TEXTES

1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)

1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)

1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)

1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)

15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat

19, 22 avril, 14 juin (BF), Complainte sur la mort de haut et puissant seigneur le Droit d’aînesse, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet

20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet

12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)

11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet

13 et 30 décembre 1827 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet

16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet

29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)

28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré

15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)

1828? Faust (manuscrit autographe)

1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)

1829, Han d’Islande (manuscrit autographe)

mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)

août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)

octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)

24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)

14 novembre 1829, Les Bienfaits de l’enseignement mutuel, Procès verbal de la Loge des Sept-Écossais-réunis, chez Bellemain

21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)

12 décembre 1829, La Mort du Juif errant. Rapsodie lyrique de Schubart (Mercure de France au XIXe siècle)

19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)

2 janvier 1830, La Première nuit du Sabbat. Morceau lyrique de Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)

16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)

23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)

13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)

13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)

13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)

27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)

10 avril 1830, Le Dieu et la bayadère, nouvelle indienne par Goëthe (Mercure de France au XIXe siècle)

29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)

13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)

mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)

17 juillet 1830, L’Éclipse de lune. Épisode fantastique par Jean-Paul Richter (Mercure de France au XIXe siècle)

juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)

14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)

30 octobre 1830 (BF), Choix de poésies de Ronsard, Dubellay, Baïf, Belleau, Dubartas, Chassignet, Desportes, Régnier (Bibliothèque choisie)

11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)

29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )

29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)

14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)

23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)

30 avril 1831, Le Bonheur de la maison par Jean-Paul Richter. Maria. Fragment (Mercure de France au XIXe siècle)

7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)

25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)

17 et 24 septembre 1831, Les Aventures de la nuit de Saint-Sylvestre. Conte inédit d’Hoffmann (Mercure de France au XIXe siècle)

4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)

17 décembre 1831, Odelettes. La Malade, Le Soleil et la Gloire, Le Réveil en voiture, Le Relais, Une Allée du Luxembourg, Notre-Dame-de-Paris (Almanach des muses)

17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)

24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)

14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)

1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)

26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)

20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)

12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)

18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)

2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)

26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)

31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)

24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)

25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)

13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart

19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)

15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)

17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)

21 et 28 septembre 1839, Lettre VI, A Madame Martin (Lettres aux belles femmes de Paris et de la province)

28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)

25 février 1840, Le Magnétiseur

5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)

8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)

26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)

28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)

18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin

26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)

29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)

30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)

11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)

18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)

1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)

février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)

1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)

mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)

1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)

5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc

7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)

31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé

11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)

9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas

novembre ? 1841, Lettre à Victor Loubens

10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)

15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)

24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)

19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)

11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)

10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)

17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)

31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)

5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)

12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)

2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)

30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)

28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)

11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)

15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)

29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)

20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)

8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)

16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)

19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet

1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)

6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)

5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)

novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)

28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)

15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)

17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)

1er juillet 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Les Esclaves (Revue des Deux Mondes)

12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)

16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)

30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)

15 septembre 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Le Harem (Revue des Deux Mondes)

20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)

1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)

22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)

15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)

1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins

15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)

15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)

15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)

17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)

21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)

15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)

15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)

7 janvier-24 juin 1849, puis 2 septembre 1849-27 janvier 1850, Al-Kahira. Souvenirs d’Orient (La Silhouette)

1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)

26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)

6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)

3 novembre 1849 (BF), Le Diable vert, et Impression de voyage (Almanach satirique, chez Aubert, Martinon et Dumineray)

7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)

15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)

26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)

1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)

9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)

15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)

18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)

1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)

24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)

29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)

novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)

24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale

15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)

1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)

15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)

1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)

15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)

21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)

1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)

15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)

1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)

9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)

15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)

23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)

30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)

1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)

6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)

13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)

15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)

20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)

1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)

15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)

1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier

15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)

14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas

25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche

10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)

17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)

1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)

28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud

31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)

25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire

Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968

Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975

30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)

1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)

1854 ? Emerance (manuscrit autographe)

1854 ? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)

janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)

1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)

6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)

3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)

15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)

15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)

1866, La Forêt noire, scénario

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BF: annonce dans la Bibliographie de la France

Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval

10 juillet 1842 — Les Vieilles ballades françaises, dans La Sylphide, 1842, 3e série, t. VI, p. 81-87, signé Gérard de Nerval.

