TEXTES

1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)

1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)

1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)

1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)

15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat

19, 22 avril, 14 juin (BF), Complainte sur la mort de haut et puissant seigneur le Droit d’aînesse, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet

20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet

12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)

11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet

13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet

16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet

29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)

28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré

15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)

1828? Faust (manuscrit autographe)

1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)

mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)

août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)

octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)

24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)

14 novembre 1829, Les Bienfaits de l’enseignement mutuel, Procès verbal de la Loge des Sept-Écossais-réunis, chez Bellemain

21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)

12 décembre 1829, La Mort du Juif errant. Rapsodie lyrique de Schubart (Mercure de France au XIXe siècle)

19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)

2 janvier 1830, La Première nuit du Sabbat. Morceau lyrique de Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)

16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)

23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)

13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)

13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)

13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)

27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)

10 avril 1830, Le Dieu et la bayadère, nouvelle indienne par Goëthe (Mercure de France au XIXe siècle)

29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)

13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)

mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)

17 juillet 1830, L’Éclipse de lune. Épisode fantastique par Jean-Paul Richter (Mercure de France au XIXe siècle)

juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)

14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)

30 octobre 1830 (BF), Choix de poésies de Ronsard, Dubellay, Baïf, Belleau, Dubartas, Chassignet, Desportes, Régnier (Bibliothèque choisie)

11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)

29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )

29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)

14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)

23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)

30 avril 1831, Le Bonheur de la maison par Jean-Paul Richter. Maria. Fragment (Mercure de France au XIXe siècle)

7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)

25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)

17 et 24 septembre 1831, Les Aventures de la nuit de Saint-Sylvestre. Conte inédit d’Hoffmann (Mercure de France au XIXe siècle)

4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)

17 décembre 1831, Odelettes. La Malade, Le Soleil et la Gloire, Le Réveil en voiture, Le Relais, Une Allée du Luxembourg, Notre-Dame-de-Paris (Almanach des muses)

17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)

24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)

14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)

1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)

26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)

20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)

12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)

18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)

2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)

26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)

31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)

24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)

25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)

13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart

19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)

15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)

17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)

21 et 28 septembre 1839, Lettre VI, A Madame Martin (Lettres aux belles femmes de Paris et de la province)

28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)

25 février 1840, Le Magnétiseur

5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)

8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)

26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)

28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)

18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin

26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)

29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)

30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)

11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)

18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)

1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)

février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)

1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)

mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)

1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)

5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc

7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)

31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé

11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)

9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas

novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens

10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)

15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)

24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)

19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)

11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)

10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)

17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)

31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)

5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)

12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)

2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)

30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)

28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)

11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)

15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)

29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)

20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)

8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)

16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)

19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet

1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)

6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)

5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)

novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)

28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)

15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)

17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)

1er juillet 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Les Esclaves (Revue des Deux Mondes)

12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)

16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)

30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)

15 septembre 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Le Harem (Revue des Deux Mondes)

20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)

1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)

22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)

15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)

1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins

15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)

15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)

15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)

17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)

21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)

15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)

15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)

7 janvier-24 juin 1849, puis 2 septembre 1849-27 janvier 1850, Al-Kahira. Souvenirs d’Orient (La Silhouette)

1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)

26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)

6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)

3 novembre 1849 (BF), Le Diable vert, et Impression de voyage (Almanach satirique, chez Aubert, Martinon et Dumineray)

7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)

15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)

26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)

1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)

9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)

15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)

18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)

1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)

24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)

29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)

novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)

24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale

15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)

1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)

15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)

1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)

15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)

21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)

1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)

15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)

1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)

9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)

15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)

23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)

30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)

1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)

6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)

13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)

15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)

20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)

1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)

15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)

1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier

15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)

14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas

25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche

10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)

17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)

1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)

28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud

31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)

25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire

Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968

Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975

30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)

1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)

1854? Emerance (manuscrit autographe)

1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)

janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)

1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)

6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)

3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)

15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)

15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)

1866, La Forêt noire, scénario

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BF: annonce dans la Bibliographie de la France

Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval

2 octobre 1838 — La ville de Strasbourg. A M.B******, deuxième lettre de voyage publiée dans Le Messager des chambres, signée G.D.

