TEXTES
1824, Poésies diverses (manuscrit autographe)
1824, L’Enterrement de la Quotidienne (manuscrit autographe)
1824, Poésies et poèmes (manuscrit autographe)
1825, « Pour la biographie des biographes » (manuscrit autographe)
15 février 1826 (BF), Napoléon et la France guerrière, chez Ladvocat
6 mai 1826 (BF), Complainte sur l’immortalité de M. Briffaut, par Cadet Roussel, chez Touquet
6 mai 1826 (BF), Monsieur Dentscourt ou le Cuisinier d’un grand homme, chez Touquet
20 mai 1826 (BF), Les Hauts faits des Jésuites, par Beuglant, chez Touquet
12 août 1826 (BF), Épître à M. de Villèle (Mercure de France du XIXe siècle)
11 novembre 1826 (BF), Napoléon et Talma, chez Touquet
13 et 30 décembre 1826 (BF), L’Académie ou les membres introuvables, par Gérard, chez Touquet
16 mai 1827 (BF), Élégies nationales et Satires politiques, par Gérard, chez Touquet
29 juin 1827, La dernière scène de Faust (Mercure de France au XIXe siècle)
28 novembre 1827 (BF), Faust, tragédie de Goëthe, 1828, chez Dondey-Dupré
15 décembre 1827, A Auguste H…Y (Almanach des muses pour 1828)
1828? Faust (manuscrit autographe)
1828? Le Nouveau genre (manuscrit autographe)
mai 1829, Lénore. Ballade allemande imitée de Bürger (La Psyché)
août 1829, Le Plongeur. Ballade, (La Psyché)
octobre 1829, A Schmied. Ode de Klopstock (La Psyché)
24 octobre 1829, Robert et Clairette. Ballade allemande de Tiedge (Mercure de France au XIXe siècle)
21 novembre 1829, Chant de l’épée. Traduit de Korner (Mercure de France au XIXe siècle)
19 décembre 1829, Lénore. Traduction littérale de Bürger (Mercure de France au XIXe siècle)
janvier 1830, La Lénore de Bürger, nouvelle traduction littérale (La Psyché)
16 janvier 1830, Ma Patrie, de Klopstock (Mercure de France au XIXe siècle)
23 janvier 1830, Légende, par Goethe (Mercure de France au XIXe siècle)
6 février (BF) Poésies allemandes, Klopstock, Goethe, Schiller, Burger (Bibliothèque choisie)
13 février 1830, Les Papillons (Mercure de France au XIXe siècle)
13 février 1830, Appel, par Koerner (1813) (Mercure de France au XIXe siècle)
13 mars 1830, L’Ombre de Koerner, par Uhland, 1816 (Mercure de France au XIXe siècle)
27 mars 1830, La Nuit du Nouvel an d’un malheureux, de Jean-Paul Richter (La Tribune romantique)
29 avril 1830, La Pipe, chanson traduite de l’allemand, de Pfeffel (La Tribune romantique)
13 mai 1830 Le Cabaret de la mère Saguet (Le Gastronome)
mai 1830, M. Jay et les pointus littéraires (La Tribune romantique)
juillet ? 1830, Récit des journées des 27-29 juillet (manuscrit autographe)
14 août 1830, Le Peuple (Mercure de France au XIXe siècle)
11 décembre 1830, A Victor Hugo. Les Doctrinaires (Almanach des muses pour 1831)
29 décembre 1830, La Malade (Le Cabinet de lecture )
29 janvier 1831, Odelette, Le Vingt-cinq mars (Almanach dédié aux demoiselles)
14 mars 1831, En avant, marche! (Cabinet de lecture)
23 avril 1831, Bardit, traduit du haut-allemand (Mercure de France au XIXe siècle)
7 mai 1831, Profession de foi (Mercure de France au XIXe siècle)
25 juin et 9 juillet 1831, Nicolas Flamel, drame-chronique (Mercure de France au XIXe siècle)
4 décembre 1831, Cour de prison, Le Soleil et la gloire (Le Cabinet de lecture)
17 décembre 1831, Fantaisie, odelette (Annales romantiques pour 1832)
24 septembre 1832, La Main de gloire, histoire macaronique (Le Cabinet de lecture)
14 décembre 1834, Odelettes (Annales romantiques pour 1835)
1835-1838 ? Lettres d’amour (manuscrits autographes)
26 mars et 20 juin 1836, De l’Aristocratie en France (Le Carrousel)
20 et 26 mars 1837, De l’avenir de la tragédie (La Charte de 1830)
12 août 1838, Les Bayadères à Paris (Le Messager)
18 septembre 1838, A M. B*** (Le Messager)
2 octobre 1838, La ville de Strasbourg. A M. B****** (Le Messager)
26 octobre 1838, Lettre de voyage. Bade (Le Messager)
31 octobre 1838, Lettre de voyage. Lichtenthal (Le Messager)
24 novembre 1838, Léo Burckart (manuscrit remis à la censure)
25, 26 et 28 juin 1839, Le Fort de Bitche. Souvenir de la Révolution française (Le Messager)
13 juillet 1839 (BF) Léo Burckart, chez Barba et Desessart
19 juillet 1839, « Le Mort-vivant », drame de M. de Chavagneux (La Presse)
15 et 16-17 août 1839, Les Deux rendez-vous, intermède (La Presse)
17 et 18 septembre 1839, Biographie singulière de Raoul Spifamme, seigneur des Granges (La Presse)
28 janvier 1840, Lettre de voyage I (La Presse)
25 février 1840, Le Magnétiseur
5 mars 1840, Lettre de voyage II (La Presse)
8 mars 1840, Lettre sur Vienne (L’Artiste)
26 mars 1840, Lettre de voyage III (La Presse)
28 juin 1840, Lettre de voyage IV, Un jour à Munich (La Presse)
18 juillet 1840 (BF) Faust de Goëthe suivi du second Faust, chez Gosselin
26 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort I (La Presse)
29 juillet, 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort II (La Presse)
30 juillet 1840, Allemagne du Nord - Paris à Francfort III (La Presse)
11 février 1841, Une Journée à Liège (La Presse)
18 février 1841, L’Hiver à Bruxelles (La Presse)
1841 ? Première version d’Aurélia (feuillets autographes)
février-mars 1841, Lettre à Muffe, (sonnets, manuscrit autographe)
1841 ? La Tête armée (manuscrit autographe)
mars 1841, Généalogie dite fantastique (manuscrit autographe)
1er mars 1841, Jules Janin, Gérard de Nerval (Journal des Débats)
5 mars 1841, Lettre à Edmond Leclerc
7 mars 1841, Les Amours de Vienne (Revue de Paris)
31 mars 1841, Lettre à Auguste Cavé
11 avril 1841, Mémoires d’un Parisien. Sainte-Pélagie en 1832 (L’Artiste)
9 novembre 1841, Lettre à Ida Ferrier-Dumas
novembre? 1841, Lettre à Victor Loubens
10 juillet 1842, Les Vieilles ballades françaises (La Sylphide)
15 octobre 1842, Rêverie de Charles VI (La Sylphide)
24 décembre 1842, Un Roman à faire (La Sylphide)
19 et 26 mars 1843, Jemmy O’Dougherty (La Sylphide)
11 février 1844, Une Journée en Grèce (L’Artiste)
10 mars 1844, Le Roman tragique (L’Artiste)
17 mars 1844, Le Boulevard du Temple, 1re livraison (L’Artiste)
31 mars 1844, Le Christ aux oliviers (L’Artiste)
5 mai 1844, Le Boulevard du Temple 2e livraison (L’Artiste)
12 mai 1844, Le Boulevard du Temple, 3e livraison (L’Artiste)