L’article fut repris, avec un choix de chansons différent, dans La Bohême galante (feuilleton du 15 octobre 1852), et en 1854 dans Les Filles du feu, à la suite de Sylvie, sous le titre : Chansons et Légendes du Valois. Cette reprise est introduite par le souvenir ému de sa petite enfance à Mortefontaine : « Chaque fois que ma pensée se reporte aux souvenirs de cette province du Valois, je me rappelle avec ravissement les chants et les récits de mon enfance. la maison de mon oncle était toute pleine de voix mélodieuses (…) »

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LES VIEILLES BALLADES FRANÇAISES.

Avant d’écrire, chaque peuple a chanté ; toute poésie s’inspire à ces sources naïves, et l’Espagne, l’Allemagne, l’Angleterre, citent chacune avec orgueil leur romancero national. Pourquoi la France n’a-t-elle pas le sien ? On nous citera les guerz bretons, les noëls bourguignons et picards, les rondes gasconnes, mais aucun chant des vieilles provinces françaises ne nous a été conservé. C’est qu’on n’a jamais voulu admettre dans les livres des vers composés sans souci de la rime, de la prosodie et de la syntaxe ; la langue du berger, du marinier, du charretier qui passe, est bien la nôtre, à quelques élisions près, avec des tournures douteuses, des mots hasardés, des terminaisons et des liaisons de fantaisie, mais elle porte un cachet d’ignorance qui révolte l’homme du monde, bien plus que ne fait le patois. Pourtant ce langage a ses règles, ou du moins ses habitudes régulières, et il est fâcheux que des couplets tels que ceux de la célèbre romance : Si j’étais hirondelle, soient abandonnés, pour deux ou trois consonnes singulièrement placées, au répertoire chantant des concierges et des cuisinières.

Quoi de plus gracieux et de plus poétique pourtant :

Si j’étais hirondelle !

Que je puisse voler,

Sur votre sein, la belle,

J’irais me reposer !

Il faut continuer il est vrai par : J’ai z’un coquin de frère…, ou risquer un hiatus terrible, mais aussi pourquoi la langue a-t-elle repoussé ce z si commode, si liant, si séduisant, qui faisait tout le charme du langage de l’ancien Arlequin, et que la jeunesse dorée du Directoire a tenté en vain de faire passer dans le langage des salons ?

Ce ne serait rien encore, et de légères corrections rendraient à notre poésie légère, si pauvre, si peu inspirée, ces charmantes et naïves productions de poëtes modestes ; mais la rime, cette sévère rime française, comment s’arrangerait-elle du couplet suivant :

La fleur de l’olivier

Que vous avez aimé,

Charmante beauté !

Et vos beaux yeux charmants,

Que mon cœur aime tant,

Les faudra-t-il quitter ?

Observez que la musique se prête admirablement à ces hardiesses ingénues, et trouve dans les assonances, ménagées suffisamment d’ailleurs, toutes les ressources que la poésie doit lui offrir. Voilà deux charmantes chansons, qui ont comme un parfum de la Bible, dont la plupart des couplets sont perdus, parce que personne n’a jamais osé les écrire ou les imprimer. Nous en dirons autant de celle où se trouve la strophe suivante :

Enfin vous voilà donc,

Ma belle mariée,

Enfin vous voilà donc

A votre époux liée,

Avec un long fil d’or

Qui ne rompt qu’à la mort !

Quoi de plus pur d’ailleurs comme langage et comme pensée ; mais l’auteur de cet épithalame ne savait pas écrire, et l’imprimerie nous conserve les gravelures de Collé, de Piis et de Panard !

Les étrangers reprochent à notre peuple de n’avoir aucun sentiment de la poésie et de la couleur ; mais où trouver une composition plus orientale que dans cette chanson de nos mariniers ?

Ce sont les filles de la Rochelle

Qui ont armé un bâtiment

Pour aller faire la course

Dedans les mers du Levant.

_

La coque en est en bois rouge,

Travaillé fort proprement ;

La mâture est en ivoire,

Les poulies en diamant.

_

La grand’voile est en dentelle

La misaine en satin blanc ;

Les cordages du navire

Sont de fils d’or et d’argent.

_

L’équipage du navire,

Ce sont tout filles de quinze ans ;

Les gabiers de la grande hune

N’ont pas plus de dix-huit ans ! etc.

Les richesses poétiques n’ont jamais manqué au marin, ni au soldat français qui ne rêvent dans leurs chants que filles de rois, sultanes, et même présidentes, comme dans la ballade trop connue :

C’est dans la ville de Bordeaux

Qu’il est arrivé trois vaisseaux, etc.

Mais le tambour des gardes françaises, où s’arrêtera-t-il celui là ?

