TEXTES
1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)
1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)
1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)
1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)
15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat
6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet
6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet
20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet
12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)
11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet
13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet
16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet
29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)
28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré
15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)
1828? Faust (manuscrit autographe)
1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)
mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)
août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)
octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)
24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)
21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)
19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)
janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)
16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)
23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)
6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)
13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)
13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)
13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)
27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)
29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)
13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)
mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)
juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)
14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)
11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)
29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )
29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)
14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)
23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)
7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)
25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)
4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)
17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)
24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)
14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)
1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)
26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)
20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)
12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)
18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)
2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)
26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)
31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)
24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)
25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)
13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart
19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)
15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)
17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)
28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)
25 février 1840, Le Magnétiseur
5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)
8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)
26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)
28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)
18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin
26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)
29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)
30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)
11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)
18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)
1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)
février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)
1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)
mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)
1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)
5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc
7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)
31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé
11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)
9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas
novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens
10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)
15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)
24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)
19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)
11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)
10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)
17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)
31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)
5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)
12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)
2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)
30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)
28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)
11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)
15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)
29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)
20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)
8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)
16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)
19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet
1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)
6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)
5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)
novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)
28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)
15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)
17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)
12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)
16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)
30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)
20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)
1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)
22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)
15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)
1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins
15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)
15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)
15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)
17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)
21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)
15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)
15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)
1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)
26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)
6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)
7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)
15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)
26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)
1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)
9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)
15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)
18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)
1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)
24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)
29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)
novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)
24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale
15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)
1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)
15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)
1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)
15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)
21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)
1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)
15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)
1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)
9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)
15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)
23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)
30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)
1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)
6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)
13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)
15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)
20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)
1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)
15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)
1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier
15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)
14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas
25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche
10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)
17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)
1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)
28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud
31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)
25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire
Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968
Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975
30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)
1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)
1854? Emerance (manuscrit autographe)
1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)
janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)
1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)
6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)
3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)
15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)
15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)
1866, La Forêt noire, scénario
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BF: annonce dans la Bibliographie de la France
Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval
Janvier 1830 — La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale, dans La Psyché, 3e année, vol. 1, p. 5-18, signé Gérard.
Cette troisième version de Lénore concilie l'exactitude de la traduction par rapport au texte de Bürger et la mise en vers. Pourtant, elle ne sera pas reprise en volume.
Voir les deux premières traductions: Lénore imitée de Bürger et Lénore traduction littérale de Bürger.
Voir la notice LA CAMARADERIE DU PETIT CÉNACLE.
*****
LA LÉNORE DE BÜRGER.
Lénore au matin de chez elle
Sort pleurante, elle a mal dormi :
— Est-il mort ? est-il infidèle,
Reviendra-t-il, mon doux ami ?
Wilhelm était parti naguère
Pour Prague, où le roi Frédéric
Soutenait une rude guerre
Si l’on en croit le bruit public.
_
Enfin ce prince et la Czarine,
Las de batailler sans succès,
Ont calmé leur humeur chagrine
Et depuis peu conclu la paix ;
Et cling ! et clang ! les deux armées,
Au bruit des instrumens guerriers,
Mais joyeuses et désarmées,
Rentrent gaîment dans leurs foyers.
_
Ah ! partout, partout quelle joie !
A leur abord, jeunes et vieux
Fourmillent par monts et par voie,
En les accueillant de leur mieux :
— Dieu soit loué !.... dit une amante,
Une épouse.... quel heureux jour !
Seule, hélas ! Lénore tremblante
Attend le baiser du retour.
_
Elle s’informe, crie, appelle,
Parcourt en vain les rangs pressés.
De son amant point de nouvelle....
Et tous les soldats sont passés !
Mais sur la route solitaire,
Lénore en proie au désespoir
Tombe échevelée.... et sa mère
L’y retrouva quand vint le soir.
_
— Ah ! le seigneur nous fasse grâce !
Qu’as-tu ? qu’as-tu, ma pauvre enfant ?...
Elle la relève, l’embrasse,
Contre son cœur la réchauffant ;
— Que le monde et que tout périsse !...
Ma mère ! Il est mort ! il est mort !
Il n’est plus au ciel de justice....
Mais je partagerai son sort !
_
— Mon dieu ! mon dieu ! quelle démence !
Enfant, rétracte un tel souhait ;
Du ciel implore la clémence,
Le bon Dieu fait bien ce qu’il fait.
— Vain espoir ! ma mère ! ma mère !
Dieu n’entend rien, le ciel est loin....
