TEXTES

1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)

1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)

1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)

1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)

15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat

19, 22 avril, 14 juin (BF), Complainte sur la mort de haut et puissant seigneur le Droit d’aînesse, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet

6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet

20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet

12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)

11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet

13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet

16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet

29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)

28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré

15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)

1828? Faust (manuscrit autographe)

1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)

mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)

août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)

octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)

24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)

14 novembre 1829, Les Bienfaits de l’enseignement mutuel, Procès verbal de la Loge des Sept-Écossais-réunis, chez Bellemain

21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)

12 décembre 1829, La Mort du Juif errant. Rapsodie lyrique de Schubart (Mercure de France au XIXe siècle)

19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)

2 janvier 1830, La Première nuit du Sabbat. Morceau lyrique de Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)

16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)

23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)

6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)

13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)

13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)

13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)

27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)

10 avril 1830, Le Dieu et la bayadère, nouvelle indienne par Goëthe (Mercure de France au XIXe siècle)

29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)

13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)

mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)

17 juillet 1830, L’Éclipse de lune. Épisode fantastique par Jean-Paul Richter (Mercure de France au XIXe siècle)

juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)

14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)

30 octobre 1830 (BF), Choix de poésies de Ronsard, Dubellay, Baïf, Belleau, Dubartas, Chassignet, Desportes, Régnier (Bibliothèque choisie)

11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)

29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )

29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)

14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)

23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)

30 avril 1831, Le Bonheur de la maison par Jean-Paul Richter. Maria. Fragment (Mercure de France au XIXe siècle)

7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)

25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)

17 et 24 septembre 1831, Les Aventures de la nuit de Saint-Sylvestre. Conte inédit d’Hoffmann (Mercure de France au XIXe siècle)

4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)

17 décembre 1831, Odelettes. La Malade, Le Soleil et la Gloire, Le Réveil en voiture, Le Relais, Une Allée du Luxembourg, Notre-Dame-de-Paris (Almanach des muses)

17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)

24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)

14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)

1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)

26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)

20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)

12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)

18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)

2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)

26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)

31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)

24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)

25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)

13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart

19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)

15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)

17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)

21 et 28 septembre 1839, Lettre VI, A Madame Martin (Lettres aux belles femmes de Paris et de la province)

28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)

25 février 1840, Le Magnétiseur

5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)

8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)

26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)

28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)

18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin

26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)

29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)

30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)

11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)

18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)

1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)

février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)

1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)

mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)

1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)

5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc

7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)

31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé

11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)

9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas

novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens

10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)

15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)

24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)

19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)

11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)

10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)

17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)

31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)

5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)

12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)

2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)

30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)

28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)

11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)

15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)

29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)

20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)

8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)

16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)

19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet

1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)

6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)

5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)

novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)

28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)

15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)

1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)

17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)

1er juillet 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Les Esclaves (Revue des Deux Mondes)

12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)

16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)

30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)

15 septembre 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne. Le Harem (Revue des Deux Mondes)

20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)

1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)

22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)

15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)

1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins

15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)

15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)

15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)

17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)

21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)

15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)

15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)

7 janvier-24 juin 1849, puis 2 septembre 1849-27 janvier 1850, Al-Kahira. Souvenirs d’Orient (La Silhouette)

1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)

26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)

6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)

3 novembre 1849 (BF), Le Diable vert, et Impression de voyage (Almanach satirique, chez Aubert, Martinon et Dumineray)

7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)

15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)

26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)

1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)

9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)

15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)

18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)

1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)

24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)

29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)

novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)

24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale

15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)

1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)

15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)

1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)

15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)

21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)

1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)

15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)

1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)

9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)

15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)

23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)

30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)

1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)

6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)

13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)

15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)

20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)

1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)

15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)

1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier

15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)

14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas

25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche

10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)

17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)

1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)

28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud

31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)

25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire

Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968

Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975

30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)

1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)

1854? Emerance (manuscrit autographe)

1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)

janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)

1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)

6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)

3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)

15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)

15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)

1866, La Forêt noire, scénario

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BF: annonce dans la Bibliographie de la France

Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval

1828 ? — Le Nouveau Genre ou Le Café d’un théâtre, comédie en un acte en vers.

Le manuscrit autographe de Nerval sera achevé et publié en 1860 par Arthus Fleury sous le titre : Le Nouveau genre ou Le Café d’un théâtre / Comédie critique en un acte, en vers / imitée de / Leandro Moratin / commencée par / Gérard de Nerval / et terminée par / Arthus Fleury, Paris, J. Barbée, 12 boulevard Saint-Martin, 1860.