Cette deuxième « lettre » adressée à Achille Brindeau sera reprise dans L’Artiste-Revue de Paris le 5 octobre 1845 sous le titre : Voyages — Strasbourg, signée Gérard de Nerval, puis en volume en 1852 dans Lorely. Souvenirs d’Allemagne, « Sensations d’un voyageur enthousiaste, I. — Du Rhin au Mein, I. Strasbourg »

Plus que la ville de Strasbourg, c'est le passage du Rhin qui enthousiasme Nerval, car de l'autre côté se trouve l'Allemagne, la terre mère qu'il désigne, à la manière des illuministes allemands, par le nom de « Teutonia ! »

Voir la notice LE VOYAGE EN ALLEMAGNE DE 1838.

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LA VILLE DE STRASBOURG. À M. B*******

Vous comprenez que la première idée du Parisien qui descend de voiture à Strasbourg est de demander à voir le Rhin ; il s’informe, il se hâte, il fredonne avec ardeur le refrain semi-germanique d’Alphonse Karr : « Au Rhin ! au Rhin ! c’est là que sont nos vignes ! » Mais bientôt il apprend avec stupeur que le Rhin est encore à une lieue de la ville. Quoi ? le Rhin ne baigne pas les murs de Strasbourg, le pied de sa vieille cathédrale ?... Hélas ! non ! Le Rhin à Strasbourg et la mer à Bordeaux sont deux grandes erreurs du Parisien sédentaire. Mais, tout moulu qu’on est du voyage, le moyen de rester une heure à Strasbourg sans avoir vu le Rhin ! Alors, on traverse la moitié de la ville, et l’on s’aperçoit à peine que son pavé de cailloux est plus rude et plus raboteux encore que l’inégal pavé du Mans, qui cahotait si durement la charrette du roman comique. On marche long-temps encore à travers les diverses fortifications, puis on suit une chaussée d’une demi-lieue, et quand on a vu disparaître enfin derrière soi la ville tout entière, qui n’est plus indiquée à l’horizon que par le doigt de pierre de son clocher, quand on a traversé un premier bras du Rhin, large comme la Seine, et une île verte de peupliers et de bouleaux, alors on voit couler à ses pieds le grand fleuve, rapide et frémissant, et portant dans ses lames grisâtres une tempête éternelle. Mais de l’autre côté, là-bas à l’horizon, au bout d’un pont mouvant de soixante bateaux, savez-vous ce qu’il y a ?... Messieurs, il y a l’Allemagne ! la terre de Goëthe et de Schiller, le pays d’Hoffmann ! la vieille Allemagne, notre mère à tous !... Teutonia !

N’y a-t-il pas de quoi hésiter avant de poser le pied sur ce pont qui serpente, et dont chaque barque est un anneau ; l’Allemagne au bout ! et voilà encore une illusion, encore un rêve, encore une vision lumineuse qui va disparaître sans retour de ce bel univers magique que nous avait créé la poésie ! Là, tout se trouvait réuni, et tout plus beau, tout plus grand, plus riche et plus vrai peut-être que les œuvres de la nature et de l’art. Le Microcosmus du docteur Faust nous apparaît à tous au sortir du berceau ; mais à chaque pas que nous faisons dans le monde réel, ce monde fantastique perd un de ses astres, une de ses couleurs, une de ses régions fabuleuses. Ainsi, pour moi, déjà la Flandre, l’Espagne et l’Italie se sont réalisées, et le souvenir qu’elles m’ont laissé est loin d’égaler les splendeurs du rêve qu’elles m’ont fait perdre. Mais qui pourrait se retenir pourtant de briser encore une de ces portes enchantées, derrière lesquelles il n’y a souvent qu’une prosaïque nature, un horizon décoloré ? N’imagine-t-on pas, quand on va passer la frontière d’un pays, qu’il va tout à coup éclater devant vous dans toute la splendeur de son sol, de ses arts et de son génie ? Il n’en est pas ainsi, et chaque nation ne se découvre à l’étranger qu’avec lenteur et réserve, laissant tomber ses voiles un à un comme une pudique épousée.