2 juin 1844, Paradoxe et Vérité (L’Artiste)
30 juin 1844, Voyage à Cythère (L’Artiste)
28 juillet 1844, Une Lithographie mystique (L’Artiste)
11 août 1844, Voyage à Cythère III et IV (L’Artiste)
15 septembre, Diorama (L’Artiste-Revue de Paris)
29 septembre 1844, Pantaloon Stoomwerktuimaker (L’Artiste)
20 octobre 1844, Les Délices de la Hollande I (La Sylphide)
8 décembre 1844, Les Délices de la Hollande II (La Sylphide)
16 mars 1845, Pensée antique (L’Artiste)
19 avril 1845 (BF), Le Diable amoureux par J. Cazotte, préface de Nerval, chez Ganivet
1er juin 1845, Souvenirs de l’Archipel. Cérigo (L’Artiste-Revue de Paris)
6 juillet 1845, L’Illusion (L’Artiste-Revue de Paris)
5 octobre 1845, Strasbourg (L’Artiste-Revue de Paris)
novembre-décembre 1845, Le Temple d’Isis. Souvenir de Pompéi (La Phalange)
28 décembre 1845, Vers dorés (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste I (L’Artiste-Revue de Paris)
15 mars 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste II (L’Artiste-Revue de Paris)
1er mai 1846, Les Femmes du Caire. Scènes de la vie égyptienne (Revue des Deux Mondes)
17 mai 1846, Sensations d’un voyageur enthousiaste III (L’Artiste-Revue de Paris)
12 juillet 1846 Sensations d’un voyageur enthousiaste IV (L’Artiste-Revue de Paris)
16 août 1846, Un Tour dans le Nord. Angleterre et Flandre (L’Artiste-Revue de Paris)
30 août 1846, De Ramsgate à Anvers (L’Artiste-Revue de Paris)
20 septembre 1846, Une Nuit à Londres (L’Artiste-Revue de Paris)
1er novembre 1846, Un Tour dans le Nord III (L’Artiste-Revue de Paris)
22 novembre 1846, Un Tour dans le Nord IV (L’Artiste-Revue de Paris)
15 décembre 1846, Scènes de la vie égyptienne moderne. La Cange du Nil (Revue des Deux Mondes)
1847, Scénario des deux premiers actes des Monténégrins
15 février 1847, La Santa-Barbara. Scènes de la vie orientale (Revue des Deux Mondes)
15 mai 1847, Les Maronites. Un Prince du Liban (Revue des Deux Mondes)
15 août 1847, Les Druses (Revue des Deux Mondes)
17 octobre 1847, Les Akkals (Revue des Deux Mondes)
21 novembre 1847, Souvenirs de l’Archipel. Les Moulins de Syra (L’Artiste-Revue de Paris)
15 juillet 1848, Les Poésies de Henri Heine (Revue des Deux Mondes)
15 septembre 1848, Les Poésies de Henri Heine, L’Intermezzo (Revue des Deux Mondes)
1er-27 mars 1849, Le Marquis de Fayolle, 1re partie (Le Temps)
26 avril 16 mai 1849, Le Marquis de Fayolle, 2e partie (Le Temps)
6 octobre 1849, Le Diable rouge (Almanach cabalistique pour 1850)
7 mars-19 avril 1850, Les Nuits du Ramazan (Le National)
15 août 1850, Les Confidences de Nicolas, 1re livraison (Revue des Deux Mondes)
26 août 1850, Le Faust du Gymnase (La Presse)
1er septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 2e livraison (Revue des Deux Mondes)
9 septembre 1850, Excursion rhénane (La Presse)
15 septembre 1850, Les Confidences de Nicolas, 3e livraison (Revue des Deux Mondes)
18 et 19 septembre 1850, Les Fêtes de Weimar (La Presse)
1er octobre 1850, Goethe et Herder (L’Artiste-Revue de Paris)
24 octobre-22 décembre 1850, Les Faux-Saulniers (Le National)
29 décembre 1850, Les Livres d’enfants, La Reine des poissons (Le National)
novembre 1851, Quintus Aucler (Revue de Paris)
24 janvier 1852 (BF), L’Imagier de Harlem, Librairie théâtrale
15 juin 1852, Les Fêtes de mai en Hollande (Revue des Deux Mondes)
1er juillet 1852, La Bohême galante I (L’Artiste)
15 juillet 1852, La Bohême galante II (L’Artiste)
1er août 1852, La Bohême galante III (L’Artiste)
15 août 1852, La Bohême galante IV (L’Artiste)
21 août 1852 (BF), Lorely. Souvenirs d’Allemagne, chez Giraud et Dagneau (Préface à Jules Janin)
1er septembre 1852, La Bohême galante V (L’Artiste)
15 septembre 1852, La Bohême galante VI (L’Artiste)
1er octobre 1852, La Bohême galante VII (L’Artiste)
9 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 1re livraison (L’Illustration)
15 octobre 1852, La Bohême galante VIII (L’Artiste)
23 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 2e livraison (L’Illustration)
30 octobre 1852, Les Nuits d’octobre, 3e livraison (L’Illustration)
1er novembre 1852, La Bohême galante IX (L’Artiste)
6 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 4e livraison (L’Illustration)
13 novembre 1852, Les Nuits d’octobre, 5e livraison (L’Illustration)
15 novembre 1852, La Bohême galante X (L’Artiste)
20 novembre 1852, Les Illuminés, chez Victor Lecou (« La Bibliothèque de mon oncle »)
1er décembre 1852, La Bohême galante XI (L’Artiste)
15 décembre 1852, La Bohême galante XII (L’Artiste)
1er janvier 1853 (BF), Petits Châteaux de Bohême. Prose et Poésie, chez Eugène Didier
15 août 1853, Sylvie. Souvenirs du Valois (Revue des Deux Mondes)
14 novembre 1853, Lettre à Alexandre Dumas
25 novembre 1853-octobre 1854, Lettres à Émile Blanche
10 décembre 1853, Alexandre Dumas, Causerie avec mes lecteurs (Le Mousquetaire)
17 décembre 1853, Octavie (Le Mousquetaire)
1853-1854, Le Comte de Saint-Germain (manuscrit autographe)
28 janvier 1854 (BF) Les Filles du feu, préface, Les Chimères, chez Daniel Giraud
31 octobre 1854, Pandora (Le Mousquetaire)
25 novembre 1854, Pandora, épreuves du Mousquetaire
Pandora, texte reconstitué par Jean Guillaume en 1968
Pandora, texte reconstitué par Jean Senelier en 1975
30 décembre 1854, Promenades et Souvenirs, 1re livraison (L’Illustration)
1854 ? Sydonie (manuscrit autographe)
1854? Emerance (manuscrit autographe)
1854? Promenades et Souvenirs (manuscrit autographe)
janvier 1855, Oeuvres complètes (manuscrit autographe)
1er janvier 1855, Aurélia ou le Rêve et la Vie (Revue de Paris)
6 janvier 1855, Promenades et Souvenirs, 2e livraison (L’Illustration)
3 février 1855, Promenades et Souvenirs, 3e livraison (L’Illustration)
15 février 1855, Aurélia ou Le Rêve et la Vie, seconde partie (Revue de Paris)
15 mars 1855, Desiderata (Revue de Paris)
1866, La Forêt noire, scénario
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BF: annonce dans la Bibliographie de la France
Manuscrit autographe: manuscrit non publié du vivant de Nerval
8 mai 1849 — Le Marquis de Fayolle, 2e partie, dans Le Temps, 29e livraison. Pas de feuilleton le 7 mai.