Dans la préface de son édition, Arthus Fleury explique que le manuscrit lui a été donné lors de son passage à Tours par Papion du Château, qui le tenait lui-même de Nerval, et qu’il s’agit d’une traduction libre de la Comedia Nueva o El Cafe, du poète espagnol Moratín. Une lettre de Nerval à Papion du Château, que l’on peut dater d’avril 1832, mois où l’épidémie de choléra à Paris, à laquelle la lettre fait allusion, confirme ce don de deux manuscrits, et, implicitement, son ralliement au romantisme : « Mais je vous irai voir, pour sûr, lundi matin et vous porterai le cahier de l’Erreur. Je viens de le relire et vraiment avec beaucoup de corrections je crois que vous en pourriez faire quelque chose de remarquable. Pour moi, il est impossible qu’il me serve jamais, non que je le croie inférieur à moi ( alors je ne vous l’offrirais pas), mais parce qu’il est d’un genre de poésie, autre que celui que j’ai embrassé et qu’à ce titre il me nuirait s’il paraissait sous mon nom, de la même façon qu’une poésie carliste nuirait à un républicain. J’ai aussi un autre cahier où vous trouveriez peut-être quelque chose d’assez bon. Je vous l’apporterai avec l’autre. » L’un, L’Erreur, explicitement désigné, est sans doute la pièce présentée au théâtre de l’Odéon, dont le procès-verbal de censure est daté de 1829. « L’autre », dont le sous-titre est le même que celui de L’Erreur, est Le Nouveau genre.

Ces deux courtes pièces, que l’on peut dater sans doute de 1828, sont une satire du drame romantique, dans la droite ligne des cahiers de Poésies de 1824. Mais entre temps, Gérard s’est rallié à Victor Hugo, en faisant une adaptation pour le théâtre de Han d’Islande, dont le manuscrit porte la date de 1829, et surtout en participant activement à la bataille d’Hernani en février 1830. Une telle charge contre les adeptes du « nouveau genre », devenus ses amis, aurait été évidemment mal perçue.

Voir la notice LA CAMARADERIE DU PETIT CÉNACLE.

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LE NOUVEAU GENRE OU LE CAFÉ D'UN THÉÂTRE

La scène se passe dans le café d’un théâtre des boulevards, à Paris.

SCÈNE PREMIÈRE

EUGÈNE, M. DUPRÉ, LES CLAQUEURS

Eugène

Allons, Monsieur Dupré, montrez-vous plus traitable…

De tout cela d’ailleurs, nous conviendrons à table.

Surtout, du second acte, il faut soigner la fin,

Quand la mère et l’enfant se plaignent d’avoir faim,

Que le père répond…

M. Dupré

Je connais le passage.

Eugène

Le parterre, je crois, fera là grand tapage.

M. Dupré

Comment ? Donnera-t-on des billets au bureau ?

Eugène

Eh ! sans doute, Monsieur.

M. Dupré

Ah ! voici du nouveau !

Et la première fois… C’est là, sur ma parole,

Pour un homme d’esprit, une fameuse école.

Alors, ce n’est plus çà.

Eugène

D’où vient donc cet effroi ?

Je ne vois point quel mal…

M. Dupré

Eh bien, moi je le vois !

Apprenez donc, Monsieur, ce dont pour vous je tremble,

Que quatre à cinq sifflets, bien accordés ensemble,

Causent plus de scandale et font plus de fracas

Que toute notre claque.

Eugène

Alors, quel embarras ?

Vous mettez poliment la cabale à la porte.

M. Dupré

La cabale, Monsieur, peut être la plus forte ;

D’ailleurs, tout honnête homme aime assez son repos,

Et, pour être Romain, on n’est pas un héros.

Non, un auteur habile, et qui sait son affaire,

D’avance, de gaillards disposés à bien faire,

Remplit les corridors, les loges, le parquet,

Et ferme les bureaux au sixième billet.

D’un pareil procédé si la foule s’irrite,

Gendarmes à cheval interviennent bien vite ;

Le public, avec perte, est bientôt repoussé…

Et voilà le succès déjà fort avancé :

Alors, nous…

Eugène

Excusez mon peu d’expérience ;

Mais de tout réparer, Monsieur, j’ai l’espérance ;

Venez en attendant, et montons au salon.

______

SCÈNE SECONDE

LES PRÉCÉDENTS, DORANTE

Eugène

Tiens, te voilà, Dorante ? As-tu déjeuné ?

Dorante

Non.

Eugène

Eh bien, monte avec nous.

Dorante

Mais je voulais t’apprendre…

Eugène

J’aurai, le repas fait, le loisir de t’entendre.

Il monte au premier avec Dupré.

______

SCÈNE TROISIÈME

Dorante, seul.

Encore un déjeuner ! Je vois que notre ami

N’entend pas faire ici les choses à demi :

Ce m’est, en tous les cas, une bonne ressource ;

Car, logeant dès longtemps le diable dans ma bourse,

Sans la sienne, peut-être, un destin plus fatal

M’eût dès longtemps aussi conduit à l’hôpital.

Tôt ou tard cependant ce sera mon partage,

Car son avoir s’épuise, et c’est vraiment dommage,

Pour moi comme pour lui : j’ai pourtant quelque espoir`

Sur son drame, qu’ici l’on va jouer ce soir :

C’est bien extravagant, bien niais… mais que dire ?

Pour le siècle où l’on est, il faut savoir écrire.

D’ailleurs, je l’ai prôné, j’ai proclamé partout

L’ouvrage original et du plus nouveau goût ;

À le faire jouer j’ai réussi, de reste,

Et crois avec raison que nul revers funeste

Ne troublera ce soir un succès si flatteur,

Moins pour la gloire encor que pour les droits d’auteur.

______

SCÈNE QUATRIÈME

DORANTE, CARLIN

Carlin

On vous demande en haut.

Dorante

Ah ! j’y suis nécessaire ?