Tout en songeant à cela, nous avons traversé le Rhin ; et nous voici sur le rivage et sur la frontière germanique. Rien ne change encore ; nous avons laissé des douaniers là-bas, et nous en retrouvons ici ; seulement ceux de France parlaient allemand, ceux de Bade parlent français ; c’est naturel. Kehl est aussi une petite ville toute française, comme toutes les villes étrangères qui avoisinent nos frontières. Si nous voulons observer une ville allemande, retournons à Strasbourg.

Aussi bien il n’existe à Kehl que des débitans de tabac. Vous avez là du tabac de tous les pays, et même du tabac français vrai régie, façon de Paris, passé en contrebande sans doute, et beaucoup meilleur que tous les autres ; les étiquettes sont très variées et très séduisantes, mais les boîtes ne recèlent que de ce même caporal, autrement nommé chiffonnier. Il n’y a donc point de contrebande à faire, et il faut bien repasser, pur de tout crime, devant les douanes des deux pays. Mais, pour votre retour, les douaniers vous demandent deux kreutzers (prononcez : kretch) ; vous donnez deux sous, et l’on vous rend une charmante petite médaille ornée du portrait du grand-duc de Bade, et représentant la valeur d’un kreutzer. Vous avez donc fait une première fois connaissance avec la monnaie allemande ; puissiez-vous vous en tenir là !

La seconde idée du Parisien, après avoir vu le Rhin et foulé la terre allemande, se formule tout d’abord devant ses yeux quand il se retourne vers la France, car les rocs dentelés du clocher de Strasbourg, comme dit Victor Hugo, n’ont pas un instant quitté l’horizon. Seulement les jambes du voyageur frémissent quand il songe qu’il y a bien une lieue à faire en ligne horizontale, mais que du pied de l’église il aura presque une lieue encore en ligne perpendiculaire. À l’aspect d’un clocher pareil, on peut dire que Strasbourg est une ville plus haute que large ; en revanche, ce clocher est le seul qui s’élance de l’uniforme dentelure des toits ; nul autre édifice n’ose même monter plus haut que le premier étage de la cathédrale, dont le vaisseau, surmonté de son mât sublime, semble flotter paisiblement sur une mer peu agitée.

En rentrant dans la ville, on traverse la citadelle aux portes sculptées, où luit encore le soleil de Louis XIV, nec pluribus impar ; la place contient un village complet, à moitié militaire et à moitié civil. Dans Strasbourg, après avoir passé la seconde porte, on suit long-temps les grilles de l’arsenal, qui déploie une ostentation de canons vraiment formidable pour l’étranger qui entre en France ; il y a là peut-être six cents pièces de toutes dimensions, écurées comme des chaudrons, et des amas de boulets à paver toute la ville. Mais hâtons-nous vers la cathédrale, car le jour commence à baisser.

Vous savez, mon ami, que je vous ai promis une tournée de flaneur et non des descriptions régulières. Pardonnez-moi de rendre compte de Strasbourg comme d’un vaudeville ; je n’ai ici nulle mission artistique et littéraire, je n’inspecte pas les monumens, je n’étudie aucun système pénitentiaire, je ne me livre à aucune considération d’histoire ni de statistique, et je regrette seulement de n’être pas arrivé à Strasbourg dans la saison du jambon, de la sauercraüt et du foie gras. Quant à la bière de Strasbourg, elle est jugée : partout où l’eau est mauvaise, la bière est mauvaise ; et l’eau de Strasbourg n’est bonne qu’à faire débiter son vin.