Un joli tambour s’en allait à la guerre, etc.

La fille du roi est à sa fenêtre, le tambour la demande en mariage : — Joli tambour, dit le roi, tu n’es pas assez riche ! — Moi ? dit le tambour sans se déconcerter,

J’ai trois vaisseaux sur la mer gentille,

L’un chargé d’or, l’autre de perles fines,

Et le troisième pour promener ma mie.

— Touche là, tambour, lui dit le roi, tu n’auras pas ma fille ! — Tant pis ! dit le tambour, j’en trouverai de plus gentilles !... Étonnez-vous après ce tambour-là de nos soldats devenus rois ! Voyons maintenant ce que va faire un capitaine :

A Tours en Touraine

Cherchant ses amours,

Il les a cherchées,

Il les a trouvées

En haut d’une tour.

Le père n’est pas un roi, mais un simple châtelain qui répond à la demande en mariage :

Mon beau capitaine,

Ne te mets pas en peine

Tu ne l’auras pas.

La réplique du capitaine est superbe :

Je l’aurai par terre,

Je l’aurai par mer

Ou par trahison !

Il fait si bien en effet, qu’il enlève la jeune fille sur son cheval, et l’on va voir comme elle est bien traitée une fois en sa possession.

A la première ville

Son amant l’habille

Tout en satin blanc !

A la seconde ville

Son amant l’habille

Tout d’or et d’argent.

_

A la troisième ville

Son amant l’habille

Tout en diamants !

Elle était si belle,

Qu’elle passait pour reine

Dans le régiment !

Après tant de richesses dévolues à la verve un peu gasconne du militaire ou du marin, envierons-nous le sort du simple berger ? Le voilà qui chante et qui rêve :

Au jardin de mon père,

Vole, mon cœur vole !

Il y a z’un pommier doux,

Tout doux !

_

Trois belles princesses

Vole, mon cœur vole !

Trois belles princesses

Sont couchées dessous, etc.

Est-ce donc la vraie poésie, est-ce la soif mélancolique de l’idéal qui manque à ce peuple pour comprendre et produire des chants dignes d’être comparés à ceux de l’Allemagne et de l’Angleterre ? Non certes ; mais il est arrivé qu’en France la littérature n’est jamais descendue au niveau de la grande foule ; les poëtes académiques du dix-septième et du dix-huitième siècles n’auraient pas plus compris de telles inspirations, que les paysans n’eussent admiré leurs odes, leurs épîtres et leurs poésies fugitives, si incolores, si gourmées. Pourtant comparons encore la chanson que je vais citer à tous ces bouquets à Chloris qui faisaient vers ce temps l’admiration des belles compagnies.

Quand Jean Renaud de guerre revint,

Il en revint triste et chagrin ;

— Bonjour, ma mère. — Bonjour, mon fils !

Ta femme est accouchée d’un petit.

_

— Allez, ma mère, allez devant ;

Faites-moi dresser un beau lit blanc ;

Mais faites-le dresser si bas

Que ma femme n’entende pas !

_

Et quand ce fut vers la minuit,

Jean Renaud a rendu l’esprit.

Ici la scène de la ballade change et se transporte dans la chambre de l’accouchée :

— Ah ! dites, ma mère, ma mie,

Ce que j’entends pleurer ici ?

— Ma fille, ce sont les enfants

Qui se plaignent du mal de dents.

_

— Ah ! dites, ma mère, ma mie,

Ce que j’entends clouer ici ?

— Ma fille, c’est le charpentier,

Qui raccommode l’escalier !

_

— Ah ! dites, ma mère, ma mie,

Ce que j’entends chanter ici ?

— Ma fille, c’est la procession

Qui fait le tour de la maison !

_

Mais dites, ma mère, ma mie,

Pourquoi donc pleurez-vous ainsi ?

— Hélas ! je ne puis le cacher ;

C’est Jean Renaud qui est décédé.

_

— Ma mère ! dites au fossoyeux

Qu’il fasse la fosse pour deux,

Et que l’espace y soit si grand,

Qu’on y renferme aussi l’enfant !

Ceci ne le cède en rien aux plus touchantes ballades allemandes, il n’y manque qu’une certaine exécution de détail qui manquait aussi à la légende primitive de Lénore et à celle du roi des Aulnes, avant Goëthe et Burger. Mais quel parti encore un poëte eût tiré de la complainte de Saint Nicolas, que nous allons citer en partie.

Il était trois petits enfants

Qui s’en allaient glaner aux champs,

_

S’en vont au soir chez un boucher.

— Boucher, voudrais-tu nous loger ?

