TEXTES
1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)
1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)
1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)
1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)
15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat
6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet
6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet
20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet
12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)
11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet
13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet
16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet
29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)
28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré
15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)
1828? Faust (manuscrit autographe)
1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)
mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)
août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)
octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)
24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)
21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)
19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)
janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)
16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)
23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)
6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)
13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)
13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)
13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)
27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)
29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)
13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)
mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)
juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)
14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)
11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)
29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )
29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)
14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)
23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)
7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)
25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)
4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)
17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)
24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)
14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)
1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)
26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)
20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)
12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)
18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)
2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)
26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)
31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)
24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)
25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)
13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart
19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)
15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)
17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)
28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)
25 février 1840, Le Magnétiseur
5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)
8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)
26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)
28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)
18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin
26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)
29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)
30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)
11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)
18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)
1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)
février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)
1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)
mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)
1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)
5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc
7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)
31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé
11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)
9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas
novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens
10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)
15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)
24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)
19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)
11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)
10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)
17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)
31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)
5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)
12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)
2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)
30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)
28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)
11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)
15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)
29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)
20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)
8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)
16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)
19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet
1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)
6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)
5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)
novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)
28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)
15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)
17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)
12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)
16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)
30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)
20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)
1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)
22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)
15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)
1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins
15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)
15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)
15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)
17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)
21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)
15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)
15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)
1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)
26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)
6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)
7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)
15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)
26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)
1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)
9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)
15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)
18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)
1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)
24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)
29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)
novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)
24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale
15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)
1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)
15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)
1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)
15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)
21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)
1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)
15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)
1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)
9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)
15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)
23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)
30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)
1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)
6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)
13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)
15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)
20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)
1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)
15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)
1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier
15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)
14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas
25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche
10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)
17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)
1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)
28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud
31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)
25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire
Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968
Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975
30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)
1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)
1854? Emerance (manuscrit autographe)
1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)
janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)
1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)
6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)
3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)
15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)
15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)
1866, La Forêt noire, scénario
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BF: annonce dans la Bibliographie de la France
Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval
19 avril 1826 (BF) — Complainte sur la Mort de haut et puissant seigneur le Droit d’Aînesse, déconfit au Luxembourg, Faubourg-St-Germain, et enterré dans toute la France, en l’an de grâce 1826, accompagnée de notes, commentaires et pièces justificatives et précédée d’un préface par Cadet Roussel, et une Société de Publicistes, Jurisconsultes, et Gens de lettres, Paris, Touquet, galerie Vivienne, s.d.
La Complainte connaîtra d’autres annonces dans la BF, les 22 avril et 14 juin 1826.
La collaboration est très étroite au sein de la « boutique de scandale » de Touquet, entre Félix Bodin et Gérard, comprenez Cadet Roussel et son ami Beuglant. Nadar affirmera que deux des vingt-et-une strophes de la Complainte sont de Nerval. Ce sont sans doute les deux dernières, qui célèbrent le retrait du projet et font allusion aux fenêtres de la rue Saint-Martin, où habitaient le docteur Labrunie et son fils, illuminées de chandelles (note 24). On notera du reste l’ambiguïté de la présentation de l’auteur de la Complainte en tête de M. Dentscourt ou le cuisinier d’un grand homme : « Par Beuglant, poète, ami de Cadet Roussel, auteur de la fameuse Complainte sur la Mort du droit d’aînesse », publié le même jour que la Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut.
Gérard excelle dans le pastiche littéraire. Après le style épique parodié dans L’Enterrement de la Quotidienne de 1824, il choisit ici le style poissard, à la manière de Vadé et du théâtre populaire d’Aude et Tissot.
Voir la notice LES ANNÉES CHARLEMAGNE.
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COMPLAINTE SUR LA MORT DE HAUT ET PUISSANT SEIGNEUR LE DROIT D’AÎNESSE.
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Avis de l’éditeur.
Cette Complainte étant la seule véritable, nous prévenons le public qu’il ne doit pas en acheter d’autres, de même qu’il ne saurait trop prendre de celle-ci.
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PRÉFACE.