J’y cours.

Il sort.

______

SCÈNE CINQUIÈME

CARLIN, DERCOURT entrant.

Dercourt, s’asseyant.

Ma demi-tasse, avec le petit verre.

Carlin

Bien.

Il sert et retourne au fond.

Dercourt, entendant du bruit au premier.

Le plafond, je crois, est prêt à s’enfoncer ;

Carlin !

Carlin, revenant.

Monsieur ?

Dercourt

Là-haut, donnez-vous à danser ?

Carlin

Non, Monsieur.

Dercourt

Qui peut donc y faire un tel tapage ?

Carlin

Des auteurs.

Dercourt

Des auteurs ? mais c’est un badinage ;

Ce sont des fous, plutôt.

Carlin

Des auteurs ; et des bons !

Mais pour faire ce bruit ils ont bien leurs raisons :

D’un excellent repas ils ont fait la dépense,

Et lui rendent honneur.

Dercourt

Pourquoi cette bombance ?

Carlin

C’est, je crois pour un drame, à ce qu’on dit, bien noir,

Qui sera, près d’ici, représenté ce soir,

Et que pour un chef-d’œuvre en tous lieux on proclame.

Dercourt

Ah ! les petits coquins… ils ont donc fait un drame ?

Carlin

Oui, Monsieur, le sujet est très original,

Et tout promet d’avance un succès colossal :

Voulez-vous voir l’annonce ?

Dercourt

Eh ! j’en aurais envie.

Carlin, lui présentant un journal.

Cherchez dans le journal.

Dercourt

Oh ! diable ! c’est la vie

D’un fameux criminel en cinq jours : l’intérêt

Me semble bien placé.

Carlin

Cela doit faire effet.

Dercourt, lisant.

On doit, le même soir, y voir représentée

Sa naissance, sa vie et sa mort méritée.

Carlin

Est-ce le même acteur qui jouera tout cela ?

Dercourt

Il paraît. Ah ! Carlin, quelle pièce voilà !

Eh ! mais, sais-tu combien ils étaient pour la faire ?

Carlin

Deux.

Dercourt

Par acte ?

Carlin

Pour tout.

Dercourt

C’est extraordinaire !

Carlin

Encor Monsieur Dorante en fit bien peu, je crois.

Dercourt

Eh quoi ! Dorante en est : Maintenant je conçois.

Carlin

Vous le connaissez donc ?

Dercourt

Est-il dans la nature

Quelque lieu qui n’ait vu sa bizarre figure ?

Qu’il n’ait souvent rempli de son fade jargon,

De ses airs suffisants qu’il prend pour du bon ton ?

Assureur dramatique et prôneur littéraire,

Il dit tout sans rien dire et fait tout sans rien faire ;

Flatte de son appui tous les auteurs nouveaux,

Daigne dans les salons produire leurs travaux,

Les présente au théâtre, en prend le bénéfice,

Et même y met son nom… à titre de service.

Carlin

Comme vous l’habillez ! mais croyez cependant

Qu’il possède en ces lieux un fameux ascendant ;

Il est fort en faveur au boulevard du Crime ;

Le second père noble a pour lui de l’estime ;

Avec notre soubrette il va se promener,

Et parfois le souffleur l’invite à déjeuner.

Vous sentez…

Dercourt

Oh ! je sens que son heureuse adresse

A, la main dans le sac, fait recevoir sa pièce.

Carlin

La pièce, c’est trop dire, et je soupçonnerais

Que l’autre jeune auteur en a seul fait les frais ;

Mais tous deux comptent bien, qu’en cas de réussite,

Une grêle d’écus va leur tomber bien vite ;

De son ami Dorante épouse alors la sœur…

Dercourt

Qui ? lui ! se marier ?

Carlin

La clause est de rigueur.

La noce jusqu’ici ne s’est point encor faite,

Le futur étant gueux ainsi que le poète :

Mais cette affaire-là les remettant à flot,

Les accords projetés sont conclus au plus tôt.

Dercourt

Et si la pièce tombe ?

Carlin

Ah ! ce serait terrible !

Mais quand j’y réfléchis… Oh ! non, c’est impossible :

Monsieur Dorante est sûr qu’elle réussira.

Dercourt

S’il en est sûr… d’accord ; et qui vivra verra.

Carlin

Il ajoute d’ailleurs qu’elle est d’un nouveau style

Qui, depuis quelque temps, fait fureur dans la ville ;

Et, tenez, l’autre jour ils en parlaient ici

Devant plusieurs acteurs qui s’y trouvaient aussi.

C’étaient toujours des mots de routine, d’ornières ;

Qu’il était beau d’apprendre à marcher sans lisières ;

Que, du maillot fatal une fois dépouillés,

Ils allaient conquérir, loin des chemins frayés,

Des lauriers incueillis, des fleurs à peine écloses.

Moi qui n’entendais pas toutes ces belles choses,

J’étais resté de là ; mais deux de mes pays,

Des garçons perruquiers, en étaient ébahis…

Dercourt

C’est une autorité.

Carlin

Des gaillards, je vous jure,

Qui se piquent d’avoir de la littérature ;

Et nos auteurs partis, ils nous dirent tout haut :

« D’honneur, ces messieurs-là raisonnent comme il faut ;

On ne peut point douter que, s’ils font un ouvrage,

Leur innovation n’ait un succès… de rage ;

Tout appartient de droit à qui sait tout oser. »

Dercourt

Oui.

