TEXTES
1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)
1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)
1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)
1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)
15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat
6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet
6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet
20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet
12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)
11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet
13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet
16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet
29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)
28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré
15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)
1828? Faust (manuscrit autographe)
1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)
mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)
août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)
octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)
24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)
21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)
19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)
janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)
16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)
23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)
6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)
13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)
13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)
13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)
27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)
29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)
13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)
mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)
juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)
14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)
11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)
29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )
29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)
14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)
23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)
7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)
25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)
4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)
17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)
24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)
14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)
1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)
26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)
20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)
12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)
18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)
2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)
26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)
31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)
24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)
25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)
13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart
19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)
15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)
17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)
28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)
25 février 1840, Le Magnétiseur
5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)
8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)
26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)
28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)
18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin
26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)
29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)
30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)
11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)
18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)
1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)
février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)
1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)
mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)
1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)
5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc
7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)
31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé
11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)
9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas
novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens
10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)
15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)
24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)
19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)
11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)
10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)
17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)
31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)
5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)
12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)
2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)
30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)
28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)
11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)
15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)
29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)
20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)
8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)
16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)
19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet
1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)
6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)
5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)
novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)
28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)
15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)
17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)
12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)
16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)
30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)
20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)
1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)
22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)
15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)
1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins
15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)
15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)
15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)
17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)
21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)
15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)
15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)
1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)
26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)
6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)
7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)
15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)
26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)
1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)
9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)
15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)
18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)
1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)
24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)
29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)
novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)
24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale
15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)
1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)
15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)
1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)
15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)
21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)
1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)
15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)
1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)
9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)
15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)
23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)
30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)
1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)
6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)
13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)
15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)
20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)
1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)
15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)
1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier
15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)
14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas
25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche
10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)
17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)
1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)
28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud
31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)
25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire
Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968
Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975
30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)
1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)
1854? Emerance (manuscrit autographe)
1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)
janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)
1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)
6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)
3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)
15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)
15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)
1866, La Forêt noire, scénario
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BF: annonce dans la Bibliographie de la France
Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval
1826, 12 août — Épître à M. de Villèle par l’auteur du Cuisinier d’un grand homme dans Le Mercure de France du XIXe siècle, t. XIV, p. 241-247.
La mention « par l’auteur du Cuisinier d’un grand homme », qui désigne Gérard sous le pseudonyme de Beuglant, l’ami de Cadet Roussel, invite à lire cette « Épître » comme un pamphlet contre le ministre Joseph de Villèle, déjà épinglé dans M. Dentscourt pour son clientélisme, sa politique ultra et sa collusion avec les Jésuites.
On peut lire cette note à la fin du texte : « L’auteur de cette satire va publier sous quelques jours La Villéleïde, ou la Jeunesse du grand homme, ses conversations avec le malin, la création du monstre, sa mort, sa descente aux enfers, etc. Ce poëme en cinq chants, composé en partie avant que la Villéliade eût paru, n’a aucun rapport avec elle, mais en peut être le complément, parce que la Villéliade chante l’avenir, et que la Villéleïde chantera le passé. » Notons que Félix Bodin, l’ami Cadet Roussel, est devenu directeur du Mercure de France du XIXe siècle en avril 1826.
L’Épître à M. de Villèle sera reprise en 1827 dans Élégies nationales et satires politiques.
Voir la notice LES ANNÉES CHARLEMAGNE.
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ÉPÎTRE À M. DE VILLÈLE,
PAR L’AUTEUR
DU CUISINIER D’UN GRAND HOMME.
Ministre financier, que la France révère,
Que les heureux aînés ont appelé leur père,
Et qui, sachant que l’or pourrait nous pervertir,
Cherche de tous côtés des gens à convertir ;
Permets qu’émerveillé de tes talens sublimes,
Un enfant d’Apollon t’adresse quelques rimes.
Des muses, il est vrai, tu ne fais pas grand cas,
Et la double colline a pour toi peu d’appas ;
On sait que tu n’as point, expert en beau langage,
Rimé l’Indifférence ou le Bois du Village ;
Mais apprends que les vers peuvent avoir leur prix,
C’est par-là qu’on est grand dans de petits écrits,
Qu’on vit dans l’avenir, et qu’un sage ministre
N’est pas, après sa mort, oublié comme un cuistre.