— Entrez, entrez, petits enfants,

Il y a de la place assurément.

_

Ils n’étaient pas sitôt entrés,

Que le boucher les a tués,

Les a coupés en petits morceaux,

Mis au saloir comme pourceaux.

_

Saint Nicolas au bout d’sept ans,

Saint Nicolas vint dans ce champ.

Il s’en alla chez le boucher :

— Boucher, voudrais-tu me loger ?

_

— Entrez, entrez, Saint Nicolas,

Il y a d’la place, il n’en manque pas.

Il n’était pas sitôt entré,

Qu’il a demandé à souper.

_

— Voulez-vous un morceau d’jambon ?

— Je n’en veux pas, il n’est pas bon.

— Voulez-vous un morceau de veau ?

— Je n’en veux pas, il n’est pas beau !

_

Du p’tit salé je veux avoir ;

Qu’il y a sept ans qu’est dans l’saloir !

Quand le boucher entendit cela,

Hors de la porte il s’enfuya.

_

— Boucher, boucher, ne t’enfuis pas,

Repens-toi, Dieu te pardonn’ra.

Saint Nicolas posa trois doigts

Dessus le bord de ce saloir :

_

Le premier dit : — J’ai bien dormi !

Le second dit : — Et moi aussi !

Et le troisième répondit :

— Je croyais être en paradis !

N’est-ce pas là une ballade d’Uhland, moins les beaux vers ? Mais il ne faut pas croire que l’exécution manque toujours à ces naïves inspirations populaires. A part les rimes incorrectes, la ballade suivante est déjà de la vraie poésie romantique et chevaleresque.

Le roi Louis est sur son pont,

Tenant sa fille en son giron ;

Elle lui demande un cavalier,

Qui n’a pas vaillant six deniers !

_

— Eh oui, mon père, je l’aurai !

Malgré ma mère qui m’a portée

Aussi malgré tous mes parens

Et vous mon père ! que j’aime tant !

_

— Ma fille, il faut changer d’amour !

Ou vous entrerez dans la tour,

— J’aime mieux mourir dans la tour,

Mon père, que de changer d’amour !

_

— Vite ! où sont mes estafiers,

Aussi bien que mes gens de pied ?

Qu’on mène ma fille à la tour,

Elle n’y verra jamais le jour !

_

Elle y d’meura sept ans passés,

Sans que personne vînt lui parler !

Au bout de la septième année,

Son père l’alla visiter.

_

— Bonjour, ma fille, comme vous en va ?

— Ma foi, mon père, ça va bien mal,

J’ai les pieds pourris dans la terre,

Et les côtés mangés des vers !

_

— Ma fille, il faut changer d’amour,

Ou vous resterez dans la tour !

— J’aime mieux rester dans la tour,

Mon père, que de changer d’amour !

Ces vers ont été composés sur un des plus beaux airs qui existent ; c’est comme un chant d’église croisé par un chant de guerre ; on n’a pas conservé la seconde partie de la ballade, dont pourtant nous connaissons vaguement le sujet. Le beau Lautrec, l’amant de cette noble fille, revient de la Palestine au moment où on la portait en terre. Il rencontre l’escorte sur le chemin de Saint-Denis. Sa colère met en fuite prêtres et archers, et le cercueil reste en son pouvoir. — Donnez-moi, dit-il à sa suite, donnez-moi mon couteau d’or fin, que je découse ce drap de lin ! Aussitôt délivrée de son linceul, la belle revient à la vie. Son amant l’enlève et l’emmène dans son château au fond des forêts. Vous croyez qu’ils vécurent heureux et que tout se termina là ; mais une fois plongé dans les douceurs de la vie conjugale, le beau Lautrec n’est plus qu’un mari vulgaire, il passe tout son temps à pêcher au bord de son lac, si bien qu’un jour sa fière épouse vient doucement derrière lui et le pousse résolument dans l’eau noire en lui criant :

Va-t-en, vilain pêche-poisson,

Quand ils seront bons

Nous en mangerons.

Propos mystérieux, digne d’Arcabonne ou de Mélusine. En expirant, le pauvre châtelain a la force de détacher ses clefs de sa ceinture et de les jeter à la fille du roi en lui disant qu’elle est désormais maîtresse et souveraine, et qu’il se trouve heureux de mourir par sa volonté !... Il y a dans cette conclusion bizarre quelque chose qui frappe involontairement l’esprit, et qui laisse douter si le poëte a voulu finir par un trait de satire, ou si cette belle morte que Lautrec a tirée du linceul n’était pas une sorte de femme vampire, comme les légendes en présentent souvent.