Tandis que les paysans chouans fêtent en beuveries la réussite de leur coup de force, Jean le Chouan soustrait l’abbesse à ses libérateurs et la ramène à sa ferme où se trouve déjà un autre rescapé, l’abbé Huguet. Pendant ce temps, au château de La Rouërie, on décide d’emmener les deux prisonniers à Rennes où ils seront jugés.
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LE MARQUIS DE FAYOLLE.
SECONDE PARTIE.
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CHAPITRE VI.
LA FORÊT DE RENNES. — (Suite.)
Les chouans dételèrent les charrettes, se partagèrent les chevaux, et ne furent pas peu surpris de ne rencontrer que trois ou quatre vieilles religieuses édentées, au lieu d’une centaine de jeunes vierges éplorées, levant les bras au ciel, et implorant leur secours contre la brutalité des bleus.
Les religieuses, protégées par le détachement de dragons, avaient pris les devans et n’étaient plus qu’à une lieue de Rennes, au moment où les chouans avaient attaqué le convoi près du village de Foullard.
La fusillade avait cessé, les bleus étaient en fuite. Le Grand-Fumeur battit le briquet, Chaudeboire ramassa des fougères sèches et mit le feu à un grand champ de genêts, et les chouans se mirent à danser en chantant, à la lueur des flammes qui ondulaient, courbées par le vent.
Qu’on se figure cinq ou six cents paysans en sabots, couverts de peaux de chèvre, la figure barbouillée de suie, dansant et gambadant au milieu d’un nuage de fumée.
Quelques-uns se détachèrent pour aller mettre à contribution les fermes voisines et rapportèrent des volailles, du cidre et du lard fumé.
— Le diable est malin, dit Chaudeboire, qui parfois visait à l’esprit : il a eu soin de garder pour lui les nonnes les plus gentilles et de ne nous laisser que celles qui ne pouvaient plus pécher.
— Chaudeboire ! dit Jean le Chouan d’un ton sévère, il est bon de jouer, mais pas avec ces choses-là...
Puis, se tournant vers les chouans :
— Amusez-vous, les gars, j’ai affaire ailleurs !
Il emplit de paille un grand sac qu’il sangla sur un cheval, se fit apporter un oreiller, sauta lestement sur le cheval, et prit dans ses bras l’abbesse comme il eût fait d’un enfant.
— Passez votre bras dans mon turban (ceinture en coton rayé), madame la comtesse, et ne craignez rien, dit-il en donnant un coup de bâton sur les flancs de son bidet qui partit au grand trot.
En passant par les landes de la Bouëxière et de Marpiré, il peut y avoir environ deux lieues de la forêt de Rennes à la ferme de la Haie, qui appartenait à Jean le Chouan.
La nuit était noire, une pluie froide et pénétrante n’avait pas cessé de tomber. — Brisée par la fatigue et par les violentes émotions de la journée, la comtesse s’était évanouie quand Jean le Chouan arriva devant la porte de sa ferme.
Yvonne jeta de grands cris en reconnaissant son ancienne maîtresse.
— Mon Dieu ! mon Dieu ! s’écria-t-elle, où allons-nous porter madame à présent ? Notre chambre est occupée par ce pauvre M. Huguet !
— Tais-toi ! tais-toi ! dit Jean le Chouan en arrêtant ce dernier nom sur les lèvres de sa femme, de peur qu’on ne l’entendît, — il faut d’abord lui faire reprendre ses sens.
Il alla chercher un grand fauteuil qu’il traîna devant la cheminée, et où l’abbesse, soignée par Yvonne, ne tarda pas à revenir à elle.
— Mon fils ! mon fils !... telle fut sa première parole, qui jeta l’étonnement parmi les assistans.
— Ah ! Jésus ! s’écria avec intention Jean le Chouan. Madame a perdu la raison !... Qu’est-ce que vous faites ici, vous autres ?
Et il mit à la porte les gens de la ferme attirés par le bruit de son arrivée et le singulier spectacle d’une religieuse amenée en croupe sur son cheval.
CHAPITRE VII.
LES PRISONNIERS.
Pendant que ces choses avaient lieu dans la forêt, voici ce qui s’était passé au château de la Rouërie après l’arrestation des conspirateurs. Pendant que les officiers de la garde nationale et de la troupe de ligne délibéraient sur le parti à prendre, le marquis de Fayolle et la Rouërie furent enfermés dans une des chambres du château et deux factionnaires furent placés à la porte.
— Fayolle ! dit la Rouërie en se plaçant debout et les bras croisés devant le marquis, expliquons-nous maintenant... Vous êtes brave... comme moi, je le sais, comment ne vous êtes-vous pas défendu ?
— Etait-ce possible ? demanda Fayolle d’un ton triste.
— Nous serions morts du moins, et tout serait dit... Au lieu de cela, nous aurons à subir les réquisitoires et les interrogatoires de tous ces misérables juges instructeurs, qui cachent le plaisir de la vengeance sous la sévérité du juge...
— C’est vrai !... répondit Fayolle qui avait paru jusque-là, à peu près indifférent à tout ce qui se disait et se faisait autour de lui.
— Ah ! ça, marquis, qu’avez-vous ? demanda La Rouërie impatienté de cette apathie et de cette insouciance dans un moment pareil... Evidemment vous me cachez quelque chose ?...
— Moi... rien...
— Alors, pourquoi ne vous êtes-vous pas jeté comme moi l’épée à la main au milieu des gardes nationaux qui nous ont arrêtés ?
— Pourquoi ? marquis, — parce que depuis hier soir, un profond dégoût de la vie s’est emparé de moi... Parce que tous vos amis, les Bouteville, les Caradeuc et autres, me font pitié. Savez-vous pourquoi ces gens-là vont mettre la Bretagne, la France, peut-être toute l’Europe en feu ?... Pour quelques susceptibilités froissées, pour quelques misérables questions de privilèges et d’intérêt...
— Hé bien ! que ces messieurs, pour défendre leurs privilèges, leur rang, leurs opinions, enrôlent des soldats et se jettent par désespoir dans la guerre civile, je ne vois là que de l’élévation, du courage, et une grande énergie. Il n’y a que les imbéciles et les lâches qui se résignent au rôle de victimes.
— Bon pour ces messieurs, à la rigueur, — mais nous ?...