A quoi servira ma prière,
Si Wilhelm n’en a plus besoin !
_
— Qui connaît le père, d’avance
Sait qu’il aidera son enfant :
Va, Dieu guérira ta souffrance
Avec le Très-Saint Sacrement !
— Ma mère ! pour calmer ma peine,
Nul remède n’est assez fort,
Nul sacrement, j’en suis certaine,
Ne peut rendre à la vie un mort !
_
— Ecoute donc.... qui sait, ma chère,
Si ton infidèle amoureux
Avec une fille étrangère
N’a pas contracté d’autres nœuds :
Que l’oubli paye son injure,
Le diable en vengera l’affront,
Il emportera le parjure
Dans son enfer, et tout au fond.
_
— Il m’aimait trop, infortunée !
Ma mère, il est mort ! il est mort !
Puissé-je n’être jamais née,
Ou déjà partager son sort :
Que ton éclat s’évanouisse,
Flambeau de ma vie, éteins-toi !
Le jour me serait un supplice,
Dès qu’il n’est plus d’espoir pour moi !
_
— Ces mots à ma fille chérie
Par la douleur sont arrachés....
Mon Dieu, ne vas pas, je t’en prie,
Les lui compter pour des péchés !
Enfant, ta peine est passagère,
Mais songe au bonheur éternel ;
Tu perds un fiancé sur terre,
Il te reste un époux au ciel.
_
— Qu’est-ce que le bonheur céleste,
Ma mère ? qu’est-ce que l’enfer ?
Avec lui le bonheur céleste,
Et sans lui, sans Wilhelm, l’enfer. (1)
Que ton éclat s’évanouisse,
Flambeau de ma vie, éteins-toi !
Le jour me serait un supplice,
Dès qu’il n’est plus d’espoir pour moi !
_
Ainsi, dans son cœur, dans son âme
Se ruait un chagrin mortel ;
Long-temps encore elle se pâme
Se déchire, maudit le ciel,
Jusqu’à l’heure où de sombres voiles
Le soleil obscurcit ses yeux,
A l’heure où les blanches étoiles
Glissent en paix sur l’arc des cieux.
_
Tout à coup, trap ! trap ! trap ! Lénore
Reconnaît le pas d’un coursier ;
Bientôt une armure sonore
En grinçant monte l’escalier....
Et puis, écoutez ! la sonnette
Klinglingling ! tinte doucement....
Par la porte de la chambrette
Ces mots pénètrent sourdement :
_
— Holà ! holà ! c’est moi, Lénore !
Veilles-tu, petite, ou dors-tu ?
Me gardes-tu ton cœur encore,
Es-tu joyeuse ou pleures-tu ?
— Ah ! Wilhelm, Wilhelm, à cette heure !
Ton retard m’a fait bien du mal,
Je t’attends, je veille et je pleure....
Mais d’où viens-tu sur ton cheval ?
_
— Je viens du fond de la Bohème,
Je n’en suis parti qu’à minuit,
Et je veux si Lénore m’aime
Qu’elle m’y suive cette nuit.
— Entre ici d’abord, ma chère âme,
J’entends le vent siffler dehors,
Dans mes bras, sur mon sein de flamme,
Je saurai réchauffer ton corps.
_
— Laisse le vent siffler, ma chère,
Qu’importe à moi le mauvais temps,
Mon cheval noir gratte la terre,
Je ne puis rester plus long-temps :
Allons ! chausse tes pieds agiles,
Saute en croupe sur mon cheval,
Nous avons à faire cent milles
Pour gagner le lit nuptial.
_
— Quoi cent milles à faire encore
Avant la fin de cette nuit ?
Wilhelm, la cloche vibre encore
Du douzième coup de minuit....
— Vois la lune briller, petite,
La lune éclairera nos pas ;
Nous et les morts, nous allons vite,
Et bientôt nous serons là bas.
_
— Mais où sont et comment sont faites
Ta demeure et ta couche ? — loin :
Le lit est fait de deux planchettes
Et de six planches, dans un coin
Étroit, silencieux, humide.
— Y tiendrons-nous bien ? — Oui, tous deux ;
Mais viens, que le cheval rapide
Nous emporte au festin joyeux !
_
Lénore se chausse et prend place
Sur la croupe du noir coursier,
De ses mains de lis elle embrasse
La taille de son cavalier....
Hop ! hop ! hop ainsi dans la plaine
Toujours le galop redoublait,
Les amans respiraient à peine,
Et sous eux le chemin brûlait.