L’homme s’illustre en vain, si la postérité
Ne lit en de beaux vers son immortalité ;
Sans Homère, a-t-on dit, qui connaîtrait Achille ?
Baour, depuis long-temps, a bien changé de style,
Mais qui saurait sans lui, dans des siècles nouveaux,
Que Bonaparte fut, et qu’il fut un héros ?
_
Ta splendeur, je l’avoue, est plus durable encore,
O toi dont le déclin tarde à suivre l’aurore,
Où pourras-tu trouver un Baour pour chanter
Le succès des grands coups que tu sais méditer,
Qui t’ait vu, te connaisse, et dise qu’il t’admire,
Ou sans rire soi-même, ou sans prêter à rire ?
_
Sans ces deux clauses-là, tu pourras à Paris
Trouver des vers flatteurs cotés à très-bas prix ;
Dans ce vaste comptoir de toute renommée,
On peut, au poids de l’or, trouver de la fumée ;
Au lieu d’un vil métal, que d’honneur t’est offert !
Si tu veux qu’on t’appelle un Turgot, un Colbert,
Ne te consume point en bienfaits inutiles ;
Ces titres à gagner te seront très-faciles,
Pour cinq cents francs au plus on peut les accorder,
Et même pour trois cents, si tu sais marchander.
Mais l’honneur, le pouvoir, l’éclat qui t’environne
Me donnent le désir de chanter ta personne.
Ne me dédaigne pas, malgré tout ce qu’on dit,
Mes vers sauront encor te remettre en crédit.
C’est en vain qu’un poëte avait de ta cuisine
Et de ton ministère annoncé la ruine ;
Ne t’en effraye point, l’avenir incertain
Ne peut plus dévoiler les arrêts du destin :
Cependant si ton âme en eut quelque tristesse,
Je veux la ramener aux jours de ta jeunesse,
Et ranimant ton cœur, qu’un présage a glacé
Rajeunir son espoir de l’éclat du passé.
Oui, je veux raconter ton héroïque histoire,
Je veux chanter les jours si chers à ta mémoire,
Où ton aspect saisit d’un désir amoureux
Le cœur novice encor d’une vierge aux doux yeux,
Ton démon familier y sera mis en scène,
Je dirai tes succès sur les bords de la Seine,
Et comment ton grand nom, d’un beau titre anobli,
Fut proclamé vainqueur au Château-Rivoli.
_
Mais aussi ta faveur doit être mon salaire ;
Mets-moi de ton écot ; je puis au ministère,
Comme ce Martignac, qu’on a déjà vanté,
Entonner l’hymne auguste à ta prospérité.
Voudrais-tu, dès l’abord, connaître ma personne,
Je me nomme Beuglant : à ce nom, qui t’étonne ?
_
Peut-être il te souvient que l’un de mes écrits
Fit rire à tes dépens les cadets de Paris ;
C’était, à ce qu’on trouve, une pièce assez drôle,
Et ta noble excellence y jouait un beau rôle....
Oh ! tu l’as fort bien pris ; un autre aurait, dit-on,
Mis l’ouvrage à l’index, et l’auteur en prison ;
Mais toi, quand un mouchard, croyant faire œuvre pie,
Du livre à peine éclos te porta la copie,
Tu ne dépêchas point un mandat à l’auteur ;
Mais tu ris en ta barbe et dis : C’est un farceur (1) !
_
C’était fort bien agir, et ma reconnaissance
D’un poëme déjà t’a donné l’espérance ;
En attendant le jour désigné par le sort,
Pour voir, ou sa naissance, ou peut-être sa mort,
Je voudrais avec toi jaser pour me distraire ;
Histoire de parler, car c’est peu nécessaire.
_
Dans ce superbe hôtel, où règne ton pouvoir,
Qui t’étonne le plus ? — Sans doute de t’y voir.
En effet, quand bien loin des bords de la Garonne,
Le pays de Parny vit ton humble personne,
Quand, d’un maigre colon, aussi maigre employé,
Tu vivais d’un travail qui t’était mal payé,
Pouvais-tu, dans ton cœur, d’une telle puissance
Accueillir la pensée, enfler ton espérance ?
_
Peut-être ! — Le génie, encore à son matin,
Sait souvent pressentir un sublime destin :
On dit, que loin des jeux, écolier solitaire,
Bonaparte rêvait l’empire de la terre,
Et que de ses grandeurs l’espoir audacieux,
Comme un vaste tableau, passait devant ses yeux.