— Comment ! s’écria La Rouërie au comble de son étonnement — c’est quand le trône est ébranlé, quand Louis XVI est forcé de fuir un peuple d’assassins furieux — c’est au moment d’écraser la révolution et de rétablir un trône de dix-huit siècles que vous me demandez — à quoi bon ?...
— Mais ce grand rôle, est-ce bien à nous qu’il convient ?
— Pourquoi pas ?
— A nous qui sommes allés en Amérique défendre une République contre le principe royal ?... Je vous avouerai, mon ami, que cette contradiction dans notre conduite, paralyse considérablement mon enthousiasme.
— Je vous l’ai dit cent fois, marquis, vous confondez toujours un peuple neuf, primitif, avec une nation civilisée et façonnée depuis des siècles à l’obéissance monarchique. — Il y a là un prestige tout-puissant, dont il faut se servir pour gouverner...
— Si c’était à recommencer, savez-vous, marquis, ce que je ferais ?...
— Que feriez-vous ?
— Je retournerais en Amérique : la guerre civile me fait horreur !...
— Et après tout, c’est un mal nécessaire... Tant pis pour qui l’a provoquée !...
— Du reste, maintenant tout cela ne nous regarde plus.
— Comment cela ?
— Les patriotes ne seraient pas si fous, je pense, que de nous relâcher...
— Eux nous garder !... D’ici à Rennes, nous avons le temps d’être délivrés vingt fois... et puis maintenant nos moyens sont si bien préparés que, nous morts, la contre-révolution pourra couver pendant quelque temps, comme le feu sous la cendre, mais finira toujours par un effroyable incendie !...
Pendant ce temps-là les discussions étaient vives et animées dans le salon du château. Les uns, parmi lesquels était Martinet, voulaient qu’on fusillât à l’instant même, le marquis de Fayolle et La Rouërie dans la cour du château. C’était, disaient-ils, le plus prudent et le seul moyen peut-être de rendre toute évasion impossible.
— Il y a quinze lieues d’ici à Rennes, disait Martinet, et il me paraît impossible que nous ne soyons pas attaqués ce matin aux environs d’Antrain ou cette nuit en arrivant à Rennes.
— Si l’on veut, dit le lieutenant Cadenne, je réponds sur ma tête que je conduirai Messieurs de Fayolle et La Rouërie à la Tour-le-Bât avant la nuit close...
— Combien vous faut-il d’hommes ?
— Un homme de cœur et moi...
— Comment ? crièrent une douzaine de voix en chœur.
— Permettez !... — dit Cadenne, ceci est mon secret ; je ne doute du patriotisme de personne ; seulement, Messieurs, je vous dirai que dix fois déjà j’aurais arrêté La Rouërie si quelqu’un de nous ne l’eût averti...
— Le misérable ! — cria-t-on...
— Nommez-le !... — disaient les autres...
— C’est ma conviction, — dit Cadenne, des preuves, je n’en ai pas... mais nous avons autre chose à faire ici que de chercher des traîtres...
— Oui ! oui ! dit-on de toutes parts…
— Veut-on me confier, dit Cadenne, MM. de Fayolle et La Rouërie ? — je réponds de leurs personnes sur ma vie...
Une acclamation universelle lui conféra les pouvoirs les plus étendus.
Il fit signe à Jouaulst et au sergent Victor (sic pour Vatar), qui rédigeait alors le Journal de Rennes, et qui s’était fait remarquer parmi les ennemis les plus violens de la noblesse et du clergé.
Tous les trois sortirent ensemble.
Un instant après, Jouaulst et un autre garde national galopaient vers Antrain, montés sur les deux chevaux trouvés dans l’écurie du château, pendant que Cadenne et Vatar entraient dans la chambre de Fayolle et de La Rouërie.
Après s’être assuré que les prisonniers n’avaient pas d’armes cachées :
— Messieurs, leur dit Cadenne, le sergent Vatar et moi, nous allons vous conduire à Rennes...
— Seuls ? demanda La Rouërie.
— Seuls, tous deux, — répondit Cadenne, seulement je dois vous prévenir qu’à la première tentative d’évasion, à la moindre résistance — nous vous faisons sauter la cervelle... Marchez devant, Messieurs, et surtout n’oubliez pas une chose...
— Laquelle ?
— Ne vous trompez pas de chemin...
Le marquis de Fayolle prit le bras de la Rouërie et sortit avec lui. — Derrière eux Cadenne et Vatar marchaient le pistolet au poing.
Un quart d’heure après, une petite voiture couverte, enlevée par deux vigoureux chevaux de main, partait d’Antrain et arrivait à Rennes..
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10 mai 1849 — Le Marquis de Fayolle, 2e partie, dans Le Temps, 30e livraison. Pas de feuilleton le 9 mai.
Dans la situation de tension extrême et d’affrontements violents dont le pays est le théâtre, la condamnation à mort de La Rouërie et Fayolle ne fait aucun doute. S’il paraît impossible de les sauver par la force, reste la ruse. C’est ainsi que Gabrielle entre en scène.
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LE MARQUIS DE FAYOLLE.
SECONDE PARTIE.
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CHAPITRE VII.
LES PRISONNIERS. — (Suite.)
La nouvelle de l’arrestation du marquis de Fayolle et de La Rouërie jeta la consternation parmi les royalistes. On se groupait au coin des rues, on s’arrêtait devant les portes pour se conter la fatale nouvelle.
La Rouërie avait paru jusque-là se jouer des arrêtés municipaux et de tous les détachemens envoyés à sa poursuite. Au moment où on le croyait cerné dans son château de Saint-Ouen, on le voyait apparaître dans le Finistère, dans les Côtes-du-Nord ou le Morbihan.
Il était à craindre pour les chefs que cette arrestation ne diminuât le prestige dont l’avait entouré jusque-là la confiance des princes émigrés à Coblentz, ainsi que ses apparitions subites au moment où on le croyait le plus éloigné, son sang-froid dans le danger, et surtout la haute intelligence avec laquelle il avait tendu les fils de cette vaste conspiration.
D’un côté, les malheureuses tentatives des royalistes du Finistère et de l’Ardèche commandaient la plus grande circonspection. Quarante-trois insurgés venaient d’être conduits dans les prisons de Quimper.
Du Faillant, qui s’était mis à la tête de deux mille paysans, étant proclamé gouverneur du Bas-Languedoc et des Cévennes, avait été massacré et ses troupes étaient dispersées.
Mais aussi, l’irritation causée par les prêtres qui refusaient le serment à la Constitution, par les couvens que l’on faisait fermer, avait produit dans les campagnes une profonde agitation dont il fallait profiter.
Les Prussiens venaient d’envahir la Champagne.
Le Poitou, la Bretagne et la Vendée n’attendaient qu’une occasion... La contre-révolution grondait sourdement et tout annonçait une formidable explosion.
De leur côté, les administrations municipales développèrent sur tous les points une activité, un courage et une énergie admirables.
Dans les chefs-lieux, dans les sous-préfectures, dans toutes les petites villes, les gardes nationales s’organisèrent, des clubs se fondèrent, l’idée révolutionnaire rayonna sur tous les points et au fanatisme religieux opposa l’enthousiasme patriotique qui pouvait seul sauver la France.