Je puis dire, sans m’en faire accroire, que je suis un particulier très-connu depuis long-temps ; et un chacun sait que je suis bon enfant. Or donc ainsi comme ça, je n’irai pas par quatre chemins ; et je n’ai pas besoin de faire des phrases et des péroraisons préparatoires pour entrer en matière
Quoique je sois cadet et puîné, dans ma position, je peux bien ne guère aimer le droit d’aînesse ; et du moment que ça est venu sur le tapis, je me suis levé contre avec impartialité. Je me suis dit à l’instant ce beau vers de Molière ou de J.-J. Rousseau, dans une tragédie que je pourrais prendre pour épigramme au bas de mon intitulé :
Un frère est un ami que nous donne la nature.
Et je me suis écrié : Quoi ! on va en faire un ennemi légitime, en donnant à l’un des avantages spécieux ou particuliers que les autres n’auraient pas d’après les indispositions d’un projet de loi qui établirait le préciput et la primogéniture comme dans l’ancien régime présenté par M. le garde des sceaux à la chambre des Pairs de France !
Non, cela ne vaut rien pour le moment actuel ; et ça ne passera pas, me suis-je dit à moi-même, comme une lettre à la poste.
J’avais eu le nez bon, comme l’a prouvé le résultat de l’issue et de l’événement de la dissertation de MM. les Pairs, que Dieu bénisse pour le bien qu’ils nous ont fait ! Et tout d’abord je me suis mis à mettre dessus cet objet des rimes bout à bout, ce qui est pour moi un grand amusement. J’ai traité les personnages qui ont joué un rôle dans toute cette bagarre avec le respect que je dois dans ma position à des supérieurs, enfin à un quelqu’un élevé au-dessus de ma petite hémisphère et qui touche sur le budget de forts appointemens, pendant que moi je paie dans l’obscurité mes impositions directes et indirectes.
Mais est-il exigeant que je fasse la profession de foi de mes principes et de mes sentimens que je partage ? Hé bien ! je ne demande pas mieux ; et je peux la crier tout haut, avec l’assurance d’un bon citoyen et d’une conscience pure.
Je suis attaché à la Charte et aux institutions, autant que je pourrais l’être au gouvernement représentatif.
J’aime le Roi pour sa bonté et sa loyauté, et parce qu’il a juré de faire notre bonheur avec la Charte, et qu’il a dit en montant sur le trône, point de hallebardes ! et qu’il a renvoyé toutes les censures qui ôtaient de dessus les journaux tout ce qu’il y avait de solide contre les abus et les Jésuites, et qui empêchaient qu’on ne dise du bien de Henri IV et de son petit-fils monseigneur le Dauphin.
Maintenant, je dirai sans détour que, suivant ma façon de penser (quoique je puis me tromper), les ministres qui composent le ministère dans le temps actuel, ne remplissent point les bonnes intentions du Roi Sa Majesté. Seulement, quand je viens à songer à part moi qu’ils aident à faire mourir tous ces malheureux et braves Grecs qui se battent comme des lions, en favorisant les farouches Égyptiens de la Turquie et du pays des Ottomans de Mahomet, qui ne sont pas chrétiens comme nous qui sommes catholiques, cela me fait bouillir d’indignation.
Tout le monde connaît l’humeur naturelle de mon petit chien, qui est, ainsi qu’ils disent, comme le chien de Jean de Nivelles. Si d’aucuns particuliers qui brouillent journellement toutes les affaires du royaume et qui s’y entendent joliment, étaient de ce caractère-là, foi de Cadet Roussel, je les appellerais de toutes mes forces.
Enfin, pour finir par une conclusion finale comme j’ai commencé, je peux me vanter que je suis Français, et j’ai voulu faire voir aussi que je suis un peu troubadour.
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COMPLAINTE SUR LA MORT DU DROIT D’AÎNESSE.
Sur la même air que toutes les plus fameuses complaintes.
I.
L’an huit cent vingt-six et mille,
Dans le temps du jubilé,
Par Montrouge (1) un peu stylé
Et se croyant fort habile,
Monsieur le garde des sceaux (2)
Un jour nous prit pour des sots
II.
Contre le droit de nature (3),
En trop zélé factotum,
Il se charge d’un factum
Pour la primogéniture (4) :
Aussitôt, de toute part,
Le canon d’alarme part.
III.
Tout partout on se tourmente
Au sujet des fils puînés (5);
Les pères et les aînés,
Les mères qu’on violente
Dedans leurs affections,
Signent des pétitions (6).
IV.
Les cadets font pacotilles
De certain légume sec (7),
Afin de troquer avec
Les amateurs de lentilles,
Pour ce droit que d’Esaü,
On sait que Jacob a eu (8).