Je me refuse donc à toute description de la cathédrale, vous en connaissez les gravures, et quant à moi, jamais un monument dont je connais la gravure ne me surprend à voir ; mais ce que la gravure ne peut rendre, c’est la couleur étrange de cet édifice, bâti de cette pierre rouge et dure dont sont faites toutes les maisons de l’Alsace ; en vieillissant, cette pierre prend une teinte noirâtre, qui domine aujourd’hui dans toutes les parties saillantes et découpées de la cathédrale.

Je ne vous dirai ni l’âge ni la taille de cette église, c’est ce que vous trouverez dans tous les itinéraires possibles. Mais j’ai vu le clocher de Rouen, et celui d’Anvers avant celui de Strasbourg, et je trouve sans préférence que ce sont là trois beaux clochers. Que dis-je ? celui de la cathédrale de Rouen n’est qu’une flèche ; encore est-elle démolie, et figurée seulement aujourd’hui en fer creux ; le parallèle ne peut donc s’établir qu’avec le clocher d’Anvers. Ce dernier est d’un gothique plus grandiose, plus hardi, plus efflorescent. On distingue dans le clocher de Strasbourg une minutie de détails fatigante ; toutes ces aiguilles et ces dentelures régulières semblent appartenir à une cristallisation gigantesque ; quatre escaliers déroulent leurs banderolles le long du cône principal, et l’ascension dans cette cage de pierre, dont les rampes, les arêtes et les découpures à jour n’ont guère en général que la grosseur du bras ont une certaine hardiesse que tous les clochers n’ont pas. Pourtant la pierre est dure comme du fer, et l’escalier de la plus haute flèche ne tremble pas, comme celui d’Anvers, où les pierres mal scellées font jouer leurs crampons de fer d’une manière inquiétante.

De la dernière plate-forme, le panorama qui se déroule est fort beau : d’un côté les Vosges, de l’autre les montagnes de la Forêt-Noire, les unes et autres boisées de chênes et de pins. Au milieu le Rhin dans un cours de vingt lieues ; les premières masses touffues de la forêt des Ardennes, et puis un damier de plaines les plus vertes et les plus fraîches du monde, où serpente l’Ille, petite rivière qui traverse deux fois Strasbourg. A vos pieds, la ville répand inégalement ses masses de maisons dans l’enceinte régulière de ses fossés et de ses murs. L’aspect est monotone et ne rappelle nullement les villes de Flandre, dont les maisons peintes, sculptées et quelquefois dorées, dentèlent l’horizon avec une fantaisie toute orientale ; les grands carrés des casernes, des arsenaux et des places principales, jettent seuls un peu de variété dans ces fouillis de toits revêtus d’une brique terreuse et troués presque tous de trois ou quatre étages de lucarnes. On ne rencontre d’ailleurs aucune ville remarquable sur cette immense étendue de pays ; mais comme il y a dans les belveders quelque chose que l’on n’aperçoit jamais que quand le temps est très pur, le Cicérone prétend qu’on peut voir à de certains beaux jours le vieux château de Baden sur sa montagne de pins.

A Fourvières de même, on prétend qu’il est possible de distinguer les Alpes ; à Anvers, Rotterdam ; au phare d’Ostende, les côtes d’Angleterre. Tout cela n’est rien : à Rome, on vous jure que vous pourrez, du haut de la boule d’or de Saint-Pierre, voir à l’horizon les deux mers qui baignent les états romains ; il y a partout des nuages complaisans qui se prêtent d’ailleurs à de pareilles illusions.

Tout l’extérieur de l’église est restauré avec un soin extrême ; chaque statue est à sa place ; pas une arête n’est ébréchée, pas une côte n’est rompue ; les deux portes latérales sont des chefs-d’œuvre de sculpture et d’architecture ; l’une est mauresque, l’autre est byzantine, et chacune est bien préférable à l’immense façade, plus imposante par sa masse, qu’originale par les détails. Quant à l’intérieur, le badigeon y règne avec ferveur, comme vous pensez bien ; tout clergé possible tenant à habiter avant tout une église bien propre et bien claire. Les vitraux sont en général réparés selon ce principe, et répandent çà et là de grandes plaques de clarté qui sont les marques de cette intelligente restauration ; le dix-huitième siècle n’avait pas fait moins en faisant disparaître l’abside gothique sous une décoration en style Pompadour, que l’on doit, ainsi que les bâtimens de l’archevêché, au cardinal de Rohan.