C’était à Rennes surtout que les haines étaient vives, que les partis étaient violens... On se mesurait de l’œil ; on se montrait du doigt. Les menaces et les provocations s’échangeaient chaque soir, derrière le Thabor ou sur les buttes Saint-Cyr, des duels avaient lieu entre la bourgeoisie et la noblesse.
Cependant, l’exécution encore récente d’Elliot, de Malouvre et de Mme de Farcy, avait causé parmi les mécontens une vive impression de crainte et donnait les inquiétudes les plus graves sur le sort des prisonniers ; et, en outre, on annonçait l’arrivée prochaine de deux commissaires envoyés en Bretagne par Danton avec des pouvoirs illimités.
D’ailleurs, MM. de Fayolle et La Rouërie étaient deux hommes trop dangereux pour que la révolution encore timide et ombrageuse ne prît pas à leur égard les mesures les plus sévères.
Ce qui les menaçait, c’était un jugement du tribunal révolutionnaire, — l’échafaud, — la mort dans les vingt-quatre heures... et par suite la consternation de leurs amis, — l’anéantissement du parti tout entier...
Il fallait donc les sauver... et les sauver à tout prix.
Pour cela deux moyens se présentaient :
La force ou la ruse...
La force, il n’y fallait pas songer.
A la moindre menace, à la première tentative d’insurrection, le redoutable tribunal s’assemblerait, et, quelques heures après, leurs têtes tomberaient sur la place publique...
Restait la ruse...
CHAPITRE VIII.
GABRIELLE.
Devant une haute cheminée, dont le chambranle, supporté par deux élégantes colonnettes de marbre blanc, enroulées de festons et d’arabesques dorés, était enjolivé d’une mosaïque de marbres précieux, encadrée dans des moulures également dorées, — le comte de Fayolle, étendu dans un grand fauteuil, les pieds sur les chenets, les mains croisées sur le ventre, était plongé dans cette béate somnolence que procurent une digestion facile et un bon feu.
Pendant que le marquis son frère jouait follement sa tête dans la conspiration de la Rouërie, le comte avait quitté son château d’Epinay qui l’exposait aux visites trop fréquentes des chouans et des bleus ; car amis et ennemis étaient également à craindre dans ces malheureux temps. Et si les chouans ne se retiraient guère d’une maison sans l’avoir pillée, messieurs les gardes nationaux ne se faisaient pas faute non plus de mettre les fermes à contribution et ne se privaient de rien qui leur fût agréable.
Le comte ne sortait que le plus rarement possible de l’hôtel de son frère et évitait avec le plus grand soin tout ce qui aurait pu non seulement le compromettre, mais encore le faire classer dans tel ou tel parti ; son esprit sceptique et voltairien lui avait valu l’estime et la considération de la haute bourgeoisie, qui le regardait comme un homme bien au-dessus des préjugés de sa caste.
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11 mai 1849 — Le Marquis de Fayolle, 2e partie, dans Le Temps, 31e livraison.
Le comte de Fayolle, père de Gabrielle, est resté prudemment hors des partis. Il reçoit donc Péchard sans enthousiasme. Sauver son frère, mais commeent ? Péchard explique son plan : seule Gabrielle a le pouvoir d’agir sur Georges.
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LE MARQUIS DE FAYOLLE.
SECONDE PARTIE.
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CHAPITRE VIII.
GABRIELLE. — (Suite.)
Par égard pour son frère, la noblesse lui pardonnait son égoïsme, et l’abandon qu’il faisait de son parti.
Dans l’embrasure d’une fenêtre, à l’autre bout du salon, Gabrielle travaillait à un ouvrage de tapisserie.
La nuit commençait à tomber, — les rues étaient désertes et mal éclairées par quelques réverbères qui fumaient de loin en loin...
Un homme ouvrit la porte du salon, et entra sans se faire annoncer.
Le comte fit un mouvement de surprise et de mauvaise humeur qu’il ne chercha pas à dissimuler.
— C’est vous Péchard !... dit-il d’un ton plus impérieux que poli, — que demandez-vous ?...
Péchard s’approcha de Gabrielle, la baisa au front et roula un fauteuil auprès de celui du comte.
— Je suis venu vous voir, monsieur le comte, pour une affaire de la plus haute importance, — dit Péchard en baissant la voix.
— Vous a-t-on vu entrer ? — demanda le comte en regardant si personne ne les écoutait.
— Je ne le pense pas, monsieur le comte. Je suis entré par la petite porte du jardin qui donne sur la Motte.
— Cette porte était donc ouverte ? demanda le comte, visiblement inquiet.
— Probablement par oubli ou par négligence du jardinier.
— Tous ces airs de mystère sont dangereux par le temps qui court, et ne me conviennent pas du tout. Tenez-vous le pour dit, l’abbé. Je ne conspire pas, moi, et je ne veux rien avoir de commun avec ceux qui sont mêlés à ces affaires-là.
— Aussi, monsieur le comte...
— Il n’y a plus de M. le comte... Les titres de noblesse sont abolis. Je m’appelle M. de Fayolle, ou plutôt Fayolle tout court. Je ne connais qu’une chose, sachez-le bien, — le respect aux lois et à la Constitution.
— Cependant, il y a des circonstances...
— Pas de discussion, l’abbé... vous chouannez, je le sais... si vous êtes arrêté ici, je le serai peut-être avec vous ! Ainsi, dites-moi vite le motif qui vous amène.
— Vous savez que M. de La Rouërie et votre frère ont été arrêtés la nuit dernière ?...
— On me l’a dit... mais que voulez-vous que j’y fasse ?
— Les sauver !
— Les sauver, moi !... Vous êtes fou, l’abbé... je ne suis pas trop en faveur parmi ces messieurs les patriotes, et même dans ce cas, ce serait vouloir les perdre et se perdre avec eux, que de chercher à les tirer de là !...
— J’ai un moyen... dit Péchard en se rapprochant du comte.
— Gardez votre moyen... je ne veux pas le connaître... je ne veux, songez-y bien, me fourrer pour rien au monde dans toutes vos conspirations.
— Mais pourtant, Monsieur, vous ne pouvez pas abandonner votre frère ?
— J’ai un frère, mon Dieu ! je le sais bien... et même un frère que j’aime beaucoup... mais j’ai une fille aussi, Monsieur... Je suis père de famille, et avant tout, je me dois au bonheur de mon enfant.
— Sans doute, Monsieur, sans doute... mais le moyen...
— Et s’il est découvert votre moyen, je serai regardé comme complice, arrêté, jugé et exécuté comme tel... Si ces messieurs m’avaient fait l’honneur de me consulter, je leur aurais conseillé de ne se point mêler de tout cela... maintenant c’est fait.
— Oh ! leur sort n’est pas douteux... demain ils seront interrogés, jugés, exécutés, et leurs biens confisqués au profit de la nation...
Le comte se dressa dans son fauteuil et s’assura que personne ne les écoutait.
— Si vous renvoyiez Gabrielle, Monsieur, nous pourrions peut-être causer plus à l’aise.
— Non... — dit le comte, cela aurait un air de mystère que les domestiques pourraient remarquer... Vous êtes très compromettant, Péchard ; mais il y a peut-être moins de danger devant ma fille... parlez bas... quel est votre moyen ?...