V.
En vain l’on leur fit un crime
De se plaindre et de grogner,
Lorsqu’on voulait leur rogner
La portion légitime (9) :
Tout le monde bien gaîment
Prépara son testament.
VI.
Des sceaux l’agréable garde,
Sa Grandeur de Peyronnet,
Vint nous déclarer tout net
Que cela ne nous regarde,
Et qu’on est mieux avisé
Quand on est civilisé (10).
VII.
Il faut être des sauvages,
A-t-il dit à haute voix,
Il faut être homme des bois,
Pour tenir à nos partages :
Voir dans son frère un égal
Est d’un naturel brutal (11).
VIII.
Sans plus de pitié qu’Hérode
Pour les cadets innocens,
Il les attaque en tout sens ;
En lambeaux il met le Code ;
Puis il traite Montesquieu (12),
Ainsi qu’un petit monsieu.
IX.
Un procureur de Bretagne,
Qui n’est pas La Chalotais (13),
Vint plaider, comme au palais,
Tout en battant la campagne :
Il dégoisa tant qu’il put
En faveur du préciput (14).
X.
Le ministre de la guerre
Vint prendre part au combat ;
Pour terminer le débat
Avec sa voix de tonnerre,
Comme un terrible Attila (15)
Il vint mettre le holà.
XI.
Ce dernier (on nous l’assure),
D’un ton de voix solennel,
Dit que le droit naturel
Est écrit dans la nature (16) :
Nul ne contesta ce point,
Et l’on ne réclama point.
XII.
L’ancien chanoine d’Auxerre,
Vidame de Chastellux,
Dit : « Messeigneurs, fiat lux
« Dans cette obscure matière ;
« Car, quoique j’en parle bien,
« Ma foi, je n’y comprends rien. »
XIII.
Puis un autre dit en somme :
« Je veux parler un moment ;
« Il est clair, mon argument ;
« Je l’explique, et voici comme :
« L’aîné prendra tout le bien,
« Et les autres n’auront rien. » (17)
XIV.
On avait bien raison d’être
Peu content de ce bagoût :
Tout le monde n’a pas goût
A se faire moine ou prêtre,
Et les filles, bien souvent,
N’aiment guère le couvent.
XV.
Dessus la première article,
Quand on eut dit son latin,
On vota par le scrutin,
Et la chambre dit : BERNICLE.
Du moment que ça se fit,
Le projet fut déconfit.
XVI.
Tous les pétitionnaires,
Que monsieur de Saint-Chamans
Traita, sans ménagemens,
En révolutionnaires (18) ;
Les bons Pairs, pendant ce temps,
Les traitaient en bons enfans.
XVII.
Aussi, monsieur de Chabrole (19)
Déblatérait de son mieux
Contre tous les factieux (20),
Et cela paraissait drôle.
Mais dans sa famille assez
Les cadets sont bien placés.
XVIII.
Au milieu de la séance
De messieurs les Députés (21),
Sortit, d’un air dépité,
Le ministre de finance ;
On vit son nez s’allonger :
Ce qui fit beaucoup songer.
XIX.
Raviver le droit d’aînesse,
Quant nous sommes tous contens
Qu’il soit mort depuis trente ans (22),
C’est n’avoir pas trop d’adresse :
Ceux qui font de tels projets
Ne sont pas de fiers cadets.
XX.
Tout Paris dans l’allégresse (23)
Veut enterrer le défunt ;
Pour lors on voit un chacun
Illuminer sa fenêtre (24) :
On prend les pétitions,
Pour allumer les lampions.
XXI.
Ce grand jour, où l’on tint ferme
Pour notre Charte en péril,
Est le huitième d’avril ;
C’est juste le jour du terme
Pour les emménagemens
Et les déménagemens.
(1) Montrouge est un joli endroit proche de la barrière d’Enfer, où ce que les Jésuites ont mis leur quartier-général.
(2) C’est le ministre de la justice sur qui roulent les tribunaux, comme qui dirait qu’il tient la balance et qu’il pèse.
(3) Le droit de nature est, selon que disent d’aucuns auteurs, écrit dans le droit naturel. Toutefois, cette opinion n’est pas adoptée par le général des savans, puisqu’il y en a d’aucuns qui avancent que c’est le droit naturel qui est écrit dans la nature.