_
Sauf la comparaison, peut-être que toi-même
Tu rêvas le pouvoir, sinon le diadème ;
Las d’exercer ton bras sur des noirs révoltés,
Souvent, tournant les yeux vers nos bords regrettés,
Tu pensas aux grandeurs, et peut-être.... à la gloire :
La gloire !.... Oh non, ce mot n’a rien que d’illusoire,
C’est un mot bien ronflant, mais qui sonne le creux ;
L’argent est plus solide, et tinte beaucoup mieux.
_
C’est ce que tu compris, quand riche d’une épouse,
Des bords lointains du Cap, tu revins à Toulouse ;
Un si noble génie en France replanté
Ne pouvait demeurer en son obscurité.
Elu maire, bientôt l’amour de la patrie
S’éveilla, comme un songe, en ton âme attendrie,
Et ce beau sentiment l’échauffant par degrés,
Tu rêvas le bonheur de tes administrés ;
Leur bourse cependant étant fort aplatie,
Tu pelotais d’abord, en attendant partie,
Comme l’on fait toujours ; et de leur bien jaloux,
Tu voulus commencer par leur tâter le pouls (2).
_
Tu n’en eus pas le temps, car l’aveugle fortune
Te porta d’un seul coup au pied de la tribune,
Et fixant à la fois tes vœux irrésolus,
Te saisit au collet, pour ne te quitter plus.
_
Alors de mieux en mieux : bientôt le ministère
Ennoblit pour toujours ta race roturière ;
Avant toi sur ce siège un autre était assis,
Il partit, tu pris place ; — Allons, saute, marquis !
_
C’est un grand pas de fait ; ministre ! quel beau titre !
Du bonheur des Français te voilà donc l’arbitre ;
Tu peux, jetant partout de bienfaisans regards,
Secourir le malheur, et protéger les arts ;
De la bonté royale, auguste et digne organe,
Le bien du malheureux de ton pouvoir émane,
Et le peuple en ses maux t’invoquant nuit et jour,
Entre le prince et toi partage son amour.
Cependant quelques sots viennent se plaindre encore,
Ils osent avancer que ta dent nous dévore,
Qu’un système nouveau, fatal à nos rentiers,
Alimenta la Seine et garnit les greniers.
Va, va, laisse crier les badauds au scandale ;
Tu peux dîner en paix, c’est John-Bull qui régale ;
John-Bull est un peu sot, il fait beaucoup de bruit,
Prend des airs mécontens, qu’aucun effet ne suit.
Parfois assez rétif, il se laisse, à vrai dire,
Par le premier faquin trop durement conduire.
Jadis il a montré qu’il était maître aussi,
Mais les temps sont changés ; vieux, il s’est radouci ;
Oui, je l’ai dit souvent, tout s’efface avec l’âge,
Tout jusqu’à la vertu, l’amour et le courage,
Tout change et tout renaît ; c’est un bienfait des cieux ;
Jeune, l’homme triomphe, il dort quand il est vieux.
_
Mais, grand homme, à quoi tend ce discours inutile ?
Qu’importe que ton nom soit blâmé par la ville,
Qu’importe au denier trois que tes effets soient bas,
Et que John-Bull se plaigne ou ne se plaigne pas :
Les empoigneurs sont là, si John-Bull n’est pas sage,
S’il siffle un peu trop fort, on referme sa cage ;
A présent, l’on craint peu qu’ennemi du repos,
Il aille renverser tes tranquilles bureaux,
Et brisant à la fois des pouvoirs arbitraires,
Crier : Chassez les huit ! dans tous les ministères :
Le bon temps d’autrefois est là qui le poursuit,
Et son croque-mitaine est arrivé sans bruit ;
Le bon père Escobar, revenu de sa fuite,
Ami des rois français, va régler leur conduite.
Il est vrai que parfois, passant un peu le but,
Sa tendresse pour eux a hâté leur salut ;
Mais il revient enfin : sa main qui te protège
Contre les accidens raffermira ton siège,
Avec lui sans danger tu règneras bientôt,
Il ne faut pour cela que baiser son ergot.
(1) Historique.
(2) Quand j’aurai tâté le pouls de mon île, je te manderai s’il faut que tu viennes m’y rejoindre. (Lettre de Sancho à sa femme.)
_______
GÉRARD DE NERVAL - SYLVIE LÉCUYER tous droits réservés @
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