Carlin

« Les Français en vain voudront leur opposer

Des pièces, des acteurs et des auteurs caduques,

Ils vont faire la barbe à toutes leurs perruques ! »

Dercourt

Oh ! diable ! je le crois.

Carlin

Le présage est flatteur :

J’en suis vraiment charmé pour notre jeune auteur ;

Car, si cet essai-là lui réussit, je gage

Qu’il va bien tout le jour détacher de l’ouvrage.

Dercourt

Pour cela, j’en réponds.

Carlin

Et voilà ce qu’il dit :

« Je puis, quand ce succès m’aura mis en crédit,

Pour un bon traitement m’arranger à l’année

Avec le directeur… ou même à la journée,

Voyez-vous ? »

Dercourt

Ah ! sans doute.

Carlin

Alors, il en ferait…

Bah ! deux ou trois par mois, même plus…

Dercourt

C’est un fait.

______

SCÈNE SIXIÈME

LES PRÉCÉDENTS, SAINT-ANGE, d’abord endormi, EUGÈNE, descendant.

Eugène

Garçon !

Carlin

Monsieur ?

Eugène

Un mot !

Il lui parle à l’oreille. Carlin sort.

Dercourt, s’approchant de Saint-Ange, que l’exclamation d’Eugène vient de réveiller.

Il faut vous divertir :

Venez-vous avec moi voir la pièce nouvelle

Ce soir ?

Saint-Ange

Non.

Dercourt

Pourquoi donc ! C’est qu’on la dit fort belle.

Saint-Ange

Non, jamais je n’y vais à la première fois.

Dercourt

Toujours original !

Eugène, s’approchant, à part.

Ah ! l’on parle, je crois,

De ma pièce.

Dercourt

Écoutez : elle est bonne ou mauvaise ;

Dans un cas ou dans l’autre, on en use à son aise.

Est-elle bonne ? – on claque, ou mauvaise ? l’on rit,

On raille un peu l’auteur.

Saint-Ange

Ce qui vous divertit

M’irrite : vous avez le talent nécessaire,

En matière de goût, pour ne vous tromper guère.

Dans le monde pourtant vous vous faites l’appui

De tout mauvais auteur, pour vous moquer de lui ;

Mais le jeu trop souvent passe la raillerie,

Et par ce moyen-là, quoique parfois on rie,

Mon cher, c’est un plaisir triste autant qu’incertain

Que celui qui s’exerce aux dépens du prochain.

Vous vous amusez… soit ; mais…

Dercourt

Certes, je m’amuse,

Et non pas aux dépens de celui que j’abuse.

Si son bonheur consiste en cette illusion,

Je l’augmente en sachant flatter sa passion ;

Le détromper serait une chose cruelle ;

Mais quant à cette pièce…

Eugène, se mettant au milieu d’eux.

Elle est, Messieurs, fort belle.

Fort belle, à ce qu’on dit du moins, et j’ai l’espoir

Qu’elle vous plaira fort, si vous allez la voir :

Son auteur m’est connu.

Dercourt, à part.

C’est sans doute lui-même.

Eugène

Un homme comme il faut, que j’estime et que j’aime,

Mais le pauvre garçon ne fait que commencer,

Et d’un peu d’indulgence il ne peut se passer.

Saint-Ange

S’il débute en effet, le public est trop sage,

Le sachant, toutefois, pour n’en pas faire usage.

Eugène

C’est fort bien pour l’honneur ; mais voyez ce que c’est ;

L’auteur de cet ouvrage, au cas d’un grand succès,

Devra se contenter de cent francs par soirée ;

Voilà tout.

Dercourt

La pilule est assez mal dorée.

Je pensais qu’une pièce avait plus de valeur,

Dans ce genre surtout.

Eugène

Non ; pendant la chaleur

On ne donne pas plus. Malgré ce prix modique,

Si tout seul du théâtre on avait la pratique,

On pourrait s’en tirer, mais on a des rivaux :

Chaque jour voit éclore un tas d’auteurs nouveaux.

Tout cela par faveur s’insinue et s’avance,

Écrit dans les prix doux : contre la concurrence

Comment se maintenir avec quelque succès ?

Surtout dans ce temps-ci qu’on fait tout au rabais.

Et, tenez, l’autre jour, en dépit de Dorante,

Un petit écolier aux acteurs se présente ;

C’est qu’il avait en poche un théâtre complet :

Comédie, opéra, vaudeville, ballet,

Drame, pièce à tableaux… Enfin le bon apôtre

Leur proposait le tout à cent francs l’un dans l’autre.

Vous conviendrez qu’alors on est bien empêché,

Et qu’on ne peut tenir contre un si bon marché.

Dercourt

Ces rabais font grand tort.

Eugène

Monsieur, ils sont terribles.

Dercourt

Oh ! oui.

Eugène

Surtout au prix où sont les comestibles.

Dercourt

En effet.

Eugène

Savez-vous ce que coûte un habit ?

Dercourt

Sans doute ; oh ! les tailleurs ne font plus de crédit.

Eugène

Et les locations à présent sont si chères !

Dercourt

Ce sont des gens cruels que les propriétaires !