_
Comme ils voyaient devant, derrière,
A droite, à gauche, s’envoler
Steppes, forêts, champs de bruyère,
Et les cailloux étinceler !
— Hourrah ! hourra ! La lune brille,
Les morts vont vite par le frais,
En as-tu peur, petite fille ?
Non !.... Mais laisse les morts en paix !
_
— Pourquoi ce bruit, ces chants, ces plaintes,
Ces prêtres ?.... — C’est le chant des morts,
Le convoi, les prières saintes ;
Et nous portons en terre un corps.
Tout se rapproche : enfin la bière
Se montre à l’éclat des flambeaux,
Et les prêtres chantaient derrière
Avec une voix de corbeaux.
_
— Votre tâche n’est pas pressée,
Vous finirez demain matin ;
Moi, j’emmène ma fiancée,
Et je vous invite au festin ;
Viens, chantre, que du mariage
L’hymne joyeux nous soit chanté ;
Prêtre, il faut au bout du voyage
Nous unir pour l’éternité !
_
Ils obéissent en silence
Au mystérieux cavalier ;
— Hourra ! — tout le convoi s’élance
Sur les pas ardens du coursier....
Hop ! hop ! hop ! ainsi dans la plaine
Toujours le galop redoublait,
Les amans respiraient à peine,
Et sous eux le chemin brûlait.
_
O comme champs, forêts, herbages,
Devant et derrière filaient !
O comme villes et villages
A droite, à gauche s’envolaient !
Hourrah ! hourrah ! Les morts vont vite,
La lune brille sur leurs pas....
En as-tu peur, des morts, petite ?
— Ah ! Wilhelm, ne m’en parle pas !
_
— Tiens, tiens ! aperçois-tu la roue ?
Comme on y court de tous côtés !
Sur l’échafaud on danse, on joue,
Que de beaux spectres argentés !
Ici, compagnons, je vous prie,
Suivez les pas de mon cheval,
Bientôt, bientôt je me marie,
Et vous danserez à mon bal.
_
Housch ! housch ! housch ! les spectres en foule
A ces mots se sont rapprochés,
Avec le bruit du vent qui roule
Dans les feuillages desséchés ;
Hop ! hop ! hop ! ainsi dans la plaine
Toujours le galop redoublait,
Les amans respiraient à peine
Et sous eux le chemin brûlait.
_
Comme les plaines éclairées
Par la lune, sur eux passaient !
Comme les étoiles dorées,
Comme les cieux sur eux glissaient !....
— Hourra ! Hourra ! La lune brille,
Les morts vont vite par le frais ;
En as-tu peur, petite fille ?....
— Mon Dieu ! laisse les morts en paix !
_
— Mon cheval ! mon noir !.... le coq chante,
Mon noir ! nous arrivons enfin,
Et déjà ma poitrine ardente
Hume le vent frais du matin....
Au but ! Au but ! Mon cœur palpite,
Le lit nuptial est ici ;
Au but ! Au but !.... Les morts vont vite,
Les morts vont vite.... Nous voici !
_
Une grille en fer les arrête :
Le cavalier frappe trois coups
Avec sa légère baguette.
Les serrures et les verroux
Craquent.... Les deux battans gémissent,
Se retirent. — Ils sont entrés :
Des tombeaux autour d’eux surgissent
Par la lune blanche éclairés.
_
Le cavalier près d’une tombe
S’arrête en ce lieu désolé.
Pièce à pièce son manteau tombe
Comme de l’amadou brûlé....
Hou ! Hou !... Voici sa chair encore
Qui s’envole, avec ses cheveux,
Et de tout ce qu’aimait Lénore
Ne laisse qu’un squelette affreux.
_
Le cheval disparaît en cendre
Avec de longs hennissemens....
Du ciel en feu semblent descendre
Des hurlemens ! des hurlemens !
Lénore entend des cris de plainte
Percer la terre sous ses pas,
Et son cœur glacé par la crainte
Flottait de la vie au trépas.
_
C’est le bal des morts qui commence,
La lune brille.... les voici !
Ils se forment en ronde immense,
Puis ils dansent, chantant ceci :
— Dans sa douleur la plus profonde,
Malheur à qui blasphèmera !...
Ce corps vient de mourir au monde....
Dieu sait où l’âme s’en ira !
(1) Ces répétitions de vers et de mots rimant avec eux-mêmes sont ainsi dans l’original : la forme des strophes est aussi la même.
GÉRARD.
______
GÉRARD DE NERVAL - SYLVIE LÉCUYER tous droits réservés @
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