Un mot tombé dans la conversation avait subitement modifié ses sentimens à l’égard de son frère.
— Mon moyen est excessivement simple, dit l’abbé. Vous rappelez-vous un grand jeune homme que Huguet vous amenait assez souvent au château d’Epinay ?
— Monsieur Georges... — dit le comte avec un mouvement de lèvres ironique — mais quel rapport ?...
— Ce monsieur Georges était, vous le savez, amoureux de Gabrielle.
A ces mots, la jeune fille releva vivement la tête et chercha à prêter un sens aux quelques mots qui arrivaient à son oreille.
— Je m’en souviens.
— Il est aujourd’hui capitaine de la garde nationale.
— Eh bien ?... — demanda le comte qui ne comprenait pas encore.
— Le jour qu’il sera de service, nous mettons de garde une douzaine de gardes nationaux qui nous sont dévoués ; — si l’on peut le tenir éloigné du poste, à la tombée de la nuit, — un des sous-officiers le remplacera et mettra un des nôtres en sentinelle dans les jardins de la Tour-le-Bât...
— Mais qui pourra le retenir, précisément à cette heure-là ?
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13 mai 1849 — Le Marquis de Fayolle, 2e partie, dans Le Temps, 32e livraison. Pas de feuilleton le 12 mai.
Il suffira d’une entrevue accordée par Gabrielle à Georges, durant laquelle les conjurés pourront faire échapper les deux prisonniers. En effet, le lendemain, Georges, en compagnie de Martinet, se présente chez le comte de Fayolle devenu suspect du fait de sa parenté avec le marquis. Pensif, Georges songe à tous les événements qui se sont déroulés autour de lui, aux secrets qu’on lui a cachés, à la conduite de Gabrielle, quand il se trouve brusquement face à face avec elle. La conversation s’engage, difficile.
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LE MARQUIS DE FAYOLLE.
SECONDE PARTIE.
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CHAPITRE VIII.
GABRIELLE. — (Suite.)
— Qui pourra retenir Georges précisément à cette heure-là ? répéta Péchard. — C’est précisément mon moyen.
— Voyons...
L’abbé, par un mouvement de tête, indiqua la jeune fille, qui commençait à s’apercevoir qu’on s’occupait d’elle.
— Gabrielle ! dit le comte surpris.
— Qui veut la fin, veut les moyens, — reprit Péchard, — et n’oubliez pas qu’il s’agit de sauver votre frère et... sa fortune.
— Sa fortune ?
— Oui, la fortune de la famille... qu’il possède en qualité d’aîné.
— Eh bien ! que faut-il faire ? dit vivement le comte.
— Voici mon plan, sauf à modifier ce qui ne vous conviendrait pas. Pour éviter tout soupçon de complicité, vous aurez soin d’annoncer que vous partez pour votre château d’Epinay ou pour un voyage quelconque. Pendant ce temps-là, Gabrielle, restée seule dans votre hôtel, pourrait avoir une entrevue avec ce Georges, qui se trouverait là par un hasard que je me charge d’arranger.
Gabrielle tressaillit ; bien qu’elle n’entendît pas l’entretien, le nom de Georges était arrivé jusqu’à elle, et ce mot réveillait tout un passé que sa raison condamnait, mais que son cœur n’avait pu complètement oublier.
— Mais, dit le comte, laisser Gabrielle seule...
— Je serai là, Monsieur... je serai là, dit Péchard.
— Je ne promets rien, dit le comte en se levant ; je verrai... je réfléchirai... Soyez bien persuadé que je ferai tout ce qui sera en mon pouvoir pour sauver mon malheureux frère...
Le comte de Fayolle se promena dans la chambre à grands pas, absorbé par sa méditation. Pendant ce temps, Péchard prit une chaise et alla s’asseoir auprès de Gabrielle.
— Ma chère enfant, dit-il en pressant doucement les mains de la jeune fille, et l’enveloppant d’un regard velouté :
— Vous savez l’affreux malheur qui nous est arrivé ?
— L’arrestation de mon oncle.
— Et du marquis de La Rouërie... Il faut que vous nous aidiez à les sauver.
— Moi ! s’écria Gabrielle en le regardant avec la plus grande surprise.
— Vous, mon enfant... Celui de qui relève tous les empires, dit Péchard avec un accent prophétique, se plaît souvent à choisir les caractères les plus faibles pour l’accomplissement de ses projets.
— Pouvez-vous me dire au moins ce que j’aurai à faire ? demanda Gabrielle en rougissant ; — à quelques paroles interrompues de la conversation de Péchard avec son père, elle avait compris que le nom de Georges était en jeu ; — maintenant elle pressentait déjà la vérité.
— Nous ne vous demanderons rien que de très simple et de très facile, répondit l’abbé en souriant. Il s’agit tout bonnement d’une entrevue avec M. Georges.
Gabrielle baissa les yeux avec embarras.
— C’est un malheureux enfant que les mauvais conseils ont égaré… les volontés de la Providence sont impénétrables, peut-être vous a-t-elle choisie pour ramener à elle cette brebis égarée...
— Mais, l’abbé, que dire pendant cette entrevue... ? Vous savez que je n’entends pas grand-chose à la politique...
— Allons, dit Péchard en riant, — vous parlerez d’autre chose... mais soyez sans crainte, je ne vous laisserai pas souffrir longtemps ; la Tour-le-Bât est en face, et au signal convenu j’accourrai vous délivrer...
Péchard déposa un baiser sur le front de la jeune fille et sortit en la laissant émerveillée du rôle que la Providence lui réservait dans les destinées de la monarchie française...
Le comte passa dans la chambre qu’avait occupée son frère, fit un triage de ses papiers et jeta au feu ceux qui auraient pu le compromettre.
CHAPITRE IX.
LA SÉDUCTION.
Le lendemain, vers sept heures du soir, Martinet, que son fougueux patriotisme avait fait nommer premier syndic de la commune de Rennes, — s’arrêta à la porte de l’hôtel Fayolle, escorté par un peloton de douze gardes nationaux commandés par le capitaine Georges.
Quelques personnes se groupèrent autour. — L’arrestation de La Rouërie était pour tout le monde un fait de la plus haute importance.
Au nom de la loi, la porte s’ouvrit :
— Capitaine ! s’écria Martinet, placez vos sentinelles à toutes les portes et suivez-moi !... Nous allons pénétrer tous deux dans l’antre de la conspiration.
Georges et Martinet montèrent l’escalier et entrèrent dans le salon.
C’est avec une profonde émotion que Georges avait franchi le seuil de l’hôtel Fayolle.
Il était encore préoccupé de l’étrange révélation que Péchard lui avait faite de sa naissance, au moment où il faisait fermer le couvent de la forêt de Rennes. Depuis ce jour et à la suite de l’attaque imprévue qui avait dispersé les gardes nationaux, il n’avait pas revu cet homme. Celle qu’on disait être sa mère avait disparu aussi dans cette nuit fatale, et tout cela avait passé dans son esprit comme un rêve.
La comtesse de Maurepas, sa mère !... Pourquoi ce mystère caché au fond d’un cloître ?
Pourquoi l’avait-on, lui, victime innocente, repoussé comme un remords, rejeté comme un crime ?...