(4) La primogéniture, c’est comme quoi on est né le premier : c’est ce qui fait qu’on est l’aîné. Ainsi, par exemple, moi, j’aurais un frère jumeau, qui est né le second, eh bien ! pour lors, je serais le cadet.
(5) Les puînés sont des cadets, par raison que les cadets sont des puînés.
(6) Les pétitions sont la voie par quoi un chacun citoyen peut faire connaître ses griefs : c’est le plus beau droit que la Charte donne aux Français. Ainsi, une supposition : vous avez une idée, ou vous vous plaignez d’une vexation injuste d’un factionnaire responsable. Hé bien ! vous couchez par écrit votre pétition. Après un certain temps, on la renvoie au bureau des renseignemens, ou on la met à l’ordre du jour. Pour lors, vous avez obtenu justice.
(7) Je sais bien qu’il fallait sèche ; mais j’ai cru devoir mettre, pour que ça rime, sec.
(8) Voyez l’extrait de la Genèse, ci-après, p. 38 et suiv.
(9) Il est probable que l’auteur veut faire allusion aux pétitions (Note de l’Editeur.)
(10) Voyez la note du couplet en face.
(11) « Les sentimens que vous invoquez sont naturels, sans doute, mais seulement dans l’état sauvage et grossier d’une nature ignorante et brutale. Ils sont naturels au milieu des bois. Ceux que j’invoque, au contraire, sont les sentimens naturels de l’homme moral, de l’homme cultivé et poli. » (Discours de M. Peyronnet, séance de la Chambre des Pairs, 29 mars. MONITEUR.)
(12) Défunt M. le président de Montesquieu était un malin qui a écrit sur les lois, et qui était plus fort que bien des ministres des plus huppés. En revanche, il y a des ministres qui détachent mieux la poésie que Montesquieu, selon ce que m’a dit mon propriétaire qui a lu les vers cités par le Mercure du XIXe siècle.
(13) Feu M. de La Chalotais, que les Jésuites firent mettre en prison, et auquel ils n’ont point pardonné cela. C’est le même qui vient d’être défendu solidement par M. Bernard, célèbre avocat au barreau de Rennes, où M. le comte de Corbière, au jour d’aujourd’hui ministre de l’intérieur, s’est fameusement distingué comme procureur.
(14) Séance de la Chambre des Pairs, 31 mars 1826.
(15) J’ai trouvé sur le Dictionnaire de l’Histoire, que ce tyran guerrier était un Hun ; cet Hun n’était pas cet autre qui fut appelé d’abord le Fils chéri de l’Église, et puis après le Fléau de Dieu, et qui fit de son frère Joseph le tyran illégitime de l’Espagne.
(16) « Le droit naturel de l’homme (tel qu’on doit l’entendre), n’est et ne peut être autre chose que le droit de l’homme dans l’état de nature….. Or, ce droit cesse évidemment là où l’état de société commence ; et comme il est naturel à l’homme de vivre en société, il en résulte que l’état de société est l’état naturel de l’homme ; et par conséquent les droits qui résultent de l’état et de la nature de la société, sont les véritables droits naturels. » (Discours de M. de Clermont-Tonnerre à la Chambre des Pairs, séance du 5 avril 1826.)
(17) Coutume du royaume d’Yvetot, au pays de Sapience.
(18) Séance de la Chambre des Députés, 8 avril 1826.
(19) Je me suis permis, par licence, de mettre un e au bout du nom de M. le comte de Chabrole de Crouzol, ministre de la marine, et particulier très-connu dans les montagnes d’Auvergne (Note de l’auteur.)
(20) Séance de la Chambre des Pairs, 1er avril 1826.
(21) 8 avril 1826.
(22) 1790 et 1791.
(23) L’auteur avait écrit d’abord dans le bien être ; puis il a mis dans l’allégresse, voulant apparemment un terme plus énergique. Quoiqu’il soit un peu hasardé de faire rimer allégresse avec fenêtre, nous avons conservé cette version pour la rareté du fait et par respect pour le texte (Note de l’éditeur.)
(24) Je suis bien aise moi-même que l’histoire sache que j’avais mis trois chandelles sur mes cinq croisées, dans la rue Saint-Martin, quoiqu’elles soient un peu élevées au-dessus du pavé. Mais je veux conter, à propos d’illumination, comme il y en a d’aucuns qui font un drôle de pataquès, quand une personne n’a pas été éduquée à lire sur les livres et qui ne savent pas le dictionnaire.
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