Mais j’ai promis de ne point décrire, et je vais me replonger en liberté dans les rues tortueuses de la ville. Le premier aspect en est assez triste, puis on s’y accoutume, et l’on découvre des points de vue charmans à certaines heures du jour. Les quais de l’Ille, surtout, en fournissent de fort agréables. L’Ille, avec ses eaux vertes et calmes, embarrassée partout de ponts, de moulins, de charpentes soutenant des maisons qui surplombent, ressemble, en ces beaux jours d’été, à cette partie du Tibre qui traverse les plus pauvres quartiers de Rome. Le faubourg de Saverne fait surtout l’effet du quartier des Transtevères. Pour si haute que soit ma comparaison, je sais qu’elle n’est pas l’éloge de l’administration municipale. Mais pourquoi le cacher ? Strasbourg est une ville mal tenue ; elle a, dans ce sens même, un parfum de moyen-âge beaucoup trop prononcé. Le marché à la Viande a été reconstruit et assaini depuis quelques années ; la Viande se recommanderait à la plume de Théophile Gautier : derrière ses baraques règnent encore de vastes espaces pleins de mares et de gravois, où les animaux indépendans trouvent à vivre sans rien faire. Près de là, il y a toute une rue de Juifs, comme au moyen-âge ; puis les plus infâmes complications de ruelles, de passages, d’impasses, serpentent, fourmillent, croupissent, dans l’espace contenu entre la place d’Armes et le quai des Tanneurs, qui est une rue. Du reste, en accusant la ville de sa négligence à l’égard de tout ce quartier, nous devons dire qu’elle apporte des soins particuliers à l’embellissement des rues qui avoisinent la résidence des autorités : la place d’Armes est fort belle, et l’on s’y promène entre deux allées d’orangers. La rue Brûlée, où siège le gouvernement, ne manque que de largeur, et la rue du Dôme est devenue la rue Vivienne de Strasbourg. A l’heure qu’il est, on la pave en asphalte, et ses trottoirs, déjà terminés, portent partout la signature ineffaçable de la société Lobsann. Le bitume envahit peu à peu Strasbourg, et ce n’est pas malheureux, vu l’imperfection du pavage actuel ; dans une ville pavée en cailloux, le bitume est roi : on demande de l’élastique-Polonceau, on accepterait du Guibert ! Toutefois, les dames prétendent ici que la boue qu’on emporte d’un pavé de bitume tache les vêtemens d’une manière ineffaçable ; en revanche, elle est excellente pour marquer le linge. N’y a-t-il pas là matière à quelque spéculation ?

Si vous êtes déjà las de la ville, je ne le suis pas moins que vous ; nous n’y laissons plus rien de remarquable que le tombeau du maréchal de Saxe, énorme catafalque de marbre noir et blanc, sculpté par Pigale [sic] et d’un goût rococo remarquable, bien que présentant de belles parties de sculpture. Le héros, fièrement cambré dans son armure et dans ses draperies, produit exactement l’effet du commandeur de don Juan. J’ai été tenté de l’inviter à souper.

Pour sortir de Strasbourg et se rendre aux promenades publiques, il faut traverser de nouveau l’Ille, qui coule de ce côté entre le théâtre et les remparts. Depuis qu’il est question de bateaux à vapeur devant naviguer de Strasbourg à Bâle par le canal intérieur, la ville a dû faire couper la plupart des ponts pour les rendre mobiles. Alors ses architectes y ont construit des ponts-levis qui, selon l’expression du Courrier de Strasbourg, rappellent l’enfance de la mécanique : imaginez un énorme cadre en charpente, équivalant juste à la pesanteur du pont et suspendu sur la tête du promeneur ; l’idée de ce système doit dater des premières invasions des Saxons ; depuis l’obélisque et M. Lebas, la mécanique n’ayant plus de progrès à faire, elle remonte à son origine.