Du reste, les variantes et les interpolations sont fréquentes dans ces chansons, chaque province possédait une version différente. On a recueilli comme une légende du Bourbonnais, la jeune fille de la garde, qui commence ainsi :

Au château de la Garde

Il y a trois belles filles,

Il y en a une plus belle que le jour,

Hâte-toi, capitaine,

Le duc va l’épouser.

Nous l’avons entendu chanter dans le Beauvoisis dépouillé de toute cette couleur chevaleresque et locale :

Dessous le rosier blanc

La belle se promène.

Voilà le début, simple et charmant ; où cela se passe-t-il ? Peu importe ! Ce serait si l’on voulait la fille d’un sultan rêvant sous les bosquets de Schiraz. Trois cavaliers passent au clair de lune : — Montez, dit le plus jeune, sur mon beau cheval gris. N’est-ce pas là la course de Lénore, et n’y a-t-il pas une attraction fatale dans ces cavaliers inconnus !

Ils arrivent à la ville, s’arrêtent à une hôtellerie éclairée et bruyante. La pauvre fille tremble de tout son corps :

Aussitôt arrivée,

L’hôtesse la regarde.

— Êtes-vous ici par force

Ou pour votre plaisir ?

— Au jardin de mon père

Trois cavaliers m’ont pris.

Sur ce propos le souper se prépare : — Soupez la belle, et soyez heureuse ; trois capitaines vous aiment d’amour !

Mais le souper fini,

La belle tomba morte,

Elle tomba morte

Pour ne plus revenir !

Hélas ! ma mie est morte ! s’écria le plus jeune cavalier, qu’en allons-nous faire !... Et ils conviennent de la reporter au château de son père, sous le rosier blanc.

Et au bout de trois jours

La belle ressuscite.

— Ouvrez, ouvrez, mon père,

Ouvrez sans plus tarder !

Trois jours j’ai fait la morte

Pour mon honneur garder.

La vertu des filles du peuple attaquée par des seigneurs félons a fourni encore de nombreux sujets de romances. Il y a, par exemple, la fille d’un pâtissier, que son père envoie porter des gâteaux chez un galant châtelain. Celui-ci la retient jusqu’à la nuit close, et ne veut plus la laisser partir. Pressée de son déshonneur, elle feint de céder, et demande au comte son poignard pour couper une agrafe de son corset. Elle se perce le cœur, et les pâtissiers instituent une fête pour cette martyre boutiquière.

Il y a des chansons de causes célèbres qui offrent un intérêt moins romanesque, mais souvent plein de terreur et d’énergie. Imaginez un homme qui revient de la chasse et qui répond à un autre qui l’interroge :

J’ai tant tué de petits lapins blancs

Que mes souliers sont pleins de sang.

— T’en as menti, faux traître !

Je te ferai connaître.

Je vois, je vois à tes pâles couleurs

Que tu viens de tuer ma sœur.

Quelle poésie sombre en ces lignes qui sont à peine des vers ! Dans une autre, un déserteur rencontre la maréchaussée, cette terrible Némésis au chapeau bordé d’argent.

On lui a demandé

Où est votre congé ?

— Le congé que j’ai pris,

Il est sous mes souliers.

Il y a toujours une amante éplorée mêlée à ces tristes récits.

La belle s’en va trouver son capitaine,

Son colonel, et aussi son sergent...

Le refrain est une mauvaise phrase latine, sur un ton de plain-chant, qui prédit suffisamment le sort du malheureux soldat.

Nous nous arrêtons dans ces citations incomplètes, si difficiles à faire comprendre sans la musique et sans la poésie des lieux et des hasards, qui font que tel ou tel de ces chants populaires se grave ineffaçablement dans l’esprit. Ici ce sont des compagnons qui passent avec leurs longs bâtons ornés de rubans. Là des mariniers qui descendent un fleuve, des buveurs d’autrefois (ceux d’aujourd’hui ne chantent plus guère), des lavandières, des faneuses, qui jettent au vent quelques lambeaux des chants de leurs aïeules. Malheureusement on les entend répéter plus souvent aujourd’hui les romances à la mode, platement spirituelles, ou même franchement incolores, variées sur trois ou quatre thèmes éternels. Il serait à désirer que de bons poètes modernes missent à profit l’inspiration naïve de nos pères et nous rendissent, comme l’ont fait les poètes d’autres pays, une foule de petits chefs-d’œuvre qui se perdent de jour en jour avec la mémoire et la vie des bonnes gens du temps passé.

GÉRARD DE NERVAL.

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