Pourquoi Huguet, son ami, son père, lui avait-il caché avec tant de soin le secret de sa naissance ? Pourquoi devait-il ce bienfait à Péchard, l’ennemi de Huguet, le sien... A l’homme qui le premier avait si cruellement froissé son amour-propre et brisé ses premiers rêves de bonheur.
Georges aimait mieux penser que Péchard l’avait complètement trompé dans un but qu’il ignorait. Le sort de Huguet l’inquiétait aussi... Quelle complication dans tous ces événemens !... Mais telle est la vie en temps de révolution.
Pendant les deux années qu’il avait passées à Paris, — depuis la fin de 1789 jusqu’au commencement de 1792, il s’était jeté dans le mouvement révolutionnaire avec toute la fougue de ses vingt-deux ans, et il accueillait avec avidité toutes les idées qui pouvaient flatter son orgueil blessé...
A son retour à Rennes, il avait trouvé la ville nettement divisée en deux camps ennemis, et l’abîme qui les séparait se creusait chaque jour davantage.
En pensant à Gabrielle, il se rappelait sa présence sur la place des Cordeliers pendant la première lutte des étudians contre la noblesse, — espèce de prologue de ce drame dont les actes se déroulaient avec de si terribles péripéties... Il ne pouvait plus être qu’un ennemi pour elle : son nom devait lui faire horreur. — Lui-même sentirait alors que les haines étaient trop vives pour qu’un rapprochement fût possible.
Dans les premiers jours qui suivirent son retour de Paris, il avait quelque temps cherché à voir Gabrielle, mais soit par une indifférence réelle, où la jeune fille n’avait pas fait semblant de le reconnaître, il s’était tenu à l’écart. — Trop fier pour paraître malheureux.
Au moment de la revoir, son premier amour, ses premières promenades à la ferme de Jean le Chouan, ses rêveries sur le bord de l’étang d’Epinay, — sa dernière entrevue chez les demoiselles de Renac, se retraçaient vivement à son esprit et ressuscitaient tout à coup comme les blancs fantômes de sa première jeunesse. Et malgré sa haine contre la noblesse, il se sentait attendri en pensant à la générosité de Gabrielle qui l’avait aimé quand tout le monde le repoussait.
C’était le hasard que Péchard avait prévu la veille, quand Georges venait d’être requis par le procureur-syndic pour une visite domiciliaire à l’hôtel Fayolle, au moment où il allait relever le poste de la Tour-le-Bât.
Martinet se faisait ouvrir toutes les portes, scellait les meubles et examinait tous les papiers avec la plus scrupuleuse attention. Pendant ce temps-là, Georges était resté seul dans le salon. Il réfléchissait à toute cette série d’événemens par suite desquels il se trouvait, par la force et par la volonté de la loi, chez cet homme qui l’avait si cruellement humilié. Mais, embarrassé quelque peu de sa position, il se rassurait en pensant qu’il avait vu le matin le comte partir à cheval pour son château d’Epinay.
Une porte du fond s’ouvrit, Gabrielle entra. Quelle brusque apparition ! Georges se sentit trembler de tous ses membres, un nuage passa sur ses yeux, il s’inclina gauchement et ne sut pas bégayer une parole.
En le voyant si timide et si embarrassé, Gabrielle, un instant émue, reprit toute son assurance.
Elle jeta sur lui un regard, un seul, et ce regard suffit pour lui découvrir bien des choses.
D’abord, que le jeune homme avait fort bonne mine sous le costume de garde national.
Il portait l’habit bleu de roi, à revers et paremens écarlates, les basques retroussées sur les poches, la culotte de drap blanc, avec des guêtres de toile montant jusqu’aux genoux ; le chapeau à trois cornes et la queue poudrée.
Ensuite que, depuis près de trois ans, Georges était bien changé : ce n’était plus ce petit jeune homme, humble et soumis, tremblant de mal faire, et implorant la faveur d’un regard. Il portait la tête haute sans forfanterie, et son œil brillant annonçait cette audace et cette énergie à laquelle le cœur d’une femme ne résiste presque jamais.
— Monsieur, dit Gabrielle avec un léger tremblement dans la voix, j’étais loin de m’attendre à l’honneur de votre visite.
— C’est un devoir que je remplis, Mademoiselle, balbutia Georges.
— Venez-vous pour nous conduire aussi en prison ? demanda la jeune fille avec une légère nuance d’ironie.
— Je ne fais qu’obéir, Mademoiselle ; ici, c’est le procureur qui commande. On a ordonné une visite domiciliaire dans votre hôtel ; je suis venu placer des sentinelles, et je rentre au poste.
Il salua et fit un mouvement pour sortir.
— Où allez-vous ? demanda Martinet d’un ton sévère.
— Vous savez que je suis de service à la Tour-le-Bât, et que j’ai des sentinelles à placer, répondit Georges.
— Et ici... dit Martinet en baissant la voix : c’est peut-être la patrie que nous allons sauver... Je viens de mettre la main sur des papiers de la plus grande importance... Nous sommes sur les traces d’un nouveau complot. Les papiers des Fayolle et de la Rouërie sont là... Il y a peut-être des chouans et des prêtres cachés ici, dans les caves ou dans les greniers... Il n’y a pas à tourner la tête... Surveillez cette partie de l’hôtel ; je vais continuer mes perquisitions de ce côté... Le service avant tout... On vous remplacera au poste par un lieutenant ou un sous-officier... En attendant, attention ; ayez les yeux et l’oreille au guet. Si j’ai besoin de vous, je vous appellerai.
Il fit à Gabrielle un salut assez cavalier et sortit, refermant la porte qui était restée ouverte !...
Georges et Gabrielle se trouvaient ainsi condamnés à un tête à tête forcé.
La poitrine de la jeune fille ondulait doucement et annonçait une émotion dont Georges pouvait s’attribuer tout l’honneur.
— J’étais bien loin de prévoir surtout, Mademoiselle, qu’après deux ans d’absence, nous nous retrouverions dans une aussi fâcheuse circonstance.
— A qui la faute ? demanda Gabrielle, en essayant son premier sourire.
— Après tout, dit Georges, c’est peut-être un bonheur...
— Ah ! dit Gabrielle... pourquoi ?...
— Que de fois, reprit Georges avec un sentiment qui frisait la naïveté, je vous ai souhaitée pauvre et malheureuse !
— Vous devez être heureux en ce cas, car vous me retrouvez bien à plaindre.
— Vous, Gabrielle !
— Cela vous étonne, Monsieur ?... mon oncle est arrêté, et mon père et moi nous pouvons être jetés en prison d’un instant à l’autre, tous mes parens et amis sont proscrits et persécutés par vous et les vôtres... Il ne me reste pas un ami qui me tende la main, pas un bras sur lequel je puisse m’appuyer... Dites-moi, monsieur Georges, me trouvez-vous assez malheureuse avec cela ?...
— C’est la faute des temps, Mademoiselle, mais il ne dépend pas de moi...
— Et quand cela serait ?... à quoi bon se compromettre ? le malheur est contagieux... Qu’importe que nous mourions ? Il ne faut pas que votre patriotisme puisse être soupçonné...
— Que voulez-vous donc, Mademoiselle ? » dit Georges en la regardant avec surprise..