Quand on a traversé les fossés, les tranchées, les bastions, partout revêtus de verdure, on trouve une charmante promenade, des allées silencieuses, une rivière où traîne mollement le feuillage des saules. A droite et à gauche, ce sont des jardins publics, les Tivoli et les Beaujon de l’endroit ; au jardin Lips, on donne tous les dimanches des bals et des feux d’artifice ; sa décoration serait pour nous un peu passée ; des temples de l’amour, des ermitages, des rochers à cascades dans le goût bourgeois des pendules et des assiettes montées ; puis un moulin d’eau et un pont en fil de fer qui conduit dans un îlot. Tout cela devient fort brillant et fort animé le dimanche, ce qui me conduit à vous parler de la population.

Il faut bien l’avouer, on parle moins français à Strasbourg, qu’à Florence ou à Rome, et de plus mauvais français, quand on le parle. Il est difficile de se faire comprendre des gens du peuple, et nous en sommes à nous demander ce qu’apprennent les enfans aux écoles mutuelles qu’on dit si fréquentées dans ce département. Peut-être savent-ils le latin. Cependant il y a peu d’allemands réels à Strasbourg, et cette ville a donné des preuves de patriotisme incontestables. Pourquoi donc ne se fait-elle pas un point d’honneur de parler sa langue maternelle ? Le type allemand se retrouve, sans être absolu pourtant, dans les traits gracieux des dames de la société. Leur tournure n’a rien de provincial, et elles se mettent fort bien. Nous ne pouvons faire le même éloge des hommes, qui manquent, en général, d’élégance dans les manières et de distinction dans les traits. La garnison a beau jeu près des dames, si les dames ne sont pas, comme leur ville : imprenables. On ne rencontre plus à Strasbourg ces vêtemens pittoresques des paysans de l’Alsace qui nous ont étonné le long de la route ; mais un grand nombre de femmes du peuple portent, le dimanche, des ajustemens très brillants et très variés. Les uns se rapprochent du costume suisse, les autres même du costume napolitain. Des broderies d’or et d’argent éclatent surtout sur la tête et sur la poitrine ; l’harmonie et la vivacité des couleurs, la bizarrerie de la coupe, rendraient ces costumes dignes de l’Opéra ; recommandez-les, je vous prie, à M. Duponchel.

C’est dans les brasseries, le dimanche, qu’il faut observer la partie la plus grouillante de la population ; là, point de sergens de ville, le municipal y est fabuleux ; le cancan et le demi-cancan trahissent l’étranger timide ; mais la chahut règne en maîtresse au militaire et au civil ; les tourlourous s’y rendent fort agréables ; les canonniers sont d’une force supérieure, et les femmes en remontreraient aux Espagnoles et aux Bayadères pour la grâce et la liberté des mouvemens. Il existe pourtant des brasseries qui se rapprochent davantage de nos cafés ; mais la musique y élit domicile, soit que l’on danse ou non. Strasbourg est parcouru à toute heure par des bandes de violons, qui viennent même accompagner les repas de tables d’hôte (on dîne de midi à 1 heure). A peine êtes-vous admis à consommer une soupe aux boulettes ou un bouilli aux betteraves, que vous voyez six individus qui viennent s’asseoir derrière vous, à une table ronde où ils étalent leur partition, et se mettent à exécuter avec verve une ouverture, une valse, ou même une symphonie. La musique doit s’ajouter à tous les assaisonnemens bizarres dont s’accompagne forcément la cuisine allemande, qui est encore aujourd’hui la cuisine de Strasbourg.

Maintenant connaissez-vous assez Strasbourg, et voulez-vous connaître Bade ? Nous partirons quand vous voudrez.

G.D.

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