Eugène

Et si l’on a de plus des enfants, à coup sûr

Il faudra les nourrir de pain sec.

Dercourt

C’est bien dur.

Eugène

Allez donc avec l’autre établir concurrence !

Qu’il ait vingt sous par jour, c’est toute sa dépense.

Dercourt

Contre cela, Monsieur, je ne vois qu’un moyen,

C’est de faire un travail… qui ne ressemble à rien ;

Du neuf, des grands tableaux, de l’horreur… et sans doute

On pourra mettre encor l’écolier en déroute.

Eugène

C’est ce qu’on tente aussi ; la pièce de ce soir

Devra, j’en suis certain, répondre à votre espoir ;

Car, d’après votre goût, on la croirait formée ;

Mais quoi !… l’auriez-vous lue ?

Saint-Ange

Elle est donc imprimée ?

Eugène

Eh ! sans doute, Monsieur.

Saint-Ange

C’est assez hasardeux :

Le succès n’est pas sûr.

Eugène

Oh ! rien n’est moins douteux.

Saint-Ange

Et peut-on demander combien l’auteur l’estime ?

Eugène

Quatre francs.

Saint-Ange

C’est bien cher.

Eugène

Monsieur, c’est du sublime !

Dercourt

Il faut que je l’achète, il le faut.

Eugène

La voici :

Trop heureux de pouvoir vous l’offrir.

Dercourt

Grand merci.

Il parcourt le titre.

Ah! de mettre son nom l’auteur a la prudence ;

Fort bien !

Eugène

En sa faveur cela prévient d’avance.

Dercourt

De cette attention l’on sera très flatté.

Saint-Ange

C’est sans doute de peur que la postérité

À le chercher un jour ne se creuse la tête.

Dercourt, après avoir feuilleté.

La préface obligée a l’air assez honnête.

Eugène

Il faut quand on innove expliquer ses raisons.

Dercourt, feuilletant.

Ah ! c’est trop juste… Enfin, m’y voici ; commençons :

Premier jour. Il fait nuit, la scène représente…

Eugène

Permettez : cette scène est très intéressante ;

Remarquez bien, Messieurs, que ce grand scélérat

Y commence ses jours… par un assassinat.

Dercourt

Par un assassinat ! comment se peut-il faire ?…

Eugène

C’est qu’il cause en naissant le trépas de sa mère.

Dercourt

Oh ! oh !

Eugène

Dès le début, par ce nouveau moyen,

Le public est instruit de ce qu’il est.

Dercourt

Fort bien !

Saint-Ange

Monsieur…

Eugène

Pardonnez-moi : c’est ainsi qu’il doit naître :

Mais ce commencement ne vous plaît pas peut-être ?…

Eh bien ! donc, écoutez ce morceau que voilà :

Il fait à son épouse une scène… c’est là !

Il indique une scène à Dercourt.

Dercourt

Il s’est donc marié ?

Eugène

Vers sa trentième année :

Mais sa petite femme est bien infortunée,

Et, malgré sa douceur, pour quelques vains soupçons,

Le coquin ose encor lui dire des raisons.

Dercourt

Cet homme est très brutal.

Eugène

Caractère farouche !

Dercourt

Un grand, brun…

Eugène

Oui, Monsieur.

Dercourt

Petits yeux, un peu louche ;

De gros favoris noirs, grêlé ?…

Eugène

Vous y voici.

Dercourt

Pauvre femme ! elle doit avoir bien du souci !

Fi ! l’horrible animal !

Eugène

Oh ! Monsieur, je vous jure

Que c’est comme cela que je me le figure.

Dercourt

Voyons ce qu’il lui dit.

Saint-Ange

Pour Dieu ! ne lisez pas.

Je ne saurais souffrir…

Dercourt

Je me tais, en ce cas ;

Mais vous perdez, mon cher, une belle harangue.

Elle, de son côté, ne se mord pas la langue.

Eugène

Non, non, Monsieur.

Dercourt

Oh ! diable ! et je vois en effet,

Qu’elle sait bien le prendre et lui dire son fait.

Saint-Ange, avec impatience.

Mais, avec tout cela…

Eugène

Cette scène est bien forte.

Saint-Ange

Cela suffit, Monsieur.

Eugène

Pleine de feu.

Saint-Ange

N’importe !

Eugène

Ah ! cet acte au public paraîtrait sans défaut,

Si l’actrice y mettait tout le talent qu’il faut.

Et cet endroit encor…

Il prend la brochure.

Permettez que je lise…

Saint-Ange

Eh ! pour Dieu ! laissez-là toute cette sottise.

Eugène

Sottise ! Ah ! c’est trop fort !… Voilà nos gens de goût,

Nos connaisseurs ; il faut qu’il s’en trouve partout.

Sottise ! Ah ! pour le coup, je m’étonne qu’on ose…

Eh ! sur les boulevards on ne voit autre chose !

Sottise ! le public sait pourtant les priser,

Et chaque soir, ici, les claque à tout briser.

Saint-Ange

Eh ! je ne vous dis pas…

Eugène

Ces gens-là me font rire.

Mais que veulent-ils donc ?… On ne peut rien écrire

Qui ne soit déchiré, censuré !…

______

SCÈNE SEPTIÈME

LES PRÉCÉDENTS, DORANTE, descendant.