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16 mai 1849 — Le Marquis de Fayolle, 2e partie, dans Le Temps, 33e et dernière livraison.
La conversation entre Gabrielle et Georges se poursuit, de réticences en demi-aveux... et le feuilleton, malgré l’annonce d’une « suite à demain », s’arrête là. Le titre apparaît dans le projet d’Œuvres complètes élaboré par Nerval peu de temps avant sa mort, sous la rubrique « feuilleton » avec la mention « 2 vol. ». Peut-être songeait-il à lui donner une suite sous le titre : Le Citoyen-marquis, qui figure dans ce même projet sous la rubrique « sujets »
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LE MARQUIS DE FAYOLLE.
SECONDE PARTIE.
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CHAPITRE IX.
LA SÉDUCTION.
— Je veux dire, monsieur Georges, reprit Gabrielle, avec un air de dignité charmante, que votre conduite vis-à-vis de nous a été d’une réserve, d’une prudence extrême...
— J’ai dû obéir à la nécessité, Mademoiselle.
— Comment, donc ! mais c’est très beau cela : cependant je crois me rappeler qu’autrefois...
— Autrefois, Mademoiselle, nous avons tenu ensemble des discours d’enfans, que j’ai eu l’indiscrétion de vous rappeler, mais dont votre raison a dû repousser le souvenir.
— Et qui peut vous faire supposer cela, Monsieur ?
— L’expérience...
— Comment ?
— Oui, l’expérience, Mademoiselle, car je sais que le mépris pour le peuple est écrit dans le cœur de tous les nobles...
— J’aurais cru que notre dernière entrevue avait dû vous laisser de moi une toute autre opinion.
— Les temps sont bien changés, Mademoiselle !
— N’y a-t-il que les circonstances de changées, Monsieur ? demanda Gabrielle avec un fin sourire.
Georges commençait à se trouver embarrassé de cette guerre de coups d’épingle. — Il arrivait à comprendre que sa réserve et sa fierté excessive pouvaient bien jusqu’à un certain point lui donner une apparence d’ingratitude. Gabrielle sentit toute la supériorité qu’elle venait de prendre par la manière dont elle avait engagé la conversation.
— Au reste, Monsieur, — reprit-elle après un instant de silence, ce n’est pas un reproche que je veux vous faire ; — mon père m’a souvent dit que dans les temps de révolution, il fallait constamment se tenir dans la plus grande réserve, même avec ses meilleurs amis. Mais pourtant, je crois que si j’avais appris l’arrestation de personnes qui vous soient chères, — si j’avais eu à craindre pour vous la persécution commencée contre vos amis — j’aurais au moins cherché à vous tranquilliser...
— Comme moi, Mademoiselle, vous auriez compris les exigences de ma situation, et vous n’auriez pu que déplorer les malheurs de la nécessité... Je ne suis qu’un soldat, et je n’ai qu’une chose à faire, suivre aveuglément la consigne qu’on m’a donnée.
— Vous n’êtes qu’un soldat, dites-vous ?... et si vous étiez moins que cela encore ?
— Quoi donc, mademoiselle ?
— Un instrument dont les méchans se servent pour nous frapper.
— Votre douleur est légitime, Mademoiselle, et je comprends l’amertume de vos paroles ; cependant croyez bien que s’il dépendait de moi de vous sauver, je ferais tout pour cela...
— J’en suis bien persuadée, Monsieur, dit Gabrielle avec un regard et un sourire pleins d’une amère moquerie.
Georges se leva et salua froidement, il lui semblait que Martinet s’oubliait un peu dans ses recherches... il jeta un regard sur la pendule — elle était arrêtée...
Gabrielle suivit la direction du regard de Georges et un sourire imperceptible effleura ses lèvres... puis, ses yeux glissèrent sur la glace placée au-dessus de la cheminée — et elle se trouva ravissante ce soir-là...
La discussion qu’elle venait de soutenir avec tant de verve et de causticité avait donné à son regard une séduction irrésistible, — ajoutez à cela une légère dose de vanité que lui donnait l’importance du rôle qu’on lui avait confié...
— Auriez-vous l’obligeance de sonner un de vos gens, Mademoiselle ? dit Georges en voyant que la porte du salon restait fermée.
— Si quelques paroles désobligeantes m’ont échappé, croyez bien, Monsieur, que j’en suis désolée...
— Quoiqu’elle doit être pénible pour vous, Mademoiselle, cette entrevue est, je vous assure, bien précieuse pour moi...
— Pour vous, Monsieur ?
— Elle me permet de vous dire que je n’oublierai jamais avec quelle générosité vous aviez consenti à partager mon amour...
— Vous l’avez dit, Monsieur, nous étions si jeunes alors... »
Un domestique entra.
— Demandez à M. Martinet s’il peut passer au salon ? dit Gabrielle.
Le domestique s’inclina sans répondre et sortit.
— Voilà probablement la dernière fois que nous nous trouvons seuls ensemble, Monsieur, dit Gabrielle avec une inflexion de voix dans laquelle on pouvait voir poindre comme un regret.
— Je le crains, Mademoiselle, répondit Georges en comprimant un soupir qui soulevait sa poitrine.
— Si je ne craignais d’abuser d’un temps précieux, consacré à la patrie, je désirerais vous faire une courte observation.
— Je vous écoute, Mademoiselle.
— Autrefois, monsieur Georges, vous m’avez aimée. Oh ! je le sais : trop de fois je me suis rappelé nos courses dans les prairies, nos promenades à la ferme. Je gagerais même que vous avez conservé le souvenir du serment que j’ai fait depuis d’attendre... deux ans... avant de consentir au mariage que m’imposait mon père.
— Mademoiselle, dit Georges en frémissant.
— Il est vrai que les circonstances y ont aidé un peu... par le temps qui court, on ne pense guère à se marier...
Martinet entra.
Georges ne put réprimer un mouvement de contrariété.
En revoyant Gabrielle, il s’était bien promis de fermer l’oreille à ses douces paroles, l’œil à ses longs regards, son âme tout entière à un amour impossible, et voilà que, tout à coup, à quelques mots magiques, à l’évocation de quelques souvenirs d’enfance, il se trouvait attendri et demeurait agité.
— Patience, mon cher ami... — dit Martinet à l’oreille de Georges, je viens de découvrir une correspondance d’Angleterre qui contient les révélations les plus curieuses... dans cinq minutes, je suis à vous...
— Faites, — dit Georges, mais n’oubliez pas que je vous attends.
— Le salut de la patrie avant tout, dit Martinet en sortant.
— Je suis désolé de ce qu’on vous a interrompue, Mademoiselle, dit Georges quand ils furent seuls.
De la main, Gabrielle lui montra un siège et s’assit en face de lui.
— Il y a, dit-elle, des circonstances graves et importantes d’où dépend le bonheur ou le malheur de toute la vie... Le marquis de Fayolle, mon oncle, est en prison, demain il sera jugé et condamné peut-être...
Georges ne répondit pas, mais son silence disait assez que les craintes de Gabrielle étaient fondées...
— Il y aura du sang entre nous, du sang versé par vos amis... Georges, y avez-vous songé ?...
Georges la regarda fixement pour chercher à lire au fond de sa pensée....
(La suite à demain)
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