TEXTES

1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)

1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)

1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)

1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)

15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat

19, 22 avril, 14 juin (BF), Complainte sur la mort de haut et puissant seigneur le Droit d’aînesse, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet

20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet

12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)

11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet

13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet

16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet

29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)

28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré

15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)

1828? Faust (manuscrit autographe)

1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)

mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)

août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)

octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)

24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)

14 novembre 1829, Les Bienfaits de l’enseignement mutuel, Procès verbal de la Loge des Sept-Écossais-réunis, chez Bellemain

21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)

12 décembre 1829, La Mort du Juif errant. Rapsodie lyrique de Schubart (Mercure de France au XIXe siècle)

19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)

2 janvier 1830, La Première nuit du Sabbat. Morceau lyrique de Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)

16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)

23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)

13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)

13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)

13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)

27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)

10 avril 1830, Le Dieu et la bayadère, nouvelle indienne par Goëthe (Mercure de France au XIXe siècle)

29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)

13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)

mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)

17 juillet 1830, L’Éclipse de lune. Épisode fantastique par Jean-Paul Richter (Mercure de France au XIXe siècle)

juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)

14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)

30 octobre 1830 (BF), Choix de poésies de Ronsard, Dubellay, Baïf, Belleau, Dubartas, Chassignet, Desportes, Régnier (Bibliothèque choisie)

11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)

29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )

29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)

14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)

23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)

30 avril 1831, Le Bonheur de la maison par Jean-Paul Richter. Maria. Fragment (Mercure de France au XIXe siècle)

7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)

25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)

17 et 24 septembre 1831, Les Aventures de la nuit de Saint-Sylvestre. Conte inédit d’Hoffmann (Mercure de France au XIXe siècle)

4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)

17 décembre 1831, Odelettes. La Malade, Le Soleil et la Gloire, Le Réveil en voiture, Le Relais, Une Allée du Luxembourg, Notre-Dame-de-Paris (Almanach des muses)

17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)

24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)

14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)

1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)

26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)

20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)

12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)

18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)

2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)

26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)

31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)

24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)

25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)

13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart

19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)

15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)

17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)

21 et 28 septembre 1839, Lettre VI, A Madame Martin (Lettres aux belles femmes de Paris et de la province)

28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)

25 février 1840, Le Magnétiseur

5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)

8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)

26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)

28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)

18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin

26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)

29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)

30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)

11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)

18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)

1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)

février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)

1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)

mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)

1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)

5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc

7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)

31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé

11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)

9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas

novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens

10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)

15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)

24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)

19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)

11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)

10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)

17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)

31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)

5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)

12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)

2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)

30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)

28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)

11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)

15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)

29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)

20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)

8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)

16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)

19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet

1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)

6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)

5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)

novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)

28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)

15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)

17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)

1er juillet 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Les Esclaves (Revue des Deux Mondes)

12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)

16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)

30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)

15 septembre 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Le Harem (Revue des Deux Mondes)

20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)

1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)

22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)

15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)

1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins

15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)

15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)

15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)

17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)

21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)

15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)

15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)

7 janvier-24 juin 1849, puis 2 septembre 1849-27 janvier 1850, Al-Kahira. Souvenirs d’Orient (La Silhouette)

1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)

26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)

6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)

3 novembre 1849 (BF), Le Diable vert, et Impression de voyage (Almanach satirique, chez Aubert, Martinon et Dumineray)

7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)

15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)

26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)

1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)

9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)

15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)

18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)

1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)

24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)

29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)

novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)

24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale

15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)

1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)

15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)

1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)

15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)

21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)

1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)

15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)

1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)

9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)

15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)

23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)

30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)

1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)

6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)

13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)

15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)

20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)

1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)

15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)

1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier

15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)

14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas

25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche

10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)

17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)

1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)

28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud

31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)

25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire

Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968

Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975

30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)

1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)

1854? Emerance (manuscrit autographe)

1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)

janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)

1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)

6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)

3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)

15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)

15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)

1866, La Forêt noire, scénario

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BF: annonce dans la Bibliographie de la France

Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval

6 novembre 1852 — Les Nuits d’octobre, dans L’Illustration, 4e livraison, illustrée d’une gravure de Gavarni, sous titrée : « Monsieur le maire, le vrai peut quelquefois n’être pas vrai..... sans blague. ».

À Meaux, Nerval va vivre deux journées et surtout une nuit agitées. À peine arrivé, alors qu’il pleut à verse, son regard est attiré dans un café par l’annonce d’un spectacle forain qui a lieu tous les soirs jusqu’au « dimanche 5 courant ». Notons que c’est le 5 septembre, et non le 5 octobre, qui tombe un dimanche cette année-là, il semble donc que ces « Nuits d’octobre » soient des nuits de septembre. Faute de mieux, Nerval se rend le soir au spectacle, qui commence par un air de Figaro interprété par Montaldo, se poursuit par une cachucha, dansée par une fausse Espagnole aux faux mollets ronds, danse qui prélude à l’entrée en scène de la Vénitienne aux cheveux mérinos. Une fois la représentation terminée, à minuit, la soirée se poursuit au café de Mars avec les quatre comédiens, autour de verres de « bière de mars » et de punch, agrémentée d’un brin de cour aux deux artistes féminines. Du coup, la voiture, dont on apprendra plus tard que c’est celle qui devait le mener à Dammartin, est partie sans lui. À l’hôtel de la Syrène, son sommeil est agité par un rêve : des corridors, des corridors sans fin, des escaliers que l’on monte et que l’on descend, tandis que des petits gnômes lui dévissent la tête pour récurer son cerveau des effets de la rencontre arrosée de la soirée. Réveillé à cinq heures du matin, il va s’installer au Café du Commerce, et, le café n’étant pas encore prêt, demande de quoi écrire, « un petit chat blanc qui a les yeux verts » sur les genoux, et la Marne aux « teintes plombées » coulant devant lui sous le pont des Arches.

Présentée ainsi, la temporalité des événements se coordonne parfaitement. Mais ce n’est pas le choix littéraire de Nerval. Le récit, mené sur le mode de l’écriture excentrique, fonctionne en permanence par ellipses, analepses et prolepses, bouleversant l’ordre de succession temporelle des événements. Ainsi, la représentation des artistes forains ne nous a pas été racontée au chapitre XVI (feuilleton du 6 novembre), qui indique seulement de façon elliptique : « […] je ne sortis de la représentation qu’après minuit », mais seulement au chapitre XXI (feuilleton publié 15 jours plus tard). De même, le chœur des gnômes, au chapitre XVIII, anticipe sur le récit de la soirée arrosée en compagnie des artistes de la petite troupe qui ne sera fait, partiellement, qu’au chapitre XX. L’intérêt littéraire d’une telle technique d’écriture est évident : en jouant sur les ruptures du temps de l’histoire, le récit accentue le caractère d’étrangeté de ces deux jours passés à Meaux, et justifie pleinement la qualité d’humoriste (au sens anglais du terme) dont se réclame Nerval, en même temps qu’il autorise, dans le chaos qu’il instaure, l’intrusion de l’onirisme et le récit de rêve.

<<< Les Nuits d'octobre, 1re, 2e, 3e livraisons

Voir la notice LE TEMPS DES RETOURS EN VALOIS. LES NUITS D'OCTOBRE

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LES NUITS D’OCTOBRE.

PARIS, — PANTIN, — ET MEAUX.

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XVI (sic, deux chap. XVI). — MEAUX.

Les prêtres eux-mêmes qui songent à sauver des âmes chinoises, indiennes ou thibétaines, n’accompliraient-ils pas dans de pareils lieux de dangereuses et sublimes missions ? Pourquoi le Seigneur vivait-il avec les païens et les publicains ?

Le soleil commence à percer le vitrage supérieur de la salle, la porte s’éclaire. Je m’élance de cet enfer au moment d’une arrestation, et je respire avec bonheur le parfum de fleurs entassées sur le trottoir de la rue aux Fers.

La grande enceinte du marché présente deux longues rangées de femmes dont l’aube éclaire les visages pâles. Ce sont les revendeuses des divers marchés, auxquelles on a distribué des numéros, et qui attendent leur tour pour recevoir leurs denrées d’après la mercuriale fixée.

Je crois qu’il est temps de me diriger vers l’embarcadère de Strasbourg, emportant dans ma pensée le vain fantôme de cette nuit.

Voilà, voilà, celui qui revient de l’enfer !

Je m’appliquais ce vers en roulant le matin sur les rails du chemin de Strasbourg, — et me flattais... car je n’avais pas encore pénétré jusqu’aux plus profondes souricières ; je n’avais guère, au fond, rencontré que d’honnêtes travailleurs, — des pauvres diables avinés, des malheureux sans asile... Là n’est pas encore le dernier abîme.

L’air frais du matin, l’aspect des vertes campagnes, les bords riants de la Marne, Pantin à droite, d’abord, — le vrai Pantin, — Chelles à gauche, et plus tard Lagny, les longs rideaux de peupliers, les premiers coteaux abrités qui se dirigent vers la Champagne, tout cela me charmait et faisait rentrer le calme dans mes pensées.

Malheureusement un gros nuage noir se dessinait au fond de l’horizon, et quand je descendis à Meaux, il pleuvait à verse. Je me réfugiai dans un café où je fus frappé par l’aspect d’une énorme affiche rouge conçue en ces termes :

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PAR LA PERMISSION DE M. LE MAIRE (de Meaux)

MERVEILLE SURPRENANTE

Tout ce que la nature offre de plus bizarre :

UNE TRÈS JOLIE FEMME

Ayant pour chevelure un belle

TOISON DE MÉRINOS

Couleur marron.

« M. Montaldo, de passage en cette ville, a l’honneur d’exposer au public une rareté, un phénomène tellement extraordinaire, que Messieurs de la Faculté de médecine de Paris et de Montpellier n’ont pu encore le définir.

CE PHÉNOMÈNE

consiste en une jeune femme de dix-huit ans, native de Venise, qui, au lieu de chevelure, porte une magnifique toison en laine mérinos de Barbarie, couleur marron, d’une longueur d’environ 52 centimètres. Elle pousse comme les plantes, et on lui voit sur la tête des tiges qui supportent quatorze ou quinze branches.

« Deux de ces tiges s’élèvent sur son front et forment des cornes.

« Dans le cours de l’année, il tombe de sa toison, comme de celle des moutons qui ne sont pas tondus à temps, des fragments de laine.

« Cette personne est très-avenante, ses yeux sont expressifs, elle a la peau très-blanche ; elle a excité dans les grandes villes l’admiration de ceux qui l’ont vue, et, dans son séjour à Londres, en 1846, S. M. la reine, à qui elle a été présentée, a témoigné sa surprise en disant que jamais la nature ne s’était montrée si bizarre.

« Les spectateurs pourront s’assurer de la vérité au tact de la laine, comme à l’élasticité, à l’odorat, etc., etc.

« Visible tous les jours jusqu’à dimanche 5 courant.

« Plusieurs morceaux d’opéra seront exécutés par un artiste distingué.

« Des danses de caractère, espagnoles et italiennes, par des artistes pensionnés.

« Prix d’entrée : 25 centimes. — Enfants et militaires : 10 centimes. » (1)

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A défaut d’autre spectacle, je voulus vérifier par moi-même les merveilles de cette affiche, et je ne sortis de la représentation qu’après minuit.

J’ose à peine analyser maintenant les sensations étranges du sommeil qui succéda à cette soirée. — Mon esprit, surexcité sans doute par les souvenirs de la nuit précédente, et un peu par l’aspect du pont des Arches qu’il fallut traverser pour me rendre à l’hôtel, imagina le rêve suivant, dont le souvenir m’est fidèlement resté :

(1) Tout dans ces récits étant véritable, l’auteur a déposé l’affiche aux bureaux de L’Illustration, où elle est visible.

XVII. — CAPHARNAUM.

Des corridors, — des corridors sans fin ! Des escaliers, — des escaliers où l’on monte, où l’on descend, où l’on remonte, et dont le bas trempe toujours dans une eau noire agitée par des roues, sous d’immenses arches de pont… à travers des charpentes inextricables ! — Monter, descendre, ou parcourir les corridors, — et cela pendant plusieurs éternités... Serait-ce la peine à laquelle je serais condamné pour mes fautes ?

J’aimerais mieux vivre !!!

Au contraire, — voilà qu’on me brise la tête à grands coups de marteau : qu’est-ce que cela veut dire ?

« Je rêvais à des queues de billard… à des petits verres de verjus... »

« Monsieur et mame le maire est-il content ? »

Bon ! je confonds à présent Bilboquet avec Macaire. Mais ce n’est pas une raison pour qu’on me casse la tête avec des foulons.

« Brûler n’est pas répondre ! »

Serait-ce pour avoir embrassé la femme à cornes, — ou pour avoir promené mes doigts dans sa chevelure de mérinos ?

« Qu’est-ce que c’est donc que ce cynisme ! » dirait Macaire.

Mais Desbarreaux le cartésien répondrait à la Providence : « Voilà bien du tapage pour...

« Bien peu de choses. »

XVIII. — CHŒUR DES GNÔMES (1).

Les petits gnômes chantent ainsi :

« Profitons de son sommeil ! — Il a eu bien tort de régaler le saltimbanque, et d’absorber tant de bière de mars en octobre, — à ce même café — de Mars, avec accompagnement de cigares, de cigarettes, de clarinette et de basson.

Travaillons, frères, — jusqu’au point du jour, jusqu’au chant du coq, — jusqu’à l’heure où part la voiture de Dammartin, — et qu’il puisse entendre la sonnerie de la vieille cathédrale où repose L’AIGLE DE MEAUX.

« Décidément la femme mérinos lui travaille l’esprit, — non moins que la bière de mars et les foulons du pont des Arches ; — cependant les cornes de cette femme ne sont pas telles que l’avait dit le saltimbanque : — notre Parisien est encore jeune… Il ne s’est pas assez méfié du boniment.

« Travaillons, frères, travaillons, pendant qu’il dort. — Commençons par lui dévisser la tête, puis, à petits coups de marteaux, — oui, de marteaux, — nous descellerons les parois de ce crâne philosophique — et biscornu !

« Pourvu qu’il n’aille pas se loger dans une des cases de son cerveau — l’idée d’épouser la femme à la chevelure de mérinos ! Nettoyons d’abord le sinciput et l’occiput ; — que le sang circule plus clair à travers les centres nerveux qui s’épanouissent au-dessus des vertèbres.

« Le moi et le non-moi de Fichte se livrent un terrible combat dans cet esprit plein d’objectivité. — Si seulement il n’avait pas arrosé la bière de mars — de quelques tournées de punch offert à ces dames !... L’Espagnole était presque aussi séduisante que la Vénitienne ; mais elle avait de faux mollets, — et sa cachucha paraissait due aux leçons de Mabille.

« Travaillons, frères, travaillons ; — la boîte osseuse se nettoie. — Le compartiment de la mémoire embrasse déjà une certaine série de faits. — La causalité, — oui, la causalité, — le ramènera au sentiment de sa subjectivité. — Prenons garde seulement qu’il ne s’éveille avant que notre tâche soit finie.

« Le malheureux se réveillerait pour mourir d’un coup de sang, que la faculté qualifierait d’épanchement au cerveau, — et c’est nous qu’on accuserait là haut. — Dieux immortels ! il fait un mouvement ; il respire avec peine. Raffermissons la boîte osseuse avec un dernier coup de foulon, — oui, de foulon. — Le coq chante, — l’heure sonne... Il en est quitte pour un mal de tête... Il le fallait ! »

(1) Ceci est un chapitre dans le goût allemand. Les gnômes sont de petits êtres appartenant à la classe des esprits de la terre, qui sont attachés au service de l’homme, ou du moins que leur sympathie conduit parfois à lui être utile. (Voir les légendes recueillies par Simrock.)

XIX. — JE M’ÉVEILLE.

Décidément ce rêve est trop extravagant... même pour moi ! Il vaut mieux se réveiller tout à fait. — Ces petits drôles ! qui me démontaient la tête, — et qui se permettaient après de rajuster les morceaux du crâne avec de grands coups de leurs petits marteaux ! — Tiens, un coq qui chante !... Je suis donc à la campagne ! C’est peut-être le coq de Lucien : αλεξτρυων. Oh ! souvenirs classiques, que vous êtes loin de moi !

Cinq heures sonnent, — où suis-je ? — Ce n’est pas là ma chambre... Ah ! je m’en souviens, — je me suis endormi hier à La Syrène tenue par le Vallois, — dans la bonne ville de Meaux (Meaux en Brie, Seine-et-Marne).

Et j’ai négligé d’aller présenter mes hommages à monsieur et à mame le maire ! — C’est la faute de Bilboquet. (Faisant sa toilette) :

Air des prétendus.

Allons présenter — hum — présenter notre hommage

A la fille de la maison !... (bis)

Oui, j’en conviens, elle a raison,

Oui, oui, la friponne a raison !

Allons présenter, etc.

Tiens, le mal de tête s’en va... oui, mais la voiture est partie. Restons, et tirons-nous de cet affreux mélange de comédie, — de rêve, — et de réalité.

Pascal a dit :

« Les hommes sont fous, si nécessairement fous, que ce serait être fou par une autre sorte que de n’être pas fou. »

La Rochefoucauld a ajouté :

« C’est une grande folie de vouloir être sage tout seul. »

Ces maximes sont consolantes.

XX. — RÉFLEXIONS.

Recomposons nos souvenirs.

Je suis majeur et vacciné ; — mes qualités physiques importent peu pour le moment. Ma position sociale est supérieure à celle du saltimbanque d’hier au soir ; — et décidément sa Vénitienne n’aura pas ma main.

Un sentiment de soif me travaille.

Retourner au café de Mars à cette heure, — ce serait vouloir marcher sur les fusées d’un feu d’artifice éteint.

D’ailleurs, personne n’y peut être levé encore. — Allons errer sur les bords de la Marne et le long de ces terribles moulins à eau dont le souvenir a troublé mon sommeil.

Ces moulins, écaillés d’ardoises, si sombres et si bruyants au clair de lune, doivent être pleins de charme aux rayons du soleil levant.

Je viens de réveiller les garçons du Café du Commerce. Une légion de chats s’échappe de la grande salle de billard, et va se jouer sur la terrasse parmi les thuyas, les orangers et les balsamines roses et blanches. — Les voilà qui grimpent comme des singes le long des berceaux de treillage revêtus de lierre.

Ô nature, je te salue !

Et, quoique ami des chats, je caresse aussi ce chien à longs poils gris qui s’étire péniblement. Il n’est pas muselé. — N’importe ; la chasse est ouverte.

Qu’il est doux pour un cœur sensible de voir se lever l’aurore sur la Marne, à quarante kilomètres de Paris !

Là bas, sur le même bord, au delà des moulins, est un autre café non moins pittoresque, qui s’intitule : Café de l’Hôtel de ville (sous-préfecture). Le maire de Meaux, qui habite tout près, doit, en se levant, y reposer ses yeux sur les allées d’ormeaux et sur les berceaux d’un vert glauque qui garnissent la terrasse. On admire là une statue en terre cuite de la Camargo, grandeur naturelle, dont il faut regretter les bras cassés. Ses jambes sont effilées comme celles de l’Espagnole d’hier, — et des Espagnoles de l’Opéra.

Elle préside à un jeu de boules.

J’ai demandé de l’encre au garçon. Quant au café, il n’est pas encore fait. Les tables sont couvertes de tabourets ; j’en dérange deux ; et je me recueille en prenant possession d’un petit chat blanc qui a les yeux verts.

On commence à passer sur le pont ; j’y compte huit arches. La Marne est marneuse naturellement ; mais elle revêt maintenant des teintes plombées que rident parfois les courants qui sortent des moulins, ou plus loin les jeux folâtres des hirondelles.

Est-ce qu’il pleuvra ce soir ?

Quelquefois un poisson fait un soubresaut qui ressemble, ma foi, à la cachucha éperdue de cette demoiselle bronzée que je n’oserais qualifier de dame sans plus d’informations

Il y a en face de moi, sur l’autre bord, des sorbiers à grains de corail du plus bel effet : « sorbier des oiseaux, — aviaria » — J’ai appris cela quand je me destinais à la position de bachelier dans l’Université de Paris.

GÉRARD DE NERVAL.

(La fin au prochain numéro.)

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