’éclat des Mille et Une Nuits et la grâce philosophique des poètes persans. Ici, la réalité n’est représentée que par les mœurs d’un pays lointain, qui, pour nous, appartient presque au royaume des fées. la scène se passe en Chine. Une pauvre femme meurt laissant un orphelin. Une fée nommée Arc-en-Ciel passe par là, enlève l’enfant et le transporte dans ses états, qui sont le Royaume des Roses. La géographie en est merveilleuse et digne de l’auteur des Sentiers perdus. Cependant, il faut que le jeune homme fasse son éducation. Il est donc rendu à la terre, et, dans les délices de Pékin, il oublie un peu sa marraine la fée ; il est même au moment d’épouser une jeune fille un peu matérielle, et qui préfère, en général, aux roses un bon beefsteak (importation anglaise). Cette Chinoise matérielle est un type fort réjouissant.

Mais la fée Arc-en-Ciel conçoit quelque chagrin de voir son protégé l’oublier dans les joies grossières d’une famille de mandarins. Les roses de son royaume se sont toutes fanées... Elle reconquiert un instant l’affection de son filleul ; mais les joies de la terre finissent par l’enlever à l’amour céleste, et, marié enfin à la Chinoise matérielle qui ne pense qu’à l’or et au confortable, il finit par mourir dévoré de chagrins et de regrets. Il est permis de penser qu’il a retrouvé la Fée-aux-Roses dans l’un des sept cieux orientaux. Toutefois, l’auteur pose cette conclusion, qu’il ne faut ni s’abstenir de l’idéal ni mépriser trop la réalité, et finit par cette sentence chinoise : « Tout en regardant le ciel, souvenez-vous que vos pieds touchent la terre. » Le livre est plein de descriptions délicieuses, et ajoute un nouvel éclat à l’attrait varié de ces trois publications d’étrennes, illustrées si richement.

 

GÉRARD DE NERVAL.

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