Eugène

Te voici ?

Pour entendre du neuf, mon cher, viens donc ici ;

Tu ne le croirais pas !… Ce Monsieur se figure

Que la pièce…

Dorante, le tirant à part.

À propos, j’ai demandé lecture

Pour notre autre, tu sais ?

Eugène

Ah ! bien.

Dorante

Est-ce achevé ?

Eugène

Non, ma foi, le sujet n’est pas encore trouvé.

Dorante

Oh ! diable ! tâche donc : c’est demain.

Eugène

Sois tranquille ;

Comme je te disais, Monsieur est difficile :

La pièce de ce soir ne lui plaît pas.

Dorante

Vraiment !

Eugène

Ce n’est qu’une sottise !

Dorante

Ah ! le mot est charmant.

Il a dû t’effrayer ?

Eugène, se rapprochant des autres.

Messieurs, je vous présente

Un homme de mérite.

Dercourt

Ah ! ah ! Monsieur Dorante.

Eugène

Il pourra décider le cas dont il s’agit.

Tout le monde connaît ses talents, son esprit ;

Il écrit fort souvent dans les feuilles publiques ;

Il tient un certain rang parmi nos bons critiques ;

Il saura donc juger…

Dorante

Ce n’est point de refus ;

Mais d’éloges pareils je suis vraiment confus :

Je les mérite peu, tandis qu’en toi j’honore

Un esprit délicat, un talent jeune encore…

Eugène

Enfin…

Dorante

Mais qui décèle un si grand avenir.

Saint-Ange, à part.

Oh ! les voilà partis ! c’est à n’en plus finir.

Eugène

Laissons cela, mon cher ; permets qu’on t’interroge…

Dorante

Pour tant de qualités, c’est un bien faible éloge.

Eugène

Tu me flattes beaucoup, mais parle franchement :

La pièce de ce soir…

Dorante

Est bonne assurément

Eugène

Ah ! très bien.

Dorante

Et de plus sera, sur ma parole,

Un triomphe complet pour la nouvelle école.

Rien pour cela n’y manque : effets, atrocités,

Contrastes, changements, mépris des unités,

Une exécution, trois ou quatre tempêtes,

Quelques assassinats, des danses et des fêtes.

Dercourt

Ah ! que ceci, Monsieur, est d’un merveilleux goût !

Mais il faut…

Dorante

Des voleurs ? On en a mis partout.

Dercourt

Non, il faut que le style à tout cela réponde.

Dorante

Le style ? Eh ! c’est sur lui que le succès se fonde.

Tour à tour effrayant, sublime ou gracieux,

Il fait que le public, par un contraste heureux,

Au langage élégant de Racine et Molière,

Voit succéder l’argot de l’hôtel d’Angleterre ;

Cette variété…

Saint-Ange, prenant son chapeau.

Messieurs, j’ai bien l’honneur…

Dercourt

Quoi ! vous vous en allez ?

Saint-Ange

Je ne suis point d’humeur

À goûter les beautés d’une semblable pièce,

Et j’en laisse le soin à ceux qu’elle intéresse.

Eugène

Mais monsieur votre ami paraît prendre plaisir

À l’écouter.

Saint-Ange

Monsieur aime à se divertir.

Quant à moi, du malheur bien loin que je me joue,

L’auteur d’un tel début me paraît, je l’avoue,

Moins ridicule encor que digne de pitié.

Si pour lui vous avez, Messieurs, quelque amitié,

De grâce, dites-lui qu’il en est temps encore…

Eugène

Comment !

Saint-Ange

Qu’il abandonne un art qu’il déshonore ;

Art divin, mais qui n’offre à de pareils essais

Qu’une chute cruelle ou un honteux succès.

Dorante

Ah ! nous y voilà donc ! Monsieur fait le classique !

Monsieur est un de ceux qu’un préjugé gothique

A, contre nos succès, dès longtemps révoltés ;

Qui, chaque soir, bercés dans les trois unités,

S’endorment saintement pendant la psalmodie

Des quatre mille vers de quelque tragédie ;

Qui se croiraient perdus si des auteurs nouveaux,

Par la diversité d’agréables tableaux,

Osaient les amuser en dépit d’Aristote ?

Ces gens-là sont bien fous, mais leur triste marotte

S’use de jour en jour ; on sait que dans Paris

Du nom de rococos, nous les avons flétris.

Malgré tous leurs efforts, notre nouvelle école

Frappe à coups redoublés sur leur antique idole ;

Et les Parisiens, à la fuir empressés,

Tremblent au seul aspect de ses temples glacés.

Pour nous…

Saint-Ange

Vous ? Quel public vient à vos saturnales ?

Le public des faubourgs et le public des halles,

Parce que de ses rangs vous tirez vos héros :

Il aime à se revoir sur vos hideux tréteaux,

Et, fier de la hauteur où ce genre l’élève,

Il court au boulevard comme on court à la Grève.

Là, quand il devrait voir des traits d’humanité,

Des tableaux et des mœurs pleins de fidélité,

Comme on innove tout dans le siècle où nous sommes,

Il y voit des brigands transformés en grands hommes.

Peut-on…

Dorante

Tous les sujets sont au théâtre ouverts :

Mandrin n’est-il pas beau lorsqu’il brise ses fers ?

Saint-Ange

Le théâtre doit-il mettre en rapport notre âme

Avec des malheureux que l’échafaud réclame ?…

Non ! Les plates horreurs que l’on nous y fait voir

Peuvent nous effrayer, mais sans nous émouvoir…

Non ! Le goût répudie un genre aussi bizarre,

Qu’on croit original, et qui n’est que barbare,

Et toujours osera préférer, malgré vous,

Le style de Racine à l’argot des filous.

Dorante

Ah ! dans un autre temps c’était fort bon à dire,

Mais nous avons détruit son ennuyeux empire ;

Racine est un vieux saint que l’on ne chôme plus,

Et tous ses sectateurs, avec lui confondus,

Vont bientôt, enterrant leur vieille Melpomène,

À sa jeune rivale abandonner la scène :

Sentez-vous quel honneur ce triomphe nous fait ?

Saint-Ange

Oui, de remplacer l’autre elle est digne en effet :

Elle a des échafauds pour attributs funèbres,

Et puise ses héros dans les Causes célèbres.

Quel est son intérêt ? et quels sont ses ressorts ?…

Des meurtres, des combats, de superbes décors,

Des situations qu’un goût bizarre assemble,

Mais qui hurlent d’effroi de se trouver ensemble.

Quant au style… encor mieux ! du pathos, de grands mots,

Des maximes d’honneur qui font pâmer les sots ;

Plus souvent du comique extrait de quelque bagne,

Que toujours du parterre un gros rire accompagne…

Car ce parterre-là, que connaît bien l’auteur,

En sait apprécier le sel, et la valeur.

Dorante

Laissez donc : nous savons attirer le beau monde ;

Une foule choisie en nos foyers abonde ;

Des carrosses nombreux peuvent en faire foi.

Saint-Ange

Parce que le nouveau fait à Paris la loi.

Mais à l’empressement et des uns et des autres,

La girafe a des droits aussi forts que les vôtres.

Chez nous, l’amour du neuf, qu’il soit mauvais ou bon,

Va jusqu’à la fureur, mais n’a qu’une saison :

Tandis que du vrai beau la durée immortelle

Voit un public léger, mais non pas infidèle,

Sur son égarement bientôt ouvrir les yeux,

Et briser les hochets dont il se fit des Dieux.

Eugène

L’image a de l’effet ; mais vous avez beau dire,

La Melpomène antique a perdu son empire ;

Le grand réussisseur, votre Talma n’est plus !

Saint-Ange

Que de talents la France en ce siècle a perdus !

Mais, toujours généreux, le sol qui les dévore

Demeure assez fécond pour en produire encore :

L’art, qui d’un coup fatal n’est jamais à l’abri,

Peut bien se voir frappé, mais non anéanti :

Il retourne bientôt à sa place éternelle,

Et reçoit de sa chute une force nouvelle…

Mais le genre bâtard, maintenant encensé,

Qui le ranimera, quand il aura passé ?

Eugène, vivement.

Il ne passera pas !… tant que dans cette ville

L’originalité gardera droit d’asile :

Vous savez qu’en tout temps elle est chère aux Français !

Saint-Ange

Ainsi, vous prétendez appuyer vos succès

De ce mérite-là ?…

Eugène

Sans doute ! La routine

A de l’art dramatique avancé la ruine ;

Notre genre nouveau, plus noblement lancé,

Évite donc l’ornière…

Saint-Ange

Et trouve le fossé :

D’un aussi noble essor, voilà le but terrible.

L’originalité m’en paraît moins sensible :

Appelez-vous ainsi l’oubli des unités,

Fondements du bon goût si longtemps respectés ?

Eugène

Oui..

Saint-Ange

L’introduction d’ignobles personnages ?…

D’un sujet dégoûtant les hideuses images ?

C’est l’enfance de l’art ; de toutes ces beautés

Même les étrangers sont déjà dégoûtés ;

Vous pillâtes chez eux toute votre richesse.

Eugène

Le reproche est naïf, mais n’a rien qui nous blesse ;

Si l’imitation fut chez nous un abus,

Vos classiques auteurs lui doivent encor plus.

Saint-Ange

Oh ! les sujets traités par leur muse divine

Étaient une conquête et non une rapine ;

Ils ornaient les trésors par le triomphe acquis,

Et savaient franciser ce qu’ils avaient conquis ;

C’est ainsi qu’en tout temps leur sublime génie

Des biens de ses voisins enrichit la patrie :

Et, pendant des succès, hélas ! trop passagers,

Mais qu’on n’oubliera point, de coursiers étrangers

Si la France para ses monuments de gloire,

C’est en les attelant à des chars de victoire !…

Eugène

Fort bien ! mais…

Saint-Ange

Le poète, ainsi que le guerrier,

Par ce noble moyen peut tout s’approprier.

Eugène

Nous l’employons aussi.

Dorante

Eh ! sur cette matière,

C’est assez discourir ; mais, ce soir, je l’espère,

Monsieur, examinant les pièces du procès,

Approuvera le genre en voyant le succès.

À Eugène

Donne donc un billet.

Eugène

Excusez-moi si j’ose

Vous offrir…

Saint-Ange

Grand merci, Monsieur !

Eugène

Quelle est la cause

Qui vous fait refuser un cadeau si léger ?

Saint-Ange

Au théâtre, Monsieur, j’aime à pouvoir juger :

Et je craindrais de trop grever ma conscience

Pour pouvoir l’acquitter : car, par expérience,

Je sais qu’en claquements, ces sortes de billets

Sont payables à vue avec les intérêts.

Adieu, Monsieur !

Il sort.

______

SCÈNE HUITIÈME

DERCOURT, EUGÈNE, DORANTE

Eugène

Adieu !… L’ennuyeux personnage !

Oh ! de tout critiquer, faut-il avoir la rage !…

Mais nous réussirons, du dépit qu’il en ait.

Dercourt

Qui pourrait en douter ? Donnez-moi ce billet ;

Donnez, je cours après cet homme opiniâtre,

Et de force ou de gré je l’entraîne au théâtre

Pour le punir.

Eugène

Ah ! bien.

Dercourt

Au revoir !

À part : Qu’ils sont fous !…

Il sort.

______

SCÈNE NEUVIÈME

EUGÈNE, DORANTE

Eugène

En honneur, j’ai grand’peine à calmer mon courroux !

Sans en avoir rien lu, venir me dire en face

Que ma pièce est mauvaise ! Ah ! voilà qui me passe !

Dorante

J’ai bien vu dès l’abord qu’il n’y connaissait rien.

Eugène

Une pièce à succès qui fournira fort bien

Ses trois mois accomplis.

Dorante

Mon ami, dans la vie,

Toujours un grand mérite est en butte à l’envie.

Tiens, l’autre jour au tir il m’en advint autant :

Quelqu’un, en plein public, me traita d’ignorant.

Eugène

Oh ! oh !

Dorante

Tu sais assez…

Eugène

Ah ! mon cher, je te jure

Que c’est à mon avis la plus plate imposture :

Et tu sus y répondre ?…

Dorante

Avec beaucoup d’esprit ;

Un ancien philosophe a quelque part écrit :

« Si quelqu’un en public vous dit une sottise… »

Eugène

Diable !… il faut…

Dorante

« Taisez-vous !… et prenez une prise. »

Eugène

La maxime est prudente.

Dorante

Et c’est ce que je fis.

Eugène

Retournons-nous là-haut ?

Dorante

Attends : ce que j’en dis,

C’est pour te rassurer, car ta pièce, je pense…

Comment !… ils n’ont voulu te faire aucune avance ?…

Eugène

Pas seulement un liard.

Montrant une pièce de monnaie :

Voilà tout ce que j’ai

Pour faire le garçon.

Dorante

Moi, j’ai reçu congé

De mon propriétaire.

Eugène

Eh qui ? ce vieux classique ?

Dorante

Il veut que je le paye, ou sinon…

Eugène

C’est unique !

C’est là qu’ils en sont tous : fatal amour de l’or !

Dorante

Pour trois ans de loyer que je redois encor.

Eugène

Quelle misère ! Eh bien, mon sort est encor pire

Que le tien, mon ami..

Dorante

Grand Dieu ! que veux-tu dire ?

Eugène

Que si je suis ici, c’est pour bonne raison,

Car déjà les huissiers occupent ma maison.

Dorante

Ils n’ont rien à saisir.

Eugène

Ta remarque est très bonne ;

Mais, restant, ils pouvaient me saisir en personne :

Je pris donc le parti, moi, de les prévenir.

Dorante

Et ta sœur ?

Eugène

Je n’eus point le temps de l’avertir :

Mais je sus m’esquiver avec beaucoup d’adresse,

Chargé, comme Bias, de toute ma richesse.

Dorante

Les mains dans tes goussets…

Eugène

Qui ne contenaient rien.

Je ne pouvais aller, comme tu penses bien,

En ce jour qui me comble et d’argent et de gloire,

À Sainte-Pélagie attendre ma victoire ;

Je vins donc au théâtre où je fis répéter

La pièce que, ce soir, on doit représenter :

Au foyer je trouvai l’assureur dramatique

Que je fis déjeuner avec toute sa clique

À crédit.

Dorante

C’est bien vu : mais crois-tu bonnement,

Qu’il va se contenter d’un repas pour paîment ?

Eugène

Peut-être !

Dorante

N’y crois pas.

Eugène

C’est plus qu’il ne mérite.

En tout cas, je l’ajourne après la réussite.

Dorante

Je doute qu’il le veuille : au reste, ce succès

Se rattache, mon cher, à bien des intérêts.

Eugène

Tous seront contentés, et nos dettes payées ;

Les sommes de demain y seront employées.

Ceci fait, chaque jour rend un nouveau profit,

Les droits et les billets ; surtout le grand débit

De la pièce imprimée. Oh ! mon cher, je t’assure

Que nous allons après faire bonne figure,

Et je veux que bientôt la noce de ma sœur

Avec toi dans Paris me fasse de l’honneur.

Dorante

Peut-être ta fortune, en espoir si brillante,

Ressemble à ces décors dont la toile mouvante

Par l’aspect d’un palais peut bien nous éblouir,

Mais qu’un coup de sifflet va faire évanouir.

Tiens, j’aperçois ta sœur.

GÉRARD DE NERVAL - SYLVIE LÉCUYER tous droits